LES RAISONS DE LA GRANDE DÉCISION
Création d'un parti politique par Abdoul Mbaye
Ce samedi, le Landerneau politique sénégalais va s'enrichir d'une nouvelle formation. Son géniteur est l'ancien Premier ministre. Hésitant, il y a quelques mois, Abdoul Mbaye a finalement décidé de faire le grand plongeon dans la très agitée et insaisissable mare politique et solliciter le suffrage des Sénégalais aux législatives de 2017. Qu'est-ce qui a décidé le premier ex-chef du gouvernement de la deuxième alternance politique ? A-t-il réussi à lever les deux obstacles qui se dressaient sur son chemin ? C'est-à-dire les moyens et la peur de faire un score ridicule.
Les responsables politiques qui vont aller à la conquête des 150 sièges de l'Assemblée nationale qui seront mis en jeu l'année prochaine verront la liste de leurs adversaires s'allonger. D'autant que l'ancien Premier ministre qui va lancer, après demain samedi, son parti politique, entend se peser dès les législatives de 2017. Preuve que l'annonce de son entrée dans l'arène politique n'est pas chimérique, Abdoul Mbaye a publié hier sur sa page Facebook sa démission de la présidence du conseil d'administration du Club Travail et Vertu (CTV) qu'il avait créé en octobre 2014.
Dans son post, il renseigne : "j'ai annoncé à mes amis lors de la réunion du conseil d'administration tenue le 26 avril 2016 ma décision de démissionner de mon poste de président du conseil d'administration du Club. Je leur renouvelle ici mes remerciements pour la confiance qu'ils m'ont accordée".
Cela explique-t-il cela ? Tout porte à le croire. Car le Club se voulant apolitique, ce serait incongru qu'il continue à le diriger cumulativement avec ses nouvelles charges de leader politique qu'il va étrenner dans deux jours. A 63 ans, ce diplômé de l'école des Hautes études commerciales de Paris (HEC-Paris) de la Sorbonne, qui a fait toute sa riche carrière dans le milieu bancaire (Bceao, Biao, Cbao, Bst, Mastercard) où il a occupé des fonctions de premier rang, va donc opérer une mue dans sa trajectoire en plongeant dans la politique. Il marche ainsi sur les traces d'un Alassane Dramane Ouattara (sous les ordres de qui il a travaillé de 1976 jusqu'au début des années 80 à la Bceao), de Yayi Boni qui a dirigé la Boad avant de présider aux destinées du Bénin.
Pourtant, dit-on, le prédécesseur de Mimi Touré à la Primature faisait souvent part à son entourage de sa circonspection par rapport à la chose politique. S'il se voulait prudent, c'est parce que la politique demande beaucoup de moyens et il ne voulait pas y mettre ses billes, de peur de se faire ruiner. Le deuxième obstacle qui le retenait, dit-on c'est son appréhension à se retrouver, au terme d'une élection présidentielle, avec un score ridicule, à l'image de Ibrahima Fall qui, pourtant, se considérait comme la véritable alternative au régime controversé de Me Abdoulaye Wade. A-t-il résolu ces deux équations ? "That is the question", comme disent les British Sur le plan financier, ses proches confient qu'il a reçu la promesse de soutien de grands groupes internationaux. Et pour se faire une petite idée de sa représentativité, l'aîné de la fratrie Mbaye va participer aux prochaines législatives. S'il parvient à décrocher un groupe parlementaire à l'Assemblée nationale, il aura toutes les cartes en mains pour faire face à Macky Sall en 2019.
Une belle façon, d'après certaines confidences, de prendre sa revanche sur le locataire du Palais de l'avenue Léopold Sédar Senghor à qui il n'aurait pas pardonné la décision de le démettre de ses fonctions de Premier ministre. S'étant retrouvé premier chef du gouvernement de l'ère Macky Sall, à la place de son jeune frère Cheikh Tidiane Mbaye (ancien directeur général de Sonatel) qui était pressenti par le successeur de Me Wade, Abdoul Mbaye ne digèrerait toujours pas les circonstances dans lesquelles il a été limogé. Même s'il s'attendait à être remplacé un jour à la Primature, le fils de Kéba Mbaye a été surpris par sa défenestration survenue un dimanche. C'est pourquoi, certains estiment qu'il cherche à laver l'affront que lui a fait subir celui qui fut son patron pendant dix-sept mois. Réussira-t-il son coup ? Wait and see !