L'OFFENSE AU PRÉSIDENT DE NOUVEAU SOUS LES FEUX
L'interpellation d’Amath Suzanne Camara relance le débat sur cette disposition controversée. Héritage de l'ère coloniale, ce délit est régulièrement brandi pour réprimer la dissidence selon les ONG. Cette loi divise jusque dans les rangs du Pastef
(SenePlus) - L'arrestation d'Amath Suzanne Camara, un cadre de l'ex-parti au pouvoir l'Alliance pour la République (APR), a relancé les débats sur le délit d'offense au chef de l'Etat. Comme le rapporte RFI, M. Camara a été placé en garde à vue le 24 juillet après avoir tenu des propos critiques envers le président Bassirou Diomaye Faye sur la chaîne Seneweb.
Lors de cette interview en wolof le 23 juillet, il avait affirmé que "le président Faye et son Premier ministre Ousmane Sonko ont menti pour accéder au pouvoir et qu'ils continuent de mentir". Dès le lendemain, le procureur s'est saisi de l'affaire, conduisant à l'interpellation de M. Camara qui risque désormais entre 3 mois et 5 ans de prison ferme pour ce délit.
Cette nouvelle arrestation est la troisième du genre depuis l'arrivée au pouvoir du président Faye le 2 avril dernier. Elle soulève à nouveau les critiques contre cette loi controversée, régulièrement accusée de "servir à mettre des opposants en prison" comme l'écrit RFI.
Même au sein du parti présidentiel les Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l'éthique et la fraternité (Pastef), certaines voix jugent cette garde à vue "excessive". L'ONG Amnesty International rappelle qu'une des recommandations des récentes Assises nationales de la justice était justement "de supprimer les peines privatives de liberté pour offense à chef d'Etat".
"Cette loi a été régulièrement critiquée pour restreindre la liberté d'expression au Sénégal", dénonce un responsable d'Amnesty cité par RFI. "Une nouvelle fois, on constate qu'elle sert à réprimer les voix dissidentes plutôt qu'à protéger la fonction présidentielle."
Avec cette troisième arrestation en quelques mois, la pression monte sur le président Faye pour abroger ou réformer en profondeur ce délit d'un autre âge, hérité de la période coloniale et souvent brandi comme un outil de musellement des opposants.