LE DEBAT REFAIT SURFACE
La proposition du pouvoir en place relative au système de parrainage des candidats à la présidentielle, remet au goût du jour la question de l’intangibilité de certaines dispositions de la Constitution
Objet de controverse dans la sphère politique, la proposition du pouvoir en place relative au système de parrainage des candidats à la présidentielle, élargi aux formations et coalitions de partis politiques, remet au goût du jour la question de l’intangibilité de certaines dispositions de la Constitution. Une question qui a avait suscité moult réactions lors de l’adoption de la loi constitutionnelle n° 2016-10 du 5 avril 2016, par référendum.
Le système de parrainage des candidatures à la présidentielle élargi aux partis et coalitions de partis politiques, continue de faire couler beaucoup d’encre et de salive. Au-delà du débat politique suscité par la question, avec une opposition et des non-alignés extrêmement opposés à la proposition du pôle de la mouvance présidentielle, ledit système atterrit dans le domaine juridique.
Si certains soutiennent l’impossibilité de toucher au mode d’élection du président de la République, en vertu de «l’intangibilité des dispositions relatives au mode d’élection» du chef de l’Etat, telle que stipulé dans la loi constitutionnelle n° 2016-10 du 5 avril 2016 d’autres par contre, estiment que cette modification de la Constitution ne touche aucunement le mode d’élection du président, mais plutôt le mode de candidature. Ce qui rappelle le tollé soulevé par cette question de verrouillage de certains aspects de la Constitution modifiée en 2016.
En effet, l’on se souvient de la position des détracteurs du référendum de mars 2016. Certains ont ainsi dénoncé l’intangibilité des dispositions relatives au mode d’élection, à la durée et au nombre de mandats consécutifs du président de la République. Pour eux, cela voulait dire que ces dispositions ne pourraient plus être révisées. Ce qui avait poussé l’ancien ministre d’Abdoulaye Wade, Amadou Tidiane Wone à se poser la question suivante : «de quel droit pose-t-on ainsi un verrou définitif sur les choix des générations futures ?». Pour lui, , «c’est une insulte à leur intelligence et à leur capacité d’innover». M. Wone qui se défend contre ceux qui avancent la récurrence des modifications constitutionnelles comme raison soutient que : «cette notion d’intangibilité est une fausse solution à un vrai problème, plus profond : le manque de maturité des dirigeants politiques». Ce verrou posé par le chef de l’Etat, Macky Sall, est considéré par certains comme un piège. Pour eux, le mode de scrutin, notamment le suffrage direct et le scrutin majoritaire, favoriserait le régime présidentialiste. Donc, pour eux, cette nouvelle constitution écarte définitivement le débat sur le régime parlementaire, comme alternative au système politique actuel agité par les Assises nationales.
Des arguments balayés à l’époque par les souteneurs de la réforme du président Macky Sall. Pour eux, ladite question méritait d’être posée, car depuis 1960, la durée du mandat présidentiel a déjà fait l’objet de cinq modifications constitutionnelles. Soit quasiment une modification tous les dix ans. Aussi, cette disposition aura-t-elle le mérite de stopper ces innombrables modifications, dès lors que le mode d’élection, la durée et le nombre de mandats consécutifs du président de la République demeureront inchangés en tout lieu et en tout temps. Ce qui ne remettrait plus, à leur avis, les différents débats soulevés sur les troisièmes mandats au Sénégal et les problèmes qui s’en suivent. Il faut cependant noter que cela n’a pour autant pas clos le débat sur une éventuelle troisième candidature du président Macky Sall, si toutefois il parvenait à être réélu en 2019.
CE QUE DIT LA LOI CONSTITUTIONNELLE N°2016-10 DU 5 AVRIL 2016
«Article 103. – L’initiative de la révision de la Constitution appartient concurremment au Président de la République et aux députés. Le Premier ministre peut proposer au président de la République une révision de la Constitution.
Le projet ou la proposition de révision de la Constitution est adopté par l’Assemblée nationale selon la procédure prévue à l’article 71 de la présente Constitution. La révision est définitive après avoir été approuvée par référendum. Toutefois, le projet ou la proposition n’est pas présenté au référendum lorsque le Président de la République décide de le soumettre à l’Assemblée nationale.
Dans ce cas, le projet ou la proposition n’est approuvé que s’il réunit la majorité des trois cinquième (3/5) des suffrages exprimés. Les articles 65 et 77 de la présente Constitution ne sont pas applicables aux lois constitutionnelles.
La forme républicaine de l’Etat, le mode d’élection, la durée et le nombre de mandats consécutifs du Président de la République ne peuvent faire l’objet de révision.
L’alinéa 7 du présent article ne peut être l’objet de révision ».