NE TOMBONS PAS DANS L’EUPHORIE !
Aliou Cissé l’a déjà dit. C’est un «garçon béni !» Cette phrase peut être interprétée par ses détracteurs comme de la «prétention». Toutefois, les faits semblent lui donner raison. Un sélectionneur n’a pas besoin que de la compétence. Il doit aussi avoir de la baraka, beaucoup de chance. Même si la chance, il faut savoir la provoquer. Cissé est loin d’être un looser. Le Grand Chelem dans une éliminatoire d’une coupe d’Afrique des nations, c’est avec lui que le Sénégal l’a réalisé pour composter son ticket au Gabon. Qualifier le Sénégal à la coupe du monde avant même la dernière journée des éliminatoires – sans la moindre défaite et deux victoires à l’extérieur – c’est encore lui. On nous répondra qu’il n’y a pas à se glorifier de ses performances pour la bonne et simple raison que les adversaires sont d’un acabit différent que ceux que la Génération 2002 avait éliminé, notamment, le Maroc, l’Egypte, l’Algérie et la Namibie. Certes !
Mais, il faut quand même relever dans ce cas qu’on vient de loin. La dernière victoire du Sénégal dans une phase finale de coupe d’Afrique des nations avant l’arrivée de Cissé remonte à…. Alexandrie en 2006. C’était lors d’une quart de finale face à la Guinée de Pascal Feindounou et autre Fodé Massaré. En 2008, Henryk Kasperszak a abandonné le navire en pleine tempête. En 2010, le Sénégal a été privé de la plus grande fête du football africain en Angola. En 2012, on se souviendra du traumatisme de Bata. En 2013, de l’errance des Lions suite au débâcle face aux Eléphants de la Côte d’Ivoire. En 2015, le ressort va à nouveau se casser à Mongomo avant qu’on ne touche le fond avec Giresse à Malabo devant l’Algérie. C’est ainsi qu’arriva Cissé pour mettre un terme au «complexe» des Sorciers blancs qui sillonnent l’Afrique. Même s’il y a un goût d’inachevé sur l’élimination des Lions par le Cameroun en quart de finale.
Et maintenant, arrive le Mondial. Les épouvantails du football avaient fini d’empêcher certaines nations de dormir. L’Argentine, le Brésil, l’Allemagne et surtout l’Espagne étaient à éviter. Et le sort décida d’envoyer le Sénégal dans le groupe H. Celui de la Pologne, de la Colombie et du Japon. Première remarque : c’est le caractère cosmopolitique de cette poule composée par quatre pays issus de quatre continents : Sénégal (Afrique), Pologne (Europe), Colombie (Amérique du Sud) et Japon (Asie). Deuxième remarque, c’est le seul groupe qui n’a pas d’anciens champions du monde. La Pologne sera à sa 8ème phase finale avec deux performances. La première en 1974 où la sélection polonaise s’est classée deuxième du groupe B du deuxième tour derrière la RFA ; accédant ainsi, à la petite finale qu'elle remporte face au Brésil. La seconde, c’était en 1986 où elle a été éliminée en demi-finale par l’Italie. Elle affronte alors la France pour le compte de la troisième place et s'impose (3-2).
En Russie, la Pologne, quart de finaliste à l’Euro 2016, va s’appuyer sur son buteur, meilleur artificier des éliminatoires avec 16 réalisations, un record. Un très bon client pour Kalidou Koulibaly et Kara Mbodji. Rendez vous le 15 juin 2018 au stade du Spartak de Moscou. Le 24 juin 2018, les «Lions» vont faire face au pays du Soleil Levant à Lekaterinbourg. Les Japonais connus pour leur détermination à ne jamais abandonner, sont aussi à prendre très au sérieux. Mais, contrairement à la Pologne, les «Lions» ont déjà eu à se frotter à cette sélection. C’était en match amical à Tokyo en 2003 sous Guy Stephan. Le Sénégal s’était imposé (0-1) grâce à Pape Bouba Diop. Quatrième pays à composter son ticket, le Japon est devenu régulier en phase finale de coupe du monde depuis France 1998. Même si sa meilleure performance reste les 8èmes de finale (2002 et 2010) en cinq participations.
Enfin, la Colombie. D’emblée, elle rappelle de bons souvenirs à l’Afrique. Qui ne se souvient pas de ce face à face entre René Higuita et Roger Milla. Connu pour le coup de scorpion, un dégagement de la balle avec les talons en sautant et basculant, il s’était fait surprendre par le vieux Lion qui envoya l’Afrique pour la première fois en quarts de finale en 1990.
Les Cafeteros désormais coachés par l’Argentin, José Pekerman disposent de solides arguments à faire valoir avec des joueurs de dimension mondiale tels James Rodriguez, Juan Guillermo Cuadrado et autres Radamel Falcao.
Le Sénégal est donc averti. Le tirage est certes clément. Mais, il ne faudra surtout pas tomber dans l’euphorie en croyant qu’on est déjà en 8èmes de finale. Les choses ne seront aussi simples que le tirage le laisse apparaître. Il faudra batailler ferme. Trouver de bons sparring-partners capables de nous remettre en cause. Mais surtout réussir une bonne organisation, une bonne préparation en insistant sur les moindres détails.