LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DIT NON AU REPORT
Selon les sages, "la durée du mandat du président de la République ne peut être réduite ou allongée au gré des circonstances politiques" et "le mandat du président de la République ne peut être prorogé"
Le Conseil constitutionnel du Sénégal a rendu, ce 15 février 2024, une importante décision concernant le report de l'élection présidentielle initialement prévue le 25 février. Saisi par plusieurs députés de l'opposition et candidats à la présidentielle, le juge constitutionnel a invalidé la loi et le décret ayant entériné ce report.
Dans sa décision n°1/C/2024, le Conseil constitutionnel rappelle d'abord le contexte des saisines. Plusieurs requêtes avaient été déposées, contestant d'une part la loi n°4/2024 adoptée par l'Assemblée nationale le 5 février et portant dérogation à l'article 31 de la Constitution sur la durée du mandat présidentiel, et d'autre part le décret n°2024-106 du 3 février abrogeant le décret de convocation des électeurs.
S'agissant de la loi, le Conseil constitutionnel cite différents attendus de sa jurisprudence. Il rappelle notamment que "la durée du mandat du Président de la République ne peut être réduite ou allongée au gré des circonstances politiques" et que "le mandat du Président de la République ne peut être prorogé". Or, selon l'article premier de la loi attaquée, "le scrutin pour l'élection présidentielle (...) est décalé au 15 décembre 2024".
De même, l'article 2 dispose que "le Président de la République en exercice poursuit ses fonctions jusqu'à l'installation de son successeur", ce qui a pour effet de "proroger la durée du mandat du Président de la République au-delà des 5 ans" fixés aux articles 27 et 103 de la Constitution. La loi est donc contraire à la norme suprême.
S'agissant du décret, le Conseil relève qu'il est fondé sur la proposition de loi déclarée inconstitutionnelle. Il en découle que le décret "manque de base légale" et doit être annulé.
Par cette décision très motivée, citant abondamment les textes en cause et sa propre jurisprudence, le Conseil constitutionnel invalide fermement le report de l'élection présidentielle et confirme son statut de garant du respect de la Constitution.