«LA MAJORITE DES SENEGALAIS PENSENT QUE LE PAYS SE DIRIGE DANS LA MAUVAISE DIRECTION»
Résultats d'une enquête d'évaluation de la gouvernance économique et politique et l’accès aux services sociaux de base dans le pays
Afrobarometer est un réseau panafricain qui produit des données fiables sur les expériences et appréciations des Africains relatives à la qualité de vie, à la gouvernance et à la démocratie. Avec son partenaire au Sénégal, le Consortium pour la Recherche Economique et Sociale (CRES), il a réalisé une enquête pour évaluer la gouvernance économique et politique et l’accès aux services sociaux de base dans le pays. Cette étude permet ainsi de passer au crible la gestion des différentes institutions du pays.
Le travail de terrain pour le 8ème tour d’Afrobarometer au Sénégal a été effectué entre le 12 décembre 2020 et le 9 janvier 2021. L’enquête a interviewé 1 200 adultes sénégalais. A en croire le document parvenu à «L’AS», un échantillon de cette taille donne des résultats avec une marge d’erreur d’environ 3 points de pourcentage à un niveau de confiance de 95%. L’analyse des résultats permet ainsi d’avoir une idée globale sur le système démocratique sénégalais et d’évaluer les politiques publiques. D’abord, en ce qui concerne la gouvernance économique, le rapport révèle que la moitié des Sénégalais (51%) estiment que leurs conditions de vie actuelles sont bonnes tandis que près du tiers (32%) présentent les leurs comme mauvaises. Pendant ce temps, toujours d’après l’enquête, la majorité des citoyens (60%) pensent que le pays se dirige dans la mauvaise direction. En effet, selon l’étude d’Afrobarometer, 46% des Sénégalais jugent «assez mal» ou «très mal» la situation économique actuelle du pays.
Toutefois, note-t-on, un peu plus de quatre citoyens sur 10 (41%) la décrivent comme «assez bonne» ou «très bonne». L’étude laisse aussi entrevoir que le niveau de pauvreté vécue au Sénégal est en hausse. «La proportion de personnes ayant vécu une forte pauvreté est passée de 25% en 2017 à 34% en 2021», renseigne le rapport qui ajoute dans la foulée qu’une bonne partie de la population juge «plutôt mal» ou «très mal» les réponses du gouvernement actuel aux préoccupations des citoyens, notamment en termes de création d’emplois, de réduction des inégalités, d’amélioration des conditions de vie des pauvres, etc.
«LES SENEGALAIS FONT BEAUCOUP PLUS CONFIANCE AUX LEADERS RELIGIEUX»
L’enquête d’Afrobarometer s’est ensuite focalisée sur la gouvernance politique. Et selon les résultats, la majorité des personnes interrogées pensent que le Sénégal est une «pleine démocratie» ou «une démocratie avec des problèmes mineures», mais elles restent insatisfaites de la manière dont la démocratie fonctionne. L’étude est venue confirmer l’idée selon laquelle les marabouts sont plus écoutés et respectés dans ce pays. En effet, l’enquête indique que les Sénégalais font beaucoup plus confiance aux leaders religieux (88%) et aux forces de défense (85%). En revanche, près de la moitié accorde sa confiance aux dépositaires des pouvoirs exécutif (52%) et judiciaire (53%), tandis que seule une minorité (32%) de citoyens fait confiance au pouvoir législatif représenté par l’Assemblée nationale. Et dans la grande majorité, les Sénégalais rejettent les formes de régimes autoritaires et affirment leur préférence pour la démocratie. Les citoyens disent se sentir libres d’exprimer leurs opinions mais ils pensent que la loi traite les populations de manière inégalitaire, lit-on dans le rapport.
VERSEMENT DE POTS-DEVIN : LA POLICE POINTEE DU DOIGT
Enfin, concernant l’accès aux services sociaux de base, le document laisse entrevoir que la plupart des usagers des services publics jugent difficile l’obtention des services demandés, et certains n’hésitent pas à verser des pots-de-vin pour les acquérir. D’ailleurs, 40% des Sénégalais estiment payer des pots-de-vin pour éviter des difficultés avec la police ; 23% pour l’obtention de documents (passeport, CNI, perms, etc.), 13% pour une assistance de la police, 10% pour des soins médicaux et 8% pour l’école publique. En outre, une forte présence d’infrastructures scolaires (92%), de réseaux électriques (81%), de systèmes d’adduction d’eau (81%) et d’établissement sanitaires (69%) a été observée dans les différentes localités du Sénégal. Pour finir, il est établi que peu de répondants à l’enquête habitent dans des zones desservies par des postes de police/gendarmerie (38%), des bureaux de poste (32%), et des systèmes d’évacuation des eaux usées (22%).