POUR UN PARTI ÉCOLOGISTE FORT AU SÉNÉGAL
Nous devons sortir de la civilisation thermo-industrielle, et faire prendre conscience que l’écologie sera la pensée dominante au XXIe siècle
Personne ne peut nier que tous les indicateurs, bien argumentés par l’écologie scientifique, sont au rouge. Ces crises écologiques (déplétion pétrolière, réchauffement climatique, désertification des sols…) s’ajoutent à la contrainte financière qui a déjà fait ses effets.
La descente énergétique va impacter tout notre tissu productif d’une façon plus violente encore qu’en 1929.
Un parti politique doit dire la réalité et montrer que nous ne pouvons affronter l’avenir sans un effort collectif important. Car si nous refusons la pédagogie de la catastrophe, ce sera la catastrophe qui servira de pédagogie…, si on peut encore parler de pédagogie quand il y a approfondissement d’une crise généralisée.
S’engager dans un parti écologiste devient ainsi un choix plus que raisonné, nécessaire.
Comme parti écologiste au Sénégal, la Convergence des Ecologistes du Sénégal (CES), se veut d’exister pour affronter ces menaces.
Pourquoi sommes-nous mobilisés pour faire vivre cette ambition en tant que troisième famille idéologique au Sénégal ?
Tout simplement parce que l’écologie politique, est un dépassement du libéralisme et du marxisme..., et ne cherche pas à reproduire l’idée d’avant-garde (du prolétariat) ?
Historiquement, la doctrine marxiste s’est basée sur l’idée de classe (les travailleurs) contre classe (les capitalistes) liée à la prise du pouvoir d’Etat (la révolution).
Le manifeste du Parti communiste (1848) a été un moment important de la lutte politique du temps de la révolution industrielle : union des travailleurs contre propriétaires du capital.
Le mouvement écologiste se trouve aux antipodes. Parce que d’abord tout le monde est écologiste, qu’il le sache ou non. Nous sommes tous concernés par le niveau insupportable d’exploitation de la planète qui ne peut que renforcer l’exploitation inadmissible de l’homme par l’homme.
Il n’y a pas d’affrontements de groupes humains ; seulement une nécessaire prise de conscience par tous de l’urgence écologique. Le comportemental individuel de sobriété est indissociable de l’action associative environnementaliste comme des décisions politiques. Il n’y a pas d’avant-garde, chacun est partie prenante de la prise de conscience.
Depuis les années 1970, l’écologie politique forme progressivement une idéologie qui va se substituer à la vulgate marxiste. Aujourd’hui le facteur «terre» est devenu plus important que le travail et le capital car sans ressources naturelles, ni travail, ni capital !
Nous vivons le nouvel anthropocène, l’exploitation de la planète par l’espèce humaine.
La Convergence des Ecologistes du Sénégal prend part à la lutte pour l’alternative au modèle dominant. Nous devons sortir de la civilisation thermo-industrielle, et faire prendre conscience que l’écologie sera la pensée dominante au XXIe siècle…
Il y a près de quarante-cinq ans qu’apparaissait René Dumont lors de la campagne présidentielle française de 1974 marquantl'entrée en politique de l'écologie. Le score obtenu par le bouillant militant de l'écologie, soutenu par le petit groupe des Amis de la Terre- 1,34 % des suffrages exprimés- n'était pas déshonorant pour un mouvement politique qui, à l'époque, ne disposait ni d'une notoriété assurée, ni du moindre appareil politique.
Dans cet espace de temps, rassemblés au sein deux partispolitiques, (le Rassemblement des écologistes du Sénégal, R.E.S- et la Fédération des Ecologistes du Sénégal, FEDES-), les Verts du Sénégal furent présents, une fois à l’Assemblée Nationale et en 2012 dans le gouvernement (un Ministre de l’Environnement) ; en partageant le pouvoir avec le Parti socialiste (PS).
Cependant la cause écologiste est toujours en hibernation dans notre pays, le Sénégal. Pour cause, la poussée rassurante de la prise de conscience des agressions contre la nature ne s'est pastraduite par une prise en compte des demandes écologistes parles politiques publiques et d’aménagement du territoire.
A quoi servent donc les écologistes en politique au Sénégal ?
Bien des militants de l'écologie restent dubitatifs. Certains nous reprochent même une «orientation organisée et canalisée» par une majorité socialo-libérale se suffisant d’approches sectorielles et ponctuelles des problèmes et enjeux environnementaux.
Pour tenter d’expliquer cette inertie, il nous faut en premier lieu revenir sur le poids électoral de l'écologie au Sénégal. A l'évidence l'élection présidentielle n'est pas un bon terrain de lutte électorale pour les écologistes. Sans doute, par l’absence répétée de candidatures écologistes faute de moyens.
En second lieu, et pour être raisonnable, l’absence d’accord programmatique lors des ententes électorales (surtout avec le parti socialiste) au terme duquel un certain nombre de mesures environnementales seront adoptées lorsque les partis coalisés seront au pouvoir, a constitué une de nos grandes faiblesses.
Cependant, notre meilleur terrain électoral a correspondu au vieux slogan «penser globalement, agir localement» : celui du local. Les élections locales ont en effet confirmé les bonnes performances des candidats écologistes à ce niveau.
L’écologie politique peut-elle alors contribuer à préparer l'avenir au Sénégal ?
On comprend qu'aujourd'hui bien des militants n'aient guère envie d'attendre que l'écologie politique assure réellement la prise en compte des enjeux environnementaux.
Pour ceux-là l'écologie politique n'a pas réalisé ses promesses, ne parvient pas à devenir une force politique majeure au Sénégal.
Il est vrai que notre parole est devenue inaudible, du fait qu’au Sénégal, nos formations partisanes ont connu trois «éclatements», situation qui a fait primer la logique de l’organisation à celle des idées.
Confondue avec le parti, la recherche d’organisation institutionnelle permanente est devenue une fin. Cette situation a conduit les partis traditionnels à toujours nous recevoir avec une certaine condescendance.
Voilà pourquoi, nous réclamons notre statut de troisième famille incontournable dans le landerneau politique sénégalais et travaillons à constituer une force politique suffisamment forte pour se passer de ce carcan que constitue un accord électoral avec les partis traditionnels et faire office d’aiguillon pour montrer qu’il y a autre chose de plus en phase avec les réalités contemporaines qu’une politique écolo-sociale-démocrate…
Notre souci principal est de chercher la décentralisation des activités et non porter principalement sur la décision d’Etat. Concrètement, nous voulons soutenir la création de communautés de résilience, celles qui cherchent localement l’autonomie alimentaire et énergétique pour assurer la transition d’une civilisation thermo-industrielle à une autre, plus conviviale, plus en phase avec les possibilités de la planète.
Papa Meissa Dieng est Secrétaire National de la Convergence des Ecologistes du Sénégal