L'ABSTENTION EST UNE HYPOTHÈSE ENVISAGEABLE
Maurice Soudiek Dione, agrégé de droit, sur les élections législatives se prononce sur le manque d'engouement constaté pour la campagne électorale en direction des législatives
Va-t-on vers des élections législatives avec un taux d'abstention record ? Pour le politologue et professeur agrégé de droit, Maurice Soudiek Dione, c'est une hypothèse envisageable, même si, selon lui, elle peut-être une bonne occasion de freiner les velléités de troisième mandat du Président Macky Sall.
Le manque d'engouement constaté pour la campagne électorale en direction des législatives augure-t-il une abstention des Sénégalais le 31 juillet ? La question n'est pas tout à fait tranchée. Mais pour le Pr Maurice Soudiek Dione, invité de l'émission «Opinion» sur «Walfadjri», c'est une hypothèse envisageable. «C'est une hypothèse envisageable parce qu'on voit quand même qu'il y a des priorités. On a une hausse vertigineuse des denrées de première nécessité. Il y a cette tension entre pouvoir et opposition. Ces morts, ces destructions qu'il y a eues lors de la dernière manifestation interdite. Tout cela peut créer une certaine désaffection des populations», explique le brillant analyste qui estime que cela peut entraîner une certaine abstention.
Toutefois, il pense d'un autre côté que les enjeux tels qu'ils ont été problématisés, notamment par certaines officines de l'opposition en termes de combat préliminaire quant à écarter une troisième candidature du Président Macky Sall, peuvent pousser le peuple à jouer le rôle qui est le sien, c'est-à-dire l'arbitrage dans une démocratie. Et dans cette perspective, insiste-t-il, le peuple sénégalais a été toujours au rendez-vous. «Dans des situations très alambiquées, très ambiguës, très périlleuses, la démocratie sénégalaise a pu être sauvée par un peuple qui a montré à plusieurs égards sa maturité», souligne-t-il.
Revenant par ailleurs sur la valeur référendaire que certains hommes politiques veulent donner à ces joutes électorales, Monsieur Dione soutient : «Le lien n'est pas évident entre un troisième mandat et les Législatives. Mais si l'opposition arrive à avoir beaucoup de sièges à l'Assemblée nationale, elle va réfréner les velléités du Président Macky Sall».
«UNE ASSEMBLEE NATIONALE DE RUPTURE DEMANDE UNE RÉFORME EN PROFONDEUR»
Poursuivant ses arguments sur les enjeux de ces élections législatives, Pr Dione pense qu'une assemblée de rupture implique une réforme en profondeur de tout le système politique. «C'est une réforme structurelle. Et on ne peut, pour cela, dans une campagne électorale, donner des promesses qu'on aura du mal à appliquer. Si on n’a pas la majorité, on ne peut changer fondamentalement l'allocation du pouvoir entre l'exécutif et le législatif», renseigne-t-il.
A l’en croire, ces rapports sont déterminés par les enjeux majeurs du système politique sénégalais et c’est certainement cela qu'il faudra corriger. «On a eu des projets de réforme en profondeur comme les assises nationales. On a eu la Commission Nationale de Réformes des Institutions, mais on s'est rendu compte que ces projets de réformes structurelles sont plus des opportunités de conquête et de conservation du pouvoir qu'elles ne sont des volontés manifestes et décisives tendues vers le changement», se désole le chercheur.