RUSSIE 2018 POUR MACKY 2019
Il est des extases que seul le football peut procurer. La parfaite symphonie d’hier au stade Peter Mokaba de Polokwané ponctuée par une victoire 2-0 des Lions du Sénégal sur les Bafana Bafana d’Afrique du Sud avait, assurément, quelque chose de profondément extatique. Depuis le 21 juillet 2001 en Namibie, nous attendions cette seconde qualification. Intensément, impatiemment, résolument.
La génération des Sadio Mané, Khadim Ndiaye, Lamine Gassama, Mbaye Niang et autres l’a fait. Une fois encore l’invitation au banquet du football mondial est passée par l’Afrique australe. Une gaie note à l’actif du coach Aliou Cissé qui réalise ainsi la double prouesse d’aller en coupe du monde comme joueur en 2002 et entraîneur en 2018. Lui qui coache ces espoirs depuis plusieurs années malgré les critiques féroces, a eu l’intelligence de s’entourer de la génération de 2002 (Omar Daff, Tony Sylva, Lamine Diatta, etc.).
Belle note aussi pour Me Augustin Senghor qui entame de fort belle manière son troisième et dernier mandat à la tête de la Fédération sénégalaise de football (Fsf). Lui également aura eu raison de s’obstiner. Celui qui aura le plus à gagner de cette qualification, c’est bien le Président Macky Sall. Cette joie retrouvée de tout le peuple sénégalais constitue un véritable bol d’air, une bouffée d’oxygène pour son régime, écartelé entre la gestion du dossier Khalifa Sall et les sautes d’humeur du nonagénaire et toujours opposant Abdoulaye Wade.
L’ancien président, dont le moteur fonctionne avec des explosifs comme carburant, la provocation, la rupture, la transgression, l’attaque pour mieux se défendre, la levée des tabous, a besoin d’une attention soutenue pour dérouler son agenda. Or, cette qualification des «Lions» vient casser la dynamique de son action politique.
Son auditoire est diverti, dérouté vers des soucis plus terre à terre, moins existentiels. Le président Sall a eu le nez creux en misant sur cette qualification. Son gouvernement n’a pas lésiné sur les moyens entre avion de commandement, vols spéciaux pour transporter les «Lions» durant ces éliminatoires et règlement définitif de la sempiternelle question des primes, il a su jouer sa partition à merveille.
Le résultat est à la hauteur de ses attentes. D’ici au mondial prévu en juin prochain en Russie, il n’y en aura que pour le football. Les prestations des «Lions» dans les différents championnats européens, les éliminatoires de la Coupe d’Afrique des nations 2019, l’agenda footballistique est assurément rempli. Et l’attention sera pleinement sportive. La grande affaire, pour le président Sall, sera donc de faire preuve d’habileté pour gagner la bataille du bilan et d’onctuosité politique pour reprendre la main sur le processus électoral par le biais d’un dialogue franc et direct avec son opposition.
Bref, de ressembler au téflon sur lequel tout glisse. C’est le meilleur moyen de faire oublier Wade.