NOUVEAU GOUVERNEMENT OU LA CHARRUE AVANT LES BOEUFS
De quel droit Macky se permet-il de faire le choix de la suppression du poste de premier ministre en l'absence d'une consultation large du peuple sénégalais débouchant sur un consensus fort ?
La nomination par décrets, signés ce samedi 6/4/2019 de M. Mouhammad Boun Abdallah Dionne aux fonctions cumulées de Premier Ministre et ministre d'État secrétaire général de la Présidence de la République donne l'image de la charrue avant les bœufs.
En effet, elle annonce une réforme institutionnelle capitale qui indique un régime présidentiel pur et dur, à la place du régime en vigueur jusque là, qualifié par les uns de régime parlementaire rationalisé, et par les autres de régime présidentialiste. C'est un choix important sur lequel je ne peux me permettre de porter un jugement, encore moins sur les raisons invoquées à l'appui.
Mais l'on pourrait emprunter à l'autre, la formule politicienne suivante : de quel droit M. Macky Sall se permet-il de faire ce choix en l'absence d'une consultation large du peuple sénégalais débouchant sur un consensus fort ?
Comme beaucoup de citoyens naïfs, j'avais pensé que le dialogue large et inclusif auquel le Président a appelé avec insistance, devait justement régler ce genre de questions nationales primordiales comme par exemple :
_ la fixation des institutions et de leur fonctionnement de manière définitive.
_ la définition du type de sénégalais et du projet de société nationale, ainsi que la formation et l'éducation qui y conduisent.
_ la conservation de nos ressources naturelles et leur exploitation, s'il y a lieu, en association avec les étrangers pour le plus grand profit des sénégalais et actuels et futurs.
Je confesse que j'ai la faiblesse de penser que ce genre de questions fondamentales doit être traité de manière prioritaire, pour leur fixer une direction nationale acceptée de manière consensuelle par toutes les franges de la société et donc, insusceptible de remise en cause, sauf si indispensable, par la même procédure.
Ainsi il sera mis fin, singulièrement sur la question de l'institution du Premier Ministre, aux errements constatés sous Senghor puis Diouf et annoncés par ce nouveau gouvernement. Mais pour cela, il faut que Macky Sall et les hommes politiques qui lui succéderont aient l'humilité de croire, avec l'ex président américain Barack Obama que l'Afrique et le Sénégal en particulier, ont surtout besoin d'institutions fortes et non de dirigeants providentiels, même éclairés, et qu'ils acceptent de s'investir corps et âmes pour la réalisation de cet objectif crucial.
Pour cela, il leur incombe de privilégier une approche inclusive consensuelle nationale, conduisant à une décision qui a toutes les chances d'être pérenne sur l'approche conventionnelle légale, majoritaire et partisane, qui entraîne une décision qui a comme tare d'être à la merci d'une remise en cause par toute autre majorité partisane, ouvrant ainsi la porte à d'éternels recommencements. Ce qui serait un handicap à notre projet national de marche en avant.
Amate Dieng est administrateur civil à la retraite