DES ELUS DE DAKAR CLASHENT AMINATA MBENGUE NDIAYE
Plusieurs élus communaux se démarquent de l'idée évoquée par la présidente du Haut conseil des collectivités territoriales et qui consisterait à doter d'un statut particulier certaines villes, à l'image de Dakar
Des élus de Dakar se prononcent sur le débat en cours portant sur l’idée de doter un «statut particulier» à certaines villes du Sénégal comme Dakar avec la nomination du futur maire par décret présidentiel. Interpellés par Sud quotidien hier, vendredi 14 février, ces élus issus des trois forces politiques à la tête des communes de la capitale dont la majorité Benno Bokk Yaakaar, Taxawu Dakar de l’ancien député maire de Dakar et le Parti démocratique sénégalais se sont démarqués de cette idée évoquée par la Présidente du Haut conseil des collectivités territoriales (HCCT), Aminata Mbengue Ndiaye.
SANTY AGNE SÉNE, MAIRE DE LA COMMUNE DE LIBERTÉ : «Pourquoi doit-on limiter cette proposition seulement à Dakar ? »
«C’est à travers la presse que je suis informé qu’une haute autorité de ce pays a évoqué une proposition d’un statut particulier pour la ville de Dakar. Mais, je n’ai encore entendu aucune argumentation. Il me semble que quand vous voulez passer d’un statut à un autre, il faut mettre sur la place publique les tenants et les aboutissants de cette proposition. Quels sont les arguments ? Je ne les ai pas entendus, il me sera donc très difficile de commenter une position sur le mode du «c’est comme ça» ou «c’est comme ça qu’il faut». Je veux qu’on me dise le pourquoi on doit faire comme ça. Quelles sont les incidences ? Pourquoi doit-on limiter cette proposition seulement à Dakar ? Étant entendu qu’il y a des villes qui polarisent également des communes. Alors, c’est sur la base de tout cet argumentaire que je peux me permettre de juger de la pertinence ou non d’une proposition et que je pourrais donner mon avis. Ce qui n’est pas encore le cas. Donc, pour le moment, je ne peux que dire il faut argumenter. Parce que celui qui dit qu’il faut changer doit avoir les arguments et jusqu’à preuve du contraire je ne les ai pas encore entendus. Je ne peux pas me prononcer sur le fond d’une proposition non argumentée ».
MOUHAMED DJIBRIL WADE, MAIRIE DE BISCUITERIE : «Nommer le maire de la ville de Dakar… revient à ôter à la population son droit légitime»
«À vrai dire, je n’ai pas encore lu le texte et les arguments développés pour soutenir cette idée mais je pense que le Sénégal a connu des avancées significatives en matière de démocratie que nous devons sauvegarder et renforcer. Pour se faire, il nous faut impérativement éviter certaines démarches dont l’objectif est de nous faire reculer. Nommer, aujourd’hui, le maire de la ville de Dakar par décret présidentiel, revient à ôter à la population son droit légitime. Et, je pense que ce n’est pas une bonne chose. Cependant, je pouvais comprendre qu’on parle d’un statut particulier pour Dakar, Touba à l’image de Monaco et la Corse en France. Car, le département de Dakar concentre, aujourd’hui, l’essentiel des activités économiques du pays. Je pourrais également comprendre qu’on pose le débat concernant le découpage administratif du département de Dakar. Car, je pense que le nombre des communes (dix-neuf) est énorme. À mon avis, on devait voir comment mettre ensemble certaines communes afin de les rendre plus compétitives. Si je prends l’exemple de ma commune, je pense qu’elle n’a pas sa raison d’être, on pouvait la jumeler avec celle des Hlm et Grand Dakar etc. Pour le reste, je pense que les Dakarois doivent continuer à élire leur maire comme leurs frères et sœurs habitant à Pikine et Guédiawaye».
CHEIKH GUEYE, MAIRE DE DIEUPPEUL DERKLE : «Je ne peux pas comprendre qu’on puisse vraiment faire un recul avec ce statut de Dakar»
«Sur ce dossier, il y a à boire et à manger. J’aurais aimé que les gens attendent de voir le rapport de présentation pour avoir la matière et s’exprimer après. Parce que, je ne pense pas que tout ce qui se dit dans la presse, soit quelque chose qui est fondée. Je ne peux pas comprendre qu’en 2020, après la mise en place de l’Acte III, après l’ambition de l’Etat qui consiste à faire de nos territoires des endroits viables au développement durable, qu’on puisse vraiment faire un recul avec ce statut de Dakar, pour nommer le maire. Je ne pense pas que le gouvernement soit dans cette disposition. Ce que je pense, par contre, c’est de réfléchir sur comment renforcer les pouvoirs de la ville de Dakar ; comment faire de sorte que les programmes de Dakar puissent être déroulés sans difficultés, sans obstacles. Ça, je peux le comprendre. Mais, penser qu’aujourd’hui, il est question de revenir sur le mode d’élection du maire de Dakar ne me semble pas être à l’ordre du jour».