MACKY FIXE LA DATE
"Il y aura bien en 2016 un référendum ; puis un scrutin présidentiel au début de 2017" - Grâce pour Karim : "Pas à l’ordre du jour" - L’affaire Lamine Diack : "Je décèle une volonté de salir ma réputation"…
Macky Sall serait-il assuré de la victoire du "Oui" pour la réduction de son mandat de 7 ans à 5 ans lors du référendum dont "la date précise" sera annoncée "dans les prochains jours" ? En tout cas il annonce, formel, que la prochaine présidentielle se tiendra "au début de 2017". Pas en 2019.
Fin du suspense
La bronca de ses partisans hostiles à la réforme n’y fera rien. Macky Sall n’a pas l’intention d’aller au bout de son septennat. Il assure qu’il respectera son engagement de convertir son mandat en quinquennat. Avec, espère-t-il, la bénédiction du peuple. "Il y aura bien en 2016 un référendum constitutionnel, dont je donnerai la date précise dans les prochains jours ; puis un scrutin présidentiel au début de 2017", tranche le chef de l’État dans un entretien accordé au magazine français L’Express.
C’est la première fois que Macky Sall se montre aussi catégorique à propos de la réduction de son mandat et de la date de la remise en compétition de son fauteuil.
Entre les deux tours de la présidentielle de 2012, qu’il remportera devant son prédécesseur, Abdoulaye Wade, il avait promis de rogner deux ans sur son mandat. Une promesse convertie en engagement mainte fois réitéré après son accession au pouvoir. Aboutissant à son inscription dans son projet de réforme constitutionnelle rendu public ces derniers jours et comportant 15 points.
Dans ce sens, le président de la République a recueilli l’avis du président de l’Assemblée nationale, Moustapha Niasse, en attendant celui du conseil constitutionnel. Mais depuis la publication de l’avant-projet de réforme, l’avis des cinq sages est scruté avec passion. Sera-t-il conforme ou simplement consultatif ? Le débat fait rage.
En annonçant formellement que la prochaine présidentielle aura lieu au début de l’an prochain, Macky Sall semble couper l’herbe sous les pieds de ceux qui le soupçonnent d’entretenir le flou dans le dessein de sonder l’opinion en vue d’un éventuel manquement à sa parole. À l’en croire rien ne l’empêchera de soumettre au peuple ses réformes, notamment la réduction de son mandat. Et sur ce point, il paraît persuadé que le "oui" l'emportera.
Mais l’important est ailleurs, selon le chef de l’État. "Ce qui importe, c’est moins le calendrier que l’ampleur de la réforme visant à renforcer la démocratie sénégalaise et à moderniser nos institutions, assure-t-il. Elle porte certes sur la durée du mandat, mais aussi sur le plafonnement à 75 ans de l’âge des candidats. De même, je tiens à élargir les pouvoirs du Conseil constitutionnel, dont deux des membres seront désignés sur proposition du président de l’Assemblée nationale, prérogative réservée jusqu’alors au chef de l’Etat. Je veux donner en outre aux députés une nouvelle vocation : en plus de légiférer et de contrôler l’action du gouvernement, ils évalueront les politiques publiques."
Karim Wade, Lamine Diack…
Une prérogative qu'il n'entend pas lâcher par contre, celle de gracier des prisonniers. Condamné à six ans de prison dans le cadre de la traque des biens mal acquis, Karim Wade n’est pas près d’en profiter. "La question n’est pas encore à l’ordre du jour", coupe sèchement Macky Sall à la suite du journaliste de L’Express qui lui demandait si l’ancien ministre d’État pourrait être gracié.
Embrayant sur l’affaire du supposé financement de l’opposition en 2012 par l’argent de la corruption, le chef de l’État assure : "Ma campagne ne saurait être concernée sous quelque forme que ce soit par un financement occulte, lié à Lamine Diack ou à tout autre personnage. En 2008, lorsque j’ai fondé l’APR, je suis reparti de zéro. J’ai sillonné ce pays durant trois ans et demi sans moyens substantiels."
Il y a quelques semaines, le journal Le Monde avait révélé le contenus de procès verbaux d’audition de Lamine Diack, l’ancien président de l’IAAF, mis en examen pour corruption passive, blanchiment aggravé et corruption, dans le cadre du scandale de dopage qui secoue l’athlétisme. Dans un article publié sur son site, le quotidien français affirmait que Diack avait déclaré aux enquêteurs avoir financé la campagne de Macky Sall lors de la présidentielle de 2012.
Une information démentie du côté de la Présidence et de l’état-major de l’APR. Plus tard, invoquant une erreur, Le Monde rétropédala en assurant que l’ancien patron de l’athlétisme n’avait jamais tenu de telles accusations contre le président de la République. Qu’il a juste déclaré avoir financé l’opposition à Abdoulaye Wade et la société civile.
Malgré tout, le chef de l’État est persuadé que cette affaire cache mal des intentions fumeuses. Il accuse, sans citer de noms : "Je décèle chez ceux qui tentent d’exploiter cette affaire une volonté de salir à tout prix ma réputation. Ils ont recruté à Paris une agence de communication qui passe son temps à dénigrer le pouvoir sénégalais par le biais de mensonges fabriqués de toutes pièces."
"Naufrage de la Libye"
Évoquant la menace terroriste qui plane sur la sous-région avec les attentats de Bamako et de Ouagadougou, Macky Sall indique que le Sénégal est sur ses gardes. Cependant, il souligne que les différents pays concernés doivent affiner leurs moyens de défense et privilégier la coopération.
Il dit : "Aucun pays au monde, Sénégal compris, n’est à l’abri. Sans entrer dans les détails, sachez que tout ce qui doit être mis en œuvre pour combattre ce fléau l’a été et le sera. S’agissant de la dimension préventive, le renseignement humain apparaît capital, plus encore que la surveillance technologique. Or il a souvent fait défaut. De plus, nous devons adapter rapidement nos armées à une menace de nature asymétrique à laquelle elles ne sont pas préparées. Dans l’espace Cedeao, on observe la mise en place de forces spéciales, une mobilité accrue et des échanges d’informations entre les polices frontalières."
De l’avis du président de la République, si l’Afrique est si exposée au jihadisme, c’est surtout à cause du "naufrage de la Libye". "Des gens sont venus régler un problème et en ont créé mille, avant de nous abandonner", martèle-t-il. Et pour ne rien n’arranger, souligne-t-il, "le Sénégal n’a pas été associé, en février 2014, à la création du G5 du Sahel, outil de coordination réunissant la Mauritanie, le Mali, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad...".
"C’est une incohérence, assène Macky Sall. On ne peut pas engager la lutte contre le terrorisme au Sahel sans le Sénégal. C’est d’ailleurs à Dakar que les Nations unies ont installé leur dispositif en la matière. Mais nous ne nous battons pas pour des fauteuils. L’essentiel, c’est que nous apportions notre contribution au G5, fût-ce en qualité d’observateur."