LES DEPUTES MAMADOU NIANG ET MASSATA SAMB RISQUENT LA RÉVOCATION
Si le tribunal qui a mis en délibéré sa décision au 26 décembre prochain, statue dans le sens des deux ans de prison requis par le parquet, les deux parlementaires vont tout simplement perdre leur poste à l’Assemblée nationale
Les députés Mamadou Niang et Massata Samb, membres du groupe parlementaire Yewwi askan wi, risquent la révocation. Alors qu’ils étaient traduits devant le tribunal des flagrants délits hier, lundi 19 décembre, dans l’affaire Amy Ndiaye Gniby, le ministère public a requis deux ans de prison ferme contre eux tandis que la partie civile demande 500 millions en guise de dommages et intérêts.
Rebondissement dans l’affaire de l’agression de la députée de la majorité au pouvoir, Amy Ndiaye Gniby, par ses collègues de l’opposition Mamadou Niang et Massata Samb. Traduits hier, lundi 19 décembre devant la barre du tribunal des flagrants délits de Dakar, les deux parlementaires encourent une peine d’emprisonnement de deux ans ferme assortie de 500 millions en guise de dommages et intérêts à payer à la partie civile.
Si le tribunal qui a mis en délibéré sa décision au 26 décembre prochain statue dans le sens de cette peine requise par le parquet, les deux parlementaires vont tout simplement perdre leur poste à l’Assemblée nationale. Dans son réquisitoire lors de l’audience tenue à la salle n°4 du Palais de justice Lat Dior de Dakar, en présence de plusieurs députés du groupe parlementaire Yewwi askan wi, la représentante du ministère public a requis une peine de 2 ans de prison ferme contre les députés Massata Samb et Mamadou Niang.
En effet selon elle, « les éléments de l’infraction sont constants et l’excuse de provocation ne peut être convoquée » par les prévenus dans cette affaire. Sous ce rapport, elle a invité le tribunal à s’inscrire dans la dynamique du législateur sénégalais qui a protégé la femme dans le Code pénal, en déclarant coupables les prévenus de toutes les infractions retenues contre eux. « L’infraction de coups et blessures est constante, les images de ce qui s’est passé sont là. On y voit clairement la brutalité exercée par les prévenus contre une femme sans défense. La victime a aussi produit un certificat médical avec une indisponibilité de 21 jours. Nous avons également un rapport médical signé par un médecin militaire qui indique que la dame est enceinte et que l’évolution de la grossesse pouvait être compromise à cause du coup qu’elle a reçu au niveau du bas ventre », a-t-elle expliqué.
Premiers à prendre la parole pour faire leur plaidoyer, les avocats de la partie civile ont déploré l’attitude des prévenus qui ont nié les faits pour lesquels ils sont traduits devant le tribunal des flagrants délits. Tirant ainsi les conséquences de cette situation, ils ont demandé une application rigoureuse de la loi afin que de pareils incidents ne se reproduisent plus à l’Assemblée nationale.
Devant la barre, Me Soumare, un des avocats de la partie civile, a invité le tribunal à prendre en compte dans sa décision le sort de l’enfant que porte Amy Ndiaye Gniby. « Si demain, il nait avec des séquelles causées par le coup que sa maman a reçu, à qui il va réclamer réparation ? », a lancé la robe noire aux membres de la Cour en fustigeant le fait que les prévenus n’ont pas fait amende devant le tribunal du tort qu’ils ont causé à sa cliente. « On ne va pas l’Assemblée nationale pour défendre son marabout mais le peuple. Il faut que le tribunal sévisse pour ramener la raison à l’Assemblée nationale qui doit être un lieu de dialogue. Force doit rester à la loi », a plaidé Me Baboucar Cissé, avocat d’Amy Ndiaye Gniby en réclamant la rondelette somme de 500 millions en guise de dommage et intérêts.
LA DÉFENSE PLAIDE LE RENVOI DE TOUTES LES CHARGES
Derniers à prendre la parole à la suite du Parquet, les avocats de la défense des deux parlementaires membres du Parti de l’unité et du Rassemblement (Pur) fondé par Serigne Moustapha Sy, guide moral du Dahira Moustarchidine Wal Moustarchidate, ont plaidé le renvoi de leurs clients de toutes les charges. Dans leur plaidoirie, ils ont déploré le traitement à géométrie variable dont leurs clients ont fait l’objet dans cette affaire. En effet, selon eux, tout comme Amy Ndiaye Gniby, leurs clients avaient également enregistré des blessures le jour des faits et ont produit des certificats médicaux dressés par des médecins
Seulement, déplorent-ils, ces documents n’ont pas été traités avec la même rigueur que celui de Amy Ndiaye signé par un médecin militaire qui a été pourtant formé à la Faculté de médecine de Dakar au même titre que ceux qui ont dressé le certificat médical de leurs clients.
Revenant sur les faits, ils ont accusé Amy Ndiaye d’être la principale cause des événements survenus le 2 décembre dernier. « Amy Ndiaye Gniby a foulé au pied les dispositions du règlement intérieur de l’Assemblée qui établissent que le débat à l’hémicycle doit être courtois. Elle s’est permis de s’attaquer à la foi de milliers de Sénégalais. Il n’y a pas plus grande provocation que cela. On ne doit pas s’attaquer à la foi des gens. Si le Sénégal est épargné des troubles, c’est grâce à son socle bâti sur les dignitaires religieuses », a martelé Me Adama Fall qui dit ne pas être surpris par le montant de 500 millions réclamé par la partie civile qui veut, selon lui, transformer le tribunal en pari foot ou jeu de loterie pour se faire de l’argent facile. « La peine de 2 ans ferme requis par le procureur n’est pas fondé. Puisque dans cette affaire, c’est la parole de la partie civile contre celle des clients. Et son certificat médical contre le nôtre. En plus, on ne peut pas minimiser l’excuse de la provocation dans cette affaire. Car, Amy Ndiaye Gniby a exactement tenu des propos déplacés à l’endroit de Serigne Moustapha Sy », a-t-il encore martelé.
LES PRÉVENUS NIENT EN BLOC LES ACCUSATIONS
Auparavant, interrogés par le président du tribunal des flagrants délits sur les accusations de coups et blessures volontaires et menaces de mort sur leur collègue Ami Ndiaye qui leur sont reprochées Mamadou Niang et Massata Samb ont nié en bloc. Premier à se soumettre aux questions du magistrat, Massata Samb a indiqué qu’il n’a pas donné une gifle à la dame comme cela est raconté. « Je suis descendu pour arracher son foulard mais je ne l’ai pas giflé. Je n’avais pas pris la décision de la taper parce que c’est une femme », a expliqué Massata Samb qui insiste. « Je ne l’ai pas touchée, je ne l’ai pas frappée, je n’ai jamais eu l’intention de la frapper. J’ai seulement levé ma main pour saisir son foulard. Elle a même esquivé. J’ai fait des arts martiaux, si j’avais l’intention de la frapper, elle ne serait pas debout. Elle était munie d’une chaise qui est une arme. C’est un de ses collègues qui le lui a donnée et c’est en voyant cette scène que Mamadou Niang est venu pour séparer la bagarre ».
Prenant la parole à son tour, Mamadou Niang, à la question du président du tribunal : « pourquoi vous lui avez donné un coup de pied ? » rétorquera : « Mon pied l’a accidentellement atteinte. Je ne lui ai pas donné un coup de pied. Nous sommes juste entrés en collision lorsque je suis allé les séparer. C’est en voulant intercepter la chaise qu’elle a lancé que mon pied s’est levé accidentellement et elle est venue se heurter à mon pied. Il y avait aucune intention de donner un coup de pied. D’ailleurs, après ce contact, on s’est tous les deux retrouvés au sol. Donc, je n’avais pas l’intention de lui administrer un coup de pied. S’il n’y avait pas cette chaise lancée que j’ai essayé d’intercepter, il n’y aurait certainement pas cet incident ».