LE BISTOURI DES ASSASSINS
Après le scandale de l’esclavage des migrants noirs africains révélé par une journaliste soudanaise de Cnn en novembre 2017, la Libye vient, à nouveau, de se signaler par la cruauté inexcusable de ses bandes criminelles.
Au cours de leur offensive vers Tripoli, les troupes du maréchal Haftar auraient libéré plus de 2.500 Subsahariens qui étaient encagés et dont les plus chanceux portaient les stigmates de grossières interventions chirurgicales indiquant un prélèvement d’organes pour alimenter un vaste trafic de toutes les parties du corps humain. Après le scandale de l’esclavage des migrants noirs africains révélé par une journaliste soudanaise de Cnn en novembre 2017, la Libye vient, à nouveau, de se signaler par la cruauté inexcusable de ses bandes criminelles.
En fait, ce n’est pas la première fois que de telles pratiques sont notées dans ce pays car elles dateraient de la chute de Khadafi en 2011. Les violations les plus massives des droits de la personne humaine y sont commises quotidiennement sur des milliers de jeunes africains dans la quasi indifférence des Etats, de l’Ua et de la communauté internationale. Certains pays africains comme le nôtre ont cherché à tirer leurs ressortissants de l’enfer libyen en affrétant des vols spéciaux pour leur rapatriement. Même si ce sont des décisions à saluer, il ne s’agit là que d’une solution ponctuelle, car le flot des migrants vers la Libye ne s’est pas arrêté pour autant. Ces derniers doivent faire preuve de discernement.
Aller en Europe à tout prix, sans aucune garantie de réaliser ses rêves, ne vaut pas la peine de transiter par un pays qui est devenu, pour eux, l’enfer incarné sur terre. Plus grave, certains de leurs « frères » sont de connivence avec les bandes criminelles en Libye. Une plus vigoureuse protestation des Etats africains et de leurs sociétés civiles est une attente légitime. Selon les témoignages de plusieurs migrants, des prisons privées existent dans ce pays et leurs propriétaires se livreraient à l’esclavage et au trafic d’organes. Des bateaux voguant innocemment sur la Méditerranée n’attendent en fait que de prendre livraison des précieuses « pièces détachées » humaines.
L’argument de la disparition de toute autorité centrale dans ce pays d’Afrique du nord ne saurait être invoqué pour expliquer les atrocités susmentionnées car il se heurterait tout de suite à une objection de taille : pourquoi uniquement les Subsahariens sont concernés ? Cela pose le problème du racisme qui, dans cette partie de notre continent, est nié par toutes les autorités des pays qui la composent, chaque fois qu’il est soulevé, même si la réalité de tous les jours le confirme de manière irréfragable. Un sérieux débat doit être ouvert dans le continent pour traiter cette situation très prégnante qui mine les contacts entre sa partie Nord et sa partie Sud. Pratiquement, dans tous les discours officiels, l’unité africaine est souhaitée et est même devenue un objectif politique majeur à atteindre. Mais comment la réaliser si les Africains, à l’intérieur de leur propre continent, subissent racisme, discriminations et violations de leurs droits. Le cas libyen qui n’est pas le seul (un autre pays d’Afrique du Nord est souvent cité), mérite d’être déféré devant la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples et valoir à ce pays une sévère condamnation.
En même temps, la Cpi pourrait en profiter pour démontrer davantage son utilité en poursuivant les auteurs des actes odieux indiqués plus haut, en dépit du désordre qui leur profite. En effet, si Gbagbo a été traduit devant ladite cour pour les 3.000 morts imputés à son camp pendant la guerre civile ivoirienne, pourquoi ceux qui vendent leurs semblables ou les considèrent comme une simple carrosserie « humaine » dont les pièces peuvent être arrachées et cédées au plus offrant (en Occident et au Moyen-Orient) ne connaîtraient pas les rigueurs de la justice internationale. C’est comme s’il existait une sorte de conspiration du silence sur ces pratiques inhumaines alors que tout un raffut médiatique est créé dès qu’il y a un otage occidental retenu quelque part ou une violation des droits de la communauté Lgbt. Ici, il s’agit d’humains qu’on assassine ou de qui certains organes sont prélevés de force. Mais quand il s’agit de l’Afrique, c’est comme si toutes les horreurs sont concevables.