IL FAUT RATIONALISER LES RÉSOLUTIONS ET PRENDRE DES DÉCISIONS APPLICABLES
Mankeur Ndiaye sur l’UA
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L’Ua, à l’mage de l’Organisation des Nations unies (Onu), se caractérise par une pléthore de résolutions, sans qu’il y ait souvent une mise en œuvre. C’est pourquoi le ministre des Affaires étrangères Mankeur Ndiaye, appelle à rationaliser et prendre des décisions applicables. Par ailleurs, le déploiement de 5.000 éléments au Burundi en proie à une crise depuis plus de 8 mois, a été au centre des discussions lors du sommet. Si Bujumbura ne veut pas de cette intervention qui passe pour une ingérence dans ses affaires intérieures, l’Ua ne fera pas de forcing, selon Mankeur Ndiaye. Pour lui, l’Organisation ne cherche qu’à appliquer le principe de la solidarité.
L’Afrique tarde à décoller malgré de multiples réformes. Qu’est ce qui l’explique à votre avis ? Pensez vous que ce sommet puisse induire de véritables changements ?
On a envisagé des réformes institutionnelles au sein de l’Ua et ses organes. Qu’est ce qui n’a pas marché ? Il faut reconnaître qu’il y a des organes qui n’ont pas été mis en place depuis que l’organisation continentale a été créée. Aujourd’hui, on parle des réformes monétaires au sein de la Banque centrale. D’autres réformes sont prévues mais il faut rationaliser.
Nous nous pensons qu’il faut éviter la démultiplication des structures. Nous devons également mettre en application le principe de solidarité. Dans cette optique, s’il y a des choses que les organisations régionales et sous-régionales savent mieux faire que l’Ua, elle est tenue de leur déléguer cette tâche.
Parce que les piliers de l’Union, ce sont les organisations régionales. Il ne faut pas qu’elle fasse ce que ces mêmes structures font. S’il y a des questions qui peuvent être mieux traitées par les communautés économiques, par la Cedeao ou par d’autres organes, il faut respecter leurs décisions.
L’Union africaine doit se concentrer sur les questions politiques fondamentales, la mobilisation des ressources pour le développement de l’intégration, la libre circulation des biens et des personnes, le développement des infrastructures, la mise en œuvre du Nepad qui est son programme de développement économique. C’est très important.
Le président Macky Sall assure la présidence du comité d’orientation des chefs d’Etat et de gouvernement. Il l’a dit dans son rapport qu’il va soumettre au prochain sommet qui se tiendra au mois de juillet prochain à Kigali.
D’habitude, les rapports sont soumis immédiatement mais décision a été prise de différer la présentation du rapport au prochain sommet. Il présentera son rapport mais il faut que l’Union se mobilise pour la mise en œuvre de ce programme de développement des infrastructures, infrastructures ferroviaires, infrastructures routières dans le domaine de l’énergie, dans le domaine de l’interconnexion électrique.
L’un des axes majeurs du Nepad porte sur ce volet, le continent africain à la traine sur le plan infrastructurel ?
L’Afrique est enclavée. Le transport aérien pose problème. Parfois pour venir dans un pays africain, on est obligé de remonter jusqu’en Europe. La question du transport est vitale. Pourquoi l’Afrique, malgré tous les moyens dont elle dispose, ne peut pas transformer son transport aérien. Il faut qu’au niveau de la sous-région, des communautés économiques sous-régionales, cette question du transport soit prise à bras le corps.
Dans l’espace Cedeao, des initiatives ont été prises. Le président Ouatara a été désigné champion dans ce domaine car on essaie de voir comment développer le transport aérien en Afrique. L’Afrique a les moyens de le faire parce que s’il n’y a pas de transport aérien, s’il n y a pas de chemin de fer.
L’Afrique est considérée comme une championne en matière de résolution et la mise en œuvre semble être une utopie.
On a tenu compte de cette dimension. On en a parlé. Il y a trop de résolutions. C’est comme aux Nations unies, il n’y a pas de mise en œuvre. Nous sommes très faibles quand il est question de mise en œuvre. Il nous faut rationaliser et prendre des décisions qui sont applicables.
L’Union africaine, dans sa nouvelle architecture, doit prévoir des mécanismes de suivi et d’application. Il faut également que les commissaires travaillent davantage et entrent en interaction avec les Etats, descendent sur le terrain et travaillent avec les chefs de départements ministériels dans les domaines qui leur sont confiés au sein de la commission. Et que les commissaires travaillent également avec les commissaires dans les communautés économiques régionales.
Au niveau de la Cedeao, nous avons quinze départements économiques et 15 commissaires. Il faut que ceux-là qui s’occupent des questions sous-régionales puissent être en interaction. Nous avons également besoin, lors des grandes rencontres, comme les sommets de l’Ua, d’alléger les ordres du jour pour permettre aux chefs d’Etat d’aller à l’essentiel et de donner les grandes orientations. Cela permettra aux ministres d’approfondir certaines questions et de mieux préparer les délibérations des chefs d’Etat. C’est en substance ce que le Sénégal pense du fonctionnement de l’Ua.
La situation au Burundi préoccupe la communauté internationale. Des positions divergentes ont été notées sur ce point. Bujumbura ne veut pas toujours des forces de maintiens de l’Ua. Qu’en dites-vous ?
La position qui a été adoptée par l’Union africaine, c’est celle du Conseil de paix et de sécurité qui avait décidé de l’envoi de 5.000 éléments au Burundi dans le souci de l’aider. Tout ce que nous pouvons faire, c’est aider le Burundi, l’accompagner, pacifier la situation, encourager le dialogue politique entre les acteurs. Nous cherchons à faire dans la prévention pour éviter le pire.
L’Union africaine cherche à prendre ses responsabilités dans ce dossier. Le Conseil de sécurité a dépêché, il y a une dizaine de jours, une importante mission qui a discuté avec les différents acteurs. Cette mission, en rentrant à New York, est passée par Addis Abeba pour discuter avec les responsables de l’Ua sur la situation au Burundi. Mme le ministre des Affaires étrangères du Rwanda a souligné, dans son intervention, qu’il y a de sérieuses inquiétudes sur ce qui passe au Burundi. Il faut éviter le pire, prévenir, favoriser le dialogue politique et demander au Burundi d’accepter les propositions faites par l’Ua.
L’Ua a décidé d’être plus conciliante ?
Oui parce que le Burundi a réaffirmé sa position. Nous espérons qu’il y aura un espace de dialogue pour trouver une solution. Il faut toujours penser au peuple burundais. C’est très important. Il faut toujours, dans tout ce que nous entreprendrons, mettre en avant les intérêts du peuple burundais, sa sécurité.