ENTRE CISSE LO ET MACKY SALL, UNE GUERRE D’USURE SANGLANTE DÉCLENCHÉE
Pour Moussa Diaw, la décision d’exclure le député du parti présidentiel annonce une fin de règne non préparée avec des rivalités qui vont s’accentuer
Moustapha Cissé n’est plus membre de l’APR (Alliance Pour la République), le parti du président de la République. Il a été exclu hier sur ordre de ce dernier. Une exclusion qui pourrait constituer une « prise de risques » pour Macky Sall et son parti, qui vont devoir faire face à la colère de l’ancien président du Parlement de la Cedeao, capable de déclencher « une guerre sanglante ».
Il est beaucoup trop tôt pour enterrer Moustapha Cissé Lô. Membre historique de l’Alliance pour la République, Moustapha Cissé Lô a été exclu hier lundi 06 juillet 2020 par les instances du parti au pouvoir.
Sous la houlette de Abdoulaye Badji, la Commission de discipline de l’APR, disant se baser sur les articles 3, 4, 14, 19, et 20 des statuts de cette formation mais aussi sur les articles 25 et 26 du règlement intérieur, a scellé le sort du « rebelle ». « Constatant l’attitude du camarade Moustapha Cissé Lo dont les propos, empreints d’une indécence que récusent la morale et la bienséance sociale, ont fini de heurter la conscience des populations, Constatant la propension de camarades du Parti à s’épancher dans les médias par des propos injurieux ou calomnieux ; Attendu que par ces faits, ils entachent gravement l’image du Parti.
Par ces motifs, la commission de discipline, après avoir délibéré, à l’unanimité : Prononce l’exclusion définitive de Moustapha Cissé Lo des rangs de l’Alliance pour la République. » La sentence se veut sans appel. La commission de discipline n’a pas manqué d’avertir fermement tout membre de l’APR qui adopterait des comportements et des propos à même de ternir l’image de ce parti ou de jeter le discrédit sur les institutions de la République qu’il subirait le même sort que le « rebelle » Moustapha Cissé Lô. Une décision qui traduit un malaise au sein de l’APR et qui serait, aussi, « symptomatique » de la situation des partis qui ne sont pas structurés voire qui n’ont pas, selon le professeur Moussa Diaw, de code de conduite entre autres. « Ces individus ou personnalités s’engagent derrière quelqu’un pour avoir, une fois au pouvoir, des retours. Ce qui est dommage. On les appelle partis politiques mais ce sont des associations qui regroupent différents individus de la société avec leurs comportements, leurs éducations… », explique l’enseignant- chercheur à l’université Gaston Berger de Saint-Louis.
Pr Moussa Diaw : « Cissé Lô sera le perdant dans ce face-à-face »
Toujours selon Pr Moussa Diaw, cette décision d’exclure Moustapha Cissé Lô annonce une fin de règne non préparée. A l’en croire, des rivalités vont s’accentuer au sein du parti présidentiel. « Chacun essaie de se positionner. Tout cela parce que le parti n’est pas structuré et aussi du fait que le président de la République joue en même temps le rôle de chef de parti. Cette situation coïncide aussi avec le fait qu’il n’y a plus de Premier ministre. Le Président est obligé de gérer directement le pays mais également son parti qui n’a pas de numéro 2. »
A la question de savoir si Moustapha Cissé Lô pourra gagner son combat contre Macky, le « politologue » pense que même si le candidat à la mairie de Dakar va perdre ce face-à-face, il pourra peut-être faire un baroud d’honneur. Selon notre interlocuteur, l’ancien président du Parlement de la Cedeao ne pourra pas résister à la toute puissance du président de la République et de ses affidés. Quoi que Cissé Lô fera, il perdra, selon lui.
Le Pr Moussa Diaw est toutefois d’avis que, dans cette affaire d’insultes, Moustapha Cissé Lô n’est pas le seul à incriminer. « Et apparemment, il y aura des poursuites judiciaires. Comment Cissé Lô va-t-il apprécier cette réaction ? va-t-il se laisser faire ? Fera-t-il des révélations lors de la bataille judiciaire ? Est-ce que ce n’est pas stratégie pour ouvrir d’autres voies ? Mais cela dépendra du soutien qu’il aura », développe l’enseignant-chercheur à l’université Gaston Berger de Saint-Louis. Il se dit convaincu qu’aucun membre du parti au pouvoir n’osera afficher son soutien à Moustapha Cissé Lô par peur d’être sabré par le chef de ce parti qui n’est autre que le chef de l’état. « Comme vous le savez, les élections (Ndlr, présidentielles) sont encore loin. Donc, nul ne va accepter de manifester publiquement son soutien à Cissé. Il risque d’être seul dans ce combat », conclut notre analyste… Macky Sall est sur une pente dangereuse. Il devra se méfier de la réaction de son désormais « ex-ami » Cissé Lô, qui « n’est pas homme à se laisser dicter sa conduite »...