ATTENTION, LA NOUVELLE OPPOSITION ARRIVE...
Mansour Sy Djamil, Mamadou Lamine Diallo, Cheikh Tidiane Gadio, Ibrahima Sall, Ousmane Sonko, et maintenant, cerise sur le gâteau, l'ancien Premier ministre Abdoul Mbaye
Depuis la désormais historique date du 16 février 2016, le paysage politique sénégalais est en proie à des mutations successives. Lentes, subreptices, mais insidieusement prégnantes. En effet, la décision du Président Macky Sall de mener son septennat à terme, contrairement à ses engagements initiaux, a changé les données politiques. Ce reniement de la promesse présidentielle, n’a pas certes, eu l’effet de boomerang que pouvaient craindre le Président et ses alliés. Et moins encore, celui que pouvaient espérer, ses adversaires. Il n’en a pas moins provoqué des déchirures et de profonds ressentiments dans la classe politique. Après ce rétropédalage inclassable, les leaders de Bess Dou Niak (Mansour Sy Djamil) et Tekki de Mamadou Lamine Diallo, ont bruyamment claqué la porte de la majorité présidentielle, en prônant activement le non au référendum.
Ils rejoignent de fait les rangs de l’opposition radicale et privent Macky Sall d’un soutien de qualité, intelligent et crédible. Benno Bok Yakaar et ses alliés auraient certainement tort de considérer ces séparations comme de simples épiphénomènes au regard de l’écrasante majorité des coalisés fidèles au Président Sall, et surtout des résultats du référendum. Frustré par le déroulement de la consultation populaire et gêné aux entournures par le corset tanorien qui l’empêche de s’émanciper, Le Maire de Dakar Khalifa Sall se pose désormais en adversaire déclaré du Président Sall. Et avec lui, une bonne partie des socialistes, que l’alignement inconditionnel d’Ousmane Tanor Dieng sur l’APR, offusque sèchement. Mais OTD verrouille et contrôle le système et met sous l’éteignoir Khalifa Sall et Mme Assata Tall Sall, en fronde. Pour combien de temps ? Tout règne a une fin assurément !
Last but not the least, Cheikh Tidiane Gadio ancien ministre des affaires étrangères a décidé courageusement de couper le lien ombilical qui le reliait au Président Sall. Et ce en dépit de leurs liens quasi fraternels. Soupçonné, d’être l’enfant gâté de l’opposition, toujours à la périphérie du pouvoir, Gadio vient de marquer « son territoire » en signant un non franc et massif au référendum le plus tarifé de l’histoire du Sénégal.
Ces différentes prises de distances sonnent presque le glas des partis historiques (PS, AFP, PIT, LD, RND version Madior Diouf), obligés de s’arrimer à la barque de l’APR, comme si leur vie dépendait. Leur marge de manoeuvre est étroite, voire inexistante. Le Président Sall les maintient volontairement dans la dépendance politique, le soutien inconditionnel et la joie obligée, pour allonger toujours d’un petit chouya, leur espérance de vie politique. Dorée d’une légère couche d’opposant, la LD tente de temps à autre des barouds d’honneur par l’entremise de Moussa Sarr, défenestré de son poste de Directeur de Cabinet de Mme Khoudia Mbaye, ministre de la Promotion des Infrastructures, des Partenariats et des téléservices de l’Etat (ouf), pour non-respect du droit de réserve.
Le pouvoir aux nerfs à fleur de peau ne supportait pas des propos irrévérencieux du DC de Mme Mbaye et porte-parole de la LD, deux postures incompatibles. La LD vit un drame interne, chaque constitution de nouveau gouvernement, est source de zizanie et d’appétits.
Seydou Sy Sall le brillant ex ministre de l’habitat de Wade, a quitté le parti des jallarbistes, pour un mouvement citoyen, proche du Président Sall. La cause du divorce, une brouille avec la direction du parti qui a préféré Mme Khoudia Mbaye pour occuper le strapontin dans le gouvernement. Et pour éviter le syndrome Mbaye Diack, il a choisi de partir sur la pointe des pieds, se fendant d’une lettre de démission, que seul le secrétaire général Mamadou Ndoye aurait vue. Des yeux indiscrets le voient déjà dans prairies marron. Le patron du pôle de Diamniado n’a pas, en tout cas, perdu au change et a définitivement tourné le dos à la LD.
Mme Khoudia Mbaye reste fidèle à son parti et subit les soubresauts et les coups de boutoirs de ses camarades, avec beaucoup de stoïcisme. Jusqu’ici ira sa patience ? Son engagement auprès de Macky Sall est aussi fort que celui qu’elle voue à son parti. Il arrivera un jour où son cœur balancera forcément. Et ses pulsions semblent plus orientées vers le réalisme pense-t-on.
Devant la faiblesse électorale de ses alliés au poids politique malingre, le Président Sall se sert des libéraux du PDS comme d’une variable d’ajustement pour tenir en règle sa fragile majorité. De temps à autre il agite le levier du dialogue politique et le rapprochement avec la famille libérale, comme d’un épouvantail, pour apeurer ses alliés accrochés au pouvoir.
Cependant cette démarche pendulaire, a son retour de manivelle. La frange de la majorité que cette bipolarité n’arrêtait d’insupporter a décidé de s’affranchir de ce compagnonnage incongru aussi peu gratifiant que celui du cavalier et du cheval. La tenue du référendum dans ces conditions rocambolesques a facilité le sursaut des révoltés de la majorité las d’avaler des couleuvres. Sursaut d’éthique ou sursaut d’égo ? Les deux sans doute ! Ce nouveau visage de l’opposition est politiquement et culturellement différent de ceux des figures historiques politiques qui ont ramé à tous les courants, collaboré à tous les régimes. Au point que leur niveau et leur capacité d’indignation devant de dérives sont aujourd’hui enfouis dans les abysses du pouvoir.
A force de contempler les avantages comparatifs réels, du régime Président Sall sur celui de Me Wade, ils ont fini par passer par pertes et profits, les graves dérives du système Macky. Contraint à gérer un lourd contentieux avec le pouvoir, le PDS ne constitue pas une alternative sérieuse, contre ces dérapages éthiques dont la presse se fait l’écho tous jours (cadeaux fiscaux à des entreprises et autres hommes d’affaires proches du pouvoir, affaire du marché des visas, fraude et délinquance fiscale à l’assemblée nationale, affaires Mittal et Pétrotim,). Ses relations heurtées avec le pouvoir se situent à un niveau tellement hystérique, que la subjectivité, le règlement de comptes, et pourquoi pas le deal politique en constituent la toile de fond. Au point que la perspective d’une retrouvaille de la famille libérale donne froid au dos des Sénégalais. Et ce ne sont pas les réaménagements au sein de la CREI et des organes juridictionnels qui nous ôteront ces angoisses noires, comme des cauchemars d’hivernage.
Désespérés, les Sénégalais sont donc à la recherche d’une opposition crédible pour servir de contrepoids au pouvoir. La démocratie rejette l’unanimisme et les combines politiques aboutissant à la neutralisation des énergies positives. Elle abhorre les arrangements politiciens érigés en règle de fonctionnement politique. Elle s’accommode mal des louvoiements et autres ténébreuses conventions, qui laissent libre cours à l’accumulation de capital des uns et l’appauvrissement des autres. Une spirale dans laquelle, notre pays semble s’enlacer. Ces maux décrits sont presque mot pour mot ceux d’Abdou Mbaye, ancien Premier ministre, nouveau Président d’un parti existant mais inconnu au bataillon, l’ACT, l’Alliance de la Citoyenneté et du Travail. Ce mouvement du « travail » rappelle une ahurissante connotation bolchévique (PIT, LD) et autres partis ouvriers. Il est fort à parier qu’à son prochain congrès, Abdou MBAYE se débarrassera très vite de ce label lourd comme un fardeau que même ses légataires actuels portent en se bouchant le nez et se voilant la face.
L’engagement d’Abdou Mbaye se situe donc dans le prolongement de la révolte de figures politiques peu ou prou en alliance avec le Président Sall dans un passé encore récent. Le président de l’ACT se positionne comme un maillon de cette nouvelle chaîne de la classe politique en rupture d’avec les pratiques passéistes de la politique politicienne ou d’une opposition cripto-personnelle, nihiliste peu savante et forcément violente. A l’image de Serigne Mansour Djamil, Ibrahima Sall, Ousmane Sonko, Cheikh Tidiane Gadio, Mamadou Lamine Diallo, elle s’illustre parfaitement par sa capacité à se donner une vraie vision politique du projet de société de société dont ils veulent doter le Sénégal.
A l’opposé de la galaxie libérale recalée en mars 2012, ces leaders ne sont pas drapés dans une radicalité de principe et une violence synonyme d’incompétence, mais bien dans une radicalité réfléchie, objective, justifiée et expliquée.
Brillants économistes, banquiers de renom doublés de compétences transversales, ils sont pour l’heure intraitables sur le volet éthique et la morale politique, leur fonds de commerce. Mansour Sy Djamil, a su démontrer avec clarté et constance son opposition aux déviances politiques qui renversent ces digues morales dont notre pays a pourtant, besoin comme d’un socle référentiel solide et exemplaire. Dès, l’annonce du reniement présidentiel, il a pris ses distances, avec discrétion et respect avec, la majorité, en dépit de sa proximité parentale, voire son appartenance proche au le khalifat de Tivaouane. A l’assemblée nationale ses vaillants députés Cheikhou Oumar Sy et Hélène Tine honorent leur statut, dans cet océan d’obscurantisme que constitue l’hémicycle dévoyé. Sa touche sociale qui l’emmène très souvent aux côtés des jeunes démunis de la banlieue lui donne une texture d’homme d’état sensible aux souffrances de son peuple. Député, Mamadou lamine Diallo, comme jadis Raymond Barre, le plus grand économiste du Sénégal, démontre à chacune de ses sorties, ses énormes potentialités dont le Sénégal aurait bien du mal à se détourner. Il fait aussi des valeurs son bréviaire de tous les jours.
Economiste, philosophe, entre autres, El hadji Ibrahima Sall, (Président du parti Demain, la République,) ancien ministre du plan, brillantissime, dans ses domaines incarne, la rationalité et la rigueur dans l’analyse et les pratiques socioéconomiques. Cet homme, fort en thème, au quotient intellectuel des plus élevés, a de quoi faire prévaloir, pour donner à l’opposition une toute autre posture plus professionnelle.
Cheikh Tidiane Gadio Président du mouvement Louy Jot Jotna se démarque nettement de ces financiers et autres économistes. Homme de communication à l’expression limpide, ce brillant diplomate a damé le pion aux diplomates de carrière, même s’il en garde encore une certaine culture de la réserve prudentielle. Homme de réseaux, panafricaniste assumé, il est, en pensée et actes, un des dignes promoteurs du rêve avorté de Cheikh Anta Diop. Sa doctrine économique : intégration économique opposée à l’Afrique des nations et aux cercles concentriques senghoriens. Gadio est un des rares hommes politiques à s’appuyer sur une doctrine politique internationaliste, pacifiste, loin des égoïsmes nationaux, ethnicistes et tribalistes.
Dans cette lignée d’opposants de type nouveau, Abdou Mbaye reste encore une grosse inconnue. Novice en politique en dépit de ces 17 mois de primature, il en est encore aux balbutiements dans un domaine qui le met désormais en scelle, dans une posture d’opposant, alors qu’il a toujours baigné dans les lambris dorés d’une carrière professionnelle de rêve. Banquier émérite, son passage à la primature ne laisse pas des souvenirs indélébiles, dans un sens comme dans l’autre. A-t-il eu les moyens de ses ambitions ? A-t-il péché par naïveté ou par méconnaissance des réalités du pays ? Le voilà désormais dans un nouveau challenge, qui n’a rien à voir avec les précédents. Et être un ancien camarade d’école de François Hollande ne suffira pas à l’en sortir. Il lui faut bien plus d’arguments pour atteindre le niveau de l’actuel président français. Les moyens intellectuels et professionnels ne lui manquent pas. Son éthique professionnelle et sa morale politique ne sont pas en cause. Aucun antécédent judiciaire ne lui est, pour l’heure, reproché. On s’étonne du violent tir de barrage organisé contre lui par des hommes politiques inquiets de sa fulgurante montée et des journalistes manipulés et actionnés, qui auraient sans doute, si les murs savaient parler plus de choses à se reprocher. Abdou Mbaye est à lui-seul un laboratoire d’idées, pour expérimenter, à l’image du Bénin, une nouvelle forme de faire la politique et de diriger un pays. Les « professionnels politiciens » ont du souci à faire, car une nouvelle voix, montre la voie d’une démocratie efficace et productive de bien-être.
Leader du Parti Pastef, Ousmane Sonko bouleverse tous schémas d’une opposition classique. Il a choisi, non sans risque de faire de la révélation son arme de taille. Dans un pays, où le Président cumule ses fonctions avec celles de chef de parti, où des directeurs généraux et ministres empilent des fonctions électives avec des responsabilités administratives et de gestion où les ministres et des DG sont mis en congés pour les besoins partisans, que pourrait-on lui reprocher ? Il est sans doute l’incarnation vivante du nouveau type d’opposant dont le Sénégal a besoin pour combattre l’impunité et la gabegie.
L’irruption de cette opposition de type nouveau présente pour l’heure, un intérêt principal, une alternative crédible, certes peu populaire, à un état d’esprit d’opposant enkysté dans conflictualité stérile et un pouvoir accumulateur et à la vision court-termiste. C’est notre démocratie qui y gagnera forcément.