KHALIFA DÉBOUTÉ
Emprunt obligataire - La Cour suprême n'a pas donné suite à sa requête contre l'État pour "excès de pouvoir"
Pour décrocher son emprunt obligataire de 20 milliards, la Ville de Dakar devra repasser. La Cour suprême n'a pas donné suite à sa requête contre l'État pour "excès de pouvoir". La Haute juridiction a tranché en faveur des services du ministre des Finances, Amadou Ba.
L'affaire judiciaire dite de l'emprunt obligataire de la Ville de Dakar qui porte sur la somme de 20 milliards a été vidée par la Cour suprême. La Haute juridiction a débouté le maire de Dakar de sa requête contre l'État pour "excès de pouvoir". Khalifa Sall s'était en effet vu servi à trois reprises par l'État du Sénégal un avis de non-objection étayé par des arguments qui ne pouvaient pas prospérer aux yeux du premier magistrat de la Ville de Dakar. Ce qui l'avait amené à saisir la Cour suprême.
Première déconvenue du maire de Dakar
Il faut dire que le Conseil régional de l'épargne publique et des marchés financiers (Crepmf), organe de l'Uemoa, sur requête du ministère sénégalais des Finances, avait confirmé en son temps la suspension de l'emprunt obligataire de 20 milliards de francs Cfa que la Ville de Dakar voulait lancer. Cet organe de l'Uemoa demandait ainsi à la mairie de la capitale "de se rapprocher des services du ministère de l'Economie, des finances et du plan pour clarifier les objections techniques qu'ils ont soulevées". Du coup, l'organe de l'Uemoa invitait "la Ville de Dakar de se conformer" à la mesure prise par les services de Amadou Ba. La décision du Crepmf était motivée par le fait que "les arguments soulevés par le ministère des Finances" pour suspendre la procédure déclenchée par la mairie de Dakar lui "paraissent pertinents".
Les services de Amadou Ba, écrivait Le Quotidien le mardi 24 février dernier, avaient demandé un complément d'informations à l'issue d'une première réunion, tenue le vendredi 20 février dernier, avec des partenaires financiers du Sénégal comme l'Union européenne (Ue), l'Agence américaine pour le développement international (Usaid), la Banque mondiale, l'Agence française de développement (Afd), la Banque africaine de développement (Bad), la Banque ouest africaine de développement (Boad) etc. L'objectif visé était d'évaluer le niveau d'endettement de la Ville de Dakar et sa capacité de remboursement.
Et "les gens avaient trouvé que la Ville de Dakar s'était trop endettée. Déjà, elle avait souscrit auprès de la Boad un emprunt de plus de 9,700 milliards de francs Cfa destinés à la voirie publique", soulignaient un de nos interlocuteurs. Et ce dernier poursuivait, en soutenant : "Un autre emprunt de 6,600 milliards de francs Cfa avait été contracté (par la mairie de Dakar) pour l'électrification urbaine." La même source ajoutait en annonçant que la Ville de Dakar avait reçu de certaines banques de la place des avances de trésorerie d'un montant tournant autour de 8 milliards de francs Cfa.
A travers leur démarche, les techniciens du ministère de l'Economie et des finances et du plan, informait-on, voulaient savoir combien la mairie de Dakar doit et quelle est sa capacité de rembourser les dettes qu'elle a contractées. Parce qu'en cas de défaillance de la Ville de Dakar, soulignait-on, c'est l'État du Sénégal qui va se subroger à la mairie de la capitale pour effectuer le remboursement. Autrement dit, ce nouvel emprunt obligataire de la Ville de Dakar risque d'engager les crédits de l'État. "En cas d'informations erronées fournies aux partenaires financiers, cela peut engager la crédibilité de l'État du Sénégal sur les marchés financiers", avertissait-on.
Dernière passe d'armes
Ce contentieux mettant aux prises l'État du Sénégal et la Ville de Dakar s'était en effet invité au 1er Forum de l'obligation municipale, tenu à Dakar le 25 avril dernier. Et à l'occasion au maire de Dakar qui soutenait à l'attention de l'État que "ce n'est pas à (celui-ci) de juger si le projet est fiable ou non, c'est au marché de le faire", Cheikh Tidiane Diop, représentant le ministère de l'Economie, des finances et du plan, rétorquait que "le problème n'est pas politique, mais technique". Pour ne pas en parler, M. Diop invoque le fait que le dossier est devant le juge. "Attendons sa décision… Ce n'est pas pour un dossier seulement que nous allons dire que l'État n'est pas là. L'État a toujours été là. Et son soutien aux Collectivités locales est acquis", s'était défendu M. Diop.