LES DÉPUTÉS DE L’OPPOSITION CHAHUTENT LES TRAVAUX
Revendiquant la reconnaissance de leur groupe parlementaire

Des cris, des insultes, des chahuts. Pour son premier passage de l’année à l’Assemblée nationale hier, le gouvernement a eu droit à une séance mouvementée. En effet, les députés du Pds et de ses alliés ont longuement perturbé la séance jusqu’à indisposer l’assistance. A l’arrivée, c’est Amath Suzanne Camara qui a perdu ses nerfs en insultant de mère le député Me El Hadji Diouf qui faisait partie des contestataires.
La solennité de la salle plénière de l’Assemblée nationale a été mise à dure épreuve hier lors du passage du gouvernement dans le cadre de la rubrique «Questions d’actualité». Courant toujours après la reconnaissance de son groupe parlementaire, des députés n’ont trouvé mieux que de perturber une bonne partie de la séance. Il est 17 heures lorsque Moustapha Niasse se présente au perchoir.
Après avoir défini le protocole, il ouvre la séance pour donner la parole à son camarade de parti, le député Mohamed Khoureychi Niasse. Il est coupé par la députée libérale Aïda Mbodj : «M. le président, je voudrais poser une question.» La réponse de Niasse est sans équivoque : «Non, le Règlement intérieur ne vous le permet pas. Je suis désolé.»
Et comme s’ils se sont passé le mot, Me El Hadji Diouf, Lamine Thiam, Mamadou Diop Decroix, Thierno Bocoum, arborant tous des foulards rouges, entrent dans la danse.
Tous debout, ils vocifèrent à haute voix. «Non à une Assemblée clandestine ! Nous avons des questions ! Non au recul de la démocratie, Halte au parti unique !», hurlent-ils sous le regard impuissant de l’assistance.
Ne se sentant nullement concerné, Modou Diagne Fada discute avec Fatou Thiam. Les questions que devaient poser le député de Benno bokk yaakaar, Ibrahima Baba Sall sont confondues par les complaintes des opposants. L’atmosphère est électrique. Le spectacle indescriptible. Le Premier ministre Mahammad Boun Abdallah Dionne en simple spectateur, comme ses ministres.
Amath Suzanne Camara insulte Me El Hadji Diouf de mère
Au sein de la majorité, le spectacle indispose. La députée Apé ristes de Mbour, Sira Ndiaye, bouillonnant de colère, apostrophe Me El Hadji Diouf : «Taisez-vous !» Son camarade de parti, Seydina Fall dit Boughazelli se lève et lance quelques propos désobligeants à l’endroit des plaignants. Jouant les diplomates, Abdou Mbow quitte son siège pour ordonner au député de Guédiéwaye de se calmer et de laisser les opposants se plaindre.
Pendant 5 minutes, ce sont les cris de Me El Hadji Diouf et Cie qui retentissent. Dans la tribune réservée au public, Amath Suzanne Camara ne peut plus se contrôler. Il ne se fait pas prier pour insulter de mère Me El Hadji Diouf. Devant le gouvernement. Incroyable !
Le coordonnateur adjoint du Réseau des enseignants de l’Apr est vite maîtrisé et expulsé de la salle. C’est l’indignation totale dans la salle. «On comprend votre combat. Mais chaque chose en son temps», calme le Premier ministre.
Finalement, après une vingtaine de minutes passées à perturber, les opposants vont quitter les lieux. Et la séance peut reprendre avec des questions-réponses au Premier ministre.
Moustapha Niasse, président de l’Assemblée nationale «Je pouvais les mettre dehors»
«Il faut sans doute avec sincérité et hauteur regretter les perturbations constatées dans cette Hémicycle au début des débats. Je ne vais pas verser dans la polémique. Je tiens à redire, et de la manière la plus solennelle, que ce genre de comportement ne permettra jamais à leurs auteurs de bloquer ni le fonctionnement ni les travaux de l’Assemblée nationale. Ils en seront toujours totalement incapables.
Ce genre de manifestation ne servira jamais à rien. Je dois dire que l’article 53 du Règlement intérieur, en ses alinéas 2 et 3, ouvre sans aucune ambigüité au président de l’Assemblée nationale, séance tenante, la possibilité de «faire expulser de la salle de séance toute personne qui trouble l’ordre».
Je n’ai pas appliqué la loi par sagesse. Je rappelle que ni les vociférations ni les imprécations, ni les comportements de sycophantes zélés ne pourront jamais perturber les travaux de l’Assemblée nationale.»
Me Aïssata Tall Sall, députée Ps «Cela n’honore ni les députés ni l’Assemblée nationale»
«Ce qui s’est passé à l’Assemblée nationale n’honore pas les députés et cette institution. Je ne voudrais pas situer les responsabilités parce qu’il s’agit de revendications politiques. Ont-ils raison ou tort ?
Je pense que, quelle que soit la situation dans laquelle nous députés, nous nous trouvons, cette Assemblée nationale mérité de notre part beaucoup plus de dignité, de hauteur et de grandeur à l’image du Peuple sénégalais. On doit revenir à une maturité politique.
L’Assemblée nationale est le siège du débat politique par excellence. Je pense que nos amis collègues du Pds doivent encore mieux discuter avec l’institution parlementaire.»
Modou Diagne Fada, président du groupe des Libéraux et démocrates «C’est une opposition qui se bat pour un poste de groupe parlementaire»
«Un combat pour un idéal démocratique, o1n le mène de façon plus responsable. Je leur lance un appel pour qu’ils reviennent à de meilleurs sentiments. Ils ont été élus par les Sénégalais pour leur représenter dignement à l’Assemblée nationale et non pour se crêper les chignons. Aujourd’hui, cette opposition se bat pour un poste de groupe parlementaire. Si c’est ce poste qui doit mobiliser toute l’opposition, c’est regrettable.»