LES VRAIES RAISONS DE LA VOLTE-FACE DE MACKY SALL
Contrairement à ce qu’il a dit lors de son adresse à la nation du 3 juillet, le président de la République a bel et bien eu l’intention de briguer un troisième mandat
(SenePlus) - Dans son édition du 19 juillet 2023, le quotidien malien Le Pélican publie un article détaillé remettant en question les déclarations de Macky Sall, président sénégalais, concernant sa volonté de briguer un troisième mandat. L'article souligne que le président sénégalais a nourri l'espoir de se maintenir au pouvoir jusqu'au bout, malgré ses dénégations publiques. Les informations révèlent que des juristes français ont été consultés et ont donné un avis favorable à la candidature de Macky Sall. Des délégations gouvernementales ont ensuite été envoyées dans différentes capitales européennes pour convaincre les décideurs et les médias de la légalité de cette candidature controversée.
L'omerta imposée par Macky Sall sur le sujet du troisième mandat est également soulignée. Tous ses proches qui ont exprimé leur ambition de lui succéder ont été écartés et ceux qui ont osé faire des commentaires sur sa candidature ou sa non-candidature ont subi des représailles. Malgré les multiples sollicitations d'Emmanuel Macron et d'autres dirigeants africains, Macky Sall n'a jamais exclu la possibilité de se représenter, invoquant la stabilité du pays comme condition sine qua non. Cependant, ces arguments n'ont pas convaincu.
Le soutien de l'armée, considéré comme essentiel pour la réussite d'une telle entreprise, s'est avéré incertain. Bien que l'armée de terre ait déployé quelques blindés dans les rues de Dakar, rien n'indiquait qu'elle était prête à aller plus loin. Des images de manifestants fraternisant avec les militaires et prenant des selfies près des engins ont suscité des inquiétudes, même au sein du pouvoir. Les informations provenant des rangs et des officiers supérieurs de l'armée ont également montré la fragilité du soutien militaire à une tentative de passage en force.
De plus, Macky Sall n'a pas réussi à convaincre les grands chefs religieux, qui jouent un rôle influent au Sénégal en tant que praticiens de l'islam confrérique. Une vidéo, opportunément diffusée par les opposants à un troisième mandat, montre le président sénégalais prêtant serment devant le khalife général des mourides lors du référendum constitutionnel de 2016, affirmant qu'il était à son deuxième et dernier mandat. Le non-respect de cet engagement auprès du khalife général a eu des conséquences politiques et sociales considérables, rendant la candidature de Macky Sall politiquement et socialement intenable.
L'article souligne également le rapport de forces défavorable auquel Macky Sall a dû faire face. Les partisans d'Ousmane Sonko, président du parti des Patriotes sénégalais pour le travail, l'éthique et la fraternité (PASTEF), ont réussi à étouffer les velléités du troisième mandat. Les affrontements entre les partisans de Sonko et les forces de l'ordre ont entraîné la mort d'au moins 23 personnes, selon Amnesty International. Les manifestations ont même pris la forme d'une insurrection populaire à Ziguinchor, la plus grande ville du nord du Sénégal, dont Sonko est le maire.
La diaspora sénégalaise a également joué un rôle important dans la reculade de Macky Sall. Des photos officielles du président jetées au sol dans les consulats et les ambassades du Sénégal à l'étranger ont ébranlé le pouvoir sénégalais. De plus, il y avait des risques d'agressions physiques contre des fonctionnaires sénégalais lors de leurs déplacements dans certaines capitales étrangères. Face à ces facteurs internes et externes, Macky Sall a finalement compris que le passage en force n'était pas une garantie pour diriger le pays en toute sérénité.
La décision de Macky Sall de ne pas se représenter a été accueillie avec soulagement dans de nombreuses capitales africaines et à travers le monde. Elle évite au Sénégal une grave crise politique dans une région déjà marquée par l'instabilité et les coups d'État militaires. Des personnalités telles qu'Emmanuel Macron et Barack Obama ont joué un rôle dans les efforts pour convaincre Macky Sall de renoncer à un troisième mandat, bien que le président sénégalais n'ait pris aucun engagement ferme. Maintenant, il devra se concentrer sur la recherche d'un successeur au sein de son propre parti et préparer sa vie après le pouvoir.
(Sources : Le Pélican, 19 juillet 2023)