INJONCTIONS PARADOXALES !
Le calendrier républicain n’est pas le sien. Certes, en tant que président de la République, Macky Sall incarne l’État et la Nation, mais n’en est pour le moins le décideur exclusif
Il n’en rate pas une, assurément ! Entre les inaugurations, ses retraites spirituelles dans les villes saintes, véritables campagnes électorales avant la lettre, et l’Université Républicaine, démentiellement relayée et passée en boucle par les médias privés et publics, le Président Macky Sall décoche ses flèches assassines sur toutes ses catégories d’adversaires et autres trublions. Personne, n’est en apparence épargné : opposants, société civile, chroniqueurs, constitutionnalistes.... Même ses partisans ont eu leur part dans le courroux présidentiel.
Aux premiers, le Président Sall reproche leur trop forte propension à vouloir bousculer son «calendrier personnel» dont il se dit seul et unique détenteur. À ses frères apéristes, est servie l’éternelle rengaine, leur incapacité à défendre son voluptueux bilan. Et surtout leur grave inclination à se chamailler, comme des aboyeurs de foire, dans le sombre dessein d’engranger des postures juteuses.
En bon croyant, seuls Dieu et le Peuple trouvent ainsi, grâce à ses yeux. Ce binôme référent est donc son seul juge. Que les autres justiciers attendent leur tour ! Et comme il ne perçoit- et ne conçoit- d’autres forces supérieures aptes à l’emmener à presser le pas vers la tenue de sa promesse de réduction de son mandat, les autres auront beau parler, admonester, menacer, marcher que n’y ferait.
Sublime générosité, il serait même prêt à accorder à ses opposants, une place plus large (dans Dakar ?) que celle de l’Obélisque de Colobane, pour étaler au cru du jour, leur ire désespérée. Voilà au moins un point de gagné dans l’expression de la liberté de manifester, rudement malmenée ces derniers temps par des interdictions insensées et malencontreuses. Acceptons-en l’augure, en espérant que par la grâce divine, cette promesse sera tenue. Et que l’identification du site ne mettra pas autant de temps que la fixation de la date du référendum.
En attendant que le Président Sall veuille bien se «lâcher» sur son calendrier personnel, ses partisans devraient se tenir à carreau ou alors s’initier aux techniques de communication pour renforcer leur capacité à valoriser ses actions, capitaliser son bilan à «trois-cinquième»-parcours.
Les opposants, la société civile, les spécialistes et autres chroniqueurs, ciblés comme les rabat-joie du Président, devront apprendre à prendre leur mal en patience, phosphorer sur le réchauffement climatique et cogiter sur le providentiel PSE. Ou à défaut, jaser sur nos contreperformances sportives, les sorties tapageuses de la PERL à la suite des infamies du littoral, les scandaleuses profanations sacrificielles du cimetière de Pikine, l’indécence des cachets des lutteurs, la bérézina des Le Pen et du Front national en France, la pantalonnade des socialistes français, l’absence des Tanor, Ndoye et autres membres de Benno Bokk Yakaar à l’université républicaine des jeunes apéristes. Mais, aussi de la présence de Niasse et Djibo Kâ et… Moustapha Sy Djamil à ces défouloirs collectifs. Bref il y aurait de quoi s’occuper, en attendant Godard.
À l’évidence, les injonctions du Président Sall paraissent bien paradoxales. Le calendrier républicain, n’est pas le sien, si tant est qu’il est notre serviteur suprême. Certes, en tant que président de la République, Gardien de la Constitution, il incarne l’État et la Nation, mais n’en est pour le moins le décideur exclusif. Il est l’élément le plus proéminent, mais n’acte pas dans le désert humain, comme le ferait le chef d’une République bananière, qui ne correspond pas, à parler vrai, à son profil…
Mais chercher à ramener ce calendrier à son seul et unique bon vouloir, nous conduirait tout droit vers la monarchie constitutionnelle. Ce que nous ne voudrions pas. Notre pays a pour ainsi dire, son propre biorythme. Il fonctionne selon des normes républicaines et à partir d’échéances acceptées par tous ses segments, dans leur composition diverse. Le mandat du Président est personnel et non exclusif. Le temps étant le rendez-vous des hommes, les Sénégalais ont besoin de savoir ce qu’en fait le Président, où, quand, comment et pourquoi. Pour que chacun dans son rôle bien compris, s’y prépare convenablement.