GERMES DE LA VIOLENCE
L’on a coutume de se targuer d’une expérience électorale centenaire au Sénégal, pour rassurer sur la tenue d’élections calmes et transparentes, mais il n’en demeure pas moins que le pays n’a pour autant pas été épargné par la violence électorale
L’on a coutume de se targuer d’une expérience électorale centenaire au Sénégal, pour rassurer sur la tenue d’élections calmes et transparentes, mais il n’en demeure pas moins que le pays n’a pour autant pas été épargné par la violence électorale. En perspective des élections de 2019, les germes de la violence résident, dans la rupture unilatérale du consensus autour du parrainage, du bulletin unique, tout comme de la personnalité en charge de l’organisation des élections, etc.
En effet, il a été prouvé que les ressorts de la violence, bien que divers, peuvent provenir de l’absence de consensus sur les règles électorales. L’exemple typique, la plus récente au Sénégal, est le 23 juin 2011, quand l’Assemblée nationale, composée à 88% de membres du parti présidentiel, examinait le projet de loi du président Abdoulaye Wade prévoyant d’abaisser de 50% à 25% la majorité requise pour être élu au premier tour du scrutin, et la création d’un poste de vice-président. La manifestation a tourné à l’émeute et la ville de Dakar a été le théâtre d’affrontements violents entre manifestants et forces de l’ordre, avec un bilan lourd de 102 blessés dont 13 policiers, selon la police.
A noter que lors des différentes élections qui se sont déroulées de 2000 à 2012, notamment des présidentielles de 2000 à ceux de 2012, en passant par les législatives de 2001, les locales de 2002, ou encore la présidentielle, les législatives et les sénatoriales de 2007, sans oublier les locales de 2009, tous ont connu des violences à des degrés différents et à divers endroits du pays. A rappeler, en outre, que les violences électorales consécutives aux élections présidentielles de 1988 étaient ainsi largement imputables à l’absence de consensus sur le droit électoral de l’époque.
En effet, la loi n° 82-10 du 30 juin 1982 portant Code électoral a été fortement combattue, lors de son adoption, par l’opposition parlementaire et presque par tous les partis d’opposition lors des élections du 27 février 1983. Si en 1983, malgré la colère, l’opposition de l’époque n’avait pas appelé à la violence, tel ne fût pas le cas en 1988 où les violences électorales débouchèrent sur l’état d’urgence. Ce qui avait poussé, sans doute, le président Diouf à mettre en place une Commission dirigée par le juge Kéba Mbaye qui avait pour mission d’élaborer un code électoral consensuel. Cependant, si l’objectif fut atteint en 1992, sa mise en œuvre a vite fait de montrer ses limites pendant les élections législatives de 1993. Les blocages enregistrés en raison du mode de décision fondé sur le consensus ont conduit à la démission du Président du Conseil constitutionnel, mais surtout à l’assassinat du Vice-Président du Conseil constitutionnel Me Babacar Sèye. Des exemples, parmi tant d’autres, qui montrent que la rupture du consensus, ajoutée au déficit de confiance dans la justice par l’opposition, peuvent être à l’origine de la violence électorale d’ici 2019.