MACKY JETTE L’EPONGE ET REND SA CARTE BLANCHE
Le président de la République — et chef suprême de l’Alliance Pour la République (APR) en même temps que de la coalition Benno Bokk Yaakar (BBY) — a donc renoncé à choisir le candidat de la majorité à la prochaine présidentielle
L’homme à la carte blanche jette l’éponge ! Le président de la République — et chef suprême de l’Alliance Pour la République (APR) en même temps que de la coalition Benno Bokk Yaakar (BBY) — a donc renoncé à choisir le candidat de la majorité à la prochaine présidentielle.
Autrement dit, son successeur potentiel si les Sénégalais votaient majoritairement en faveur de ce dauphin finalement pas choisi. Il les avait pourtant habitués à choisir à leur place leurs candidats aux différentes élections qu’il s’agisse des locales (jusqu’au maire de la plus petite commune du fin fond du Sénégal) aux législatives en passant par celles au Haut conseil des collectivités territoriales — mais là c’est en réalité lui qui désignait même s’il y avait un semblant d’élection pour choisir les autres membres non nommés. Il y avait un scrutin en vue et donc d’inévitables tiraillements au sein du parti présidentiel et de la grande coalition Benno ? On donnait carte blanche au super stratège politique Macky Sall pour qu’il fasse les arbitrages et confectionne lui-même les listes ! La mère des batailles, c’est-à-dire la prochaine élection présidentielle à laquelle il n’est pas candidat n’a pas échappé à cette règle de l’effacement et de la soumission au Chef qui saurait faire le meilleur choix pour la majorité. Va-s-y donc pour la carte blanche au Chef présenté comme aussi infaillible que le Pape ! Puis les ouailles et les candidats, nombreux à se bousculer au portillon, ont attendu, attendu que la fumée blanche sorte du conclave du Chef à la carte immaculée. Hélas, ils n’ont pas eu la joie de s’écrier « habeamus papam » (nous avons un Pape !), pardon « habeamus candidatam » ! Qu’on nous pardonne le néologisme. Hier, donc, le président de la République et chef du parti-Etat a été obligé d’avouer à l’état-major de sa majorité et aussi à l’armée mexicaine des candidats à la candidature qu’il renonçait à désigner qui que ce soit pour porter les couleurs de l’APR-Benno à la présidentielle. En lieu et place, il proposait des primaires et que le meilleur gagne. Des primaires dont le corps électoral serait constitué parles élus aussi bien nationaux que locaux, les membres du Gouvernement, les directeurs généraux de sociétés, les dirigeants du parti et de la majorité…bref la nomenklatura de la camarilla qui dirige le pays depuis 2012 !
Après avoir fait auditionner tous les candidats à la candidature par le dinosaure Moustapha Niasse, ès qualité de Haut représentant du président de la République, c’est-à-dire de lui, Macky Sall avait donc convoqué hier tout ce beau monde pour, disait-on, rendre son oracle. Ils étaient venus, ils étaient tous là d’Amadou Ba, le Premier ministre, et son éternel rival si ce n’est son ennemi juré Abdoulaye Daouda Diallo, président du Conseil économique, social et environnemental (Cese), qui sont les deux plus sérieux prétendants, aux tocards Abdoulaye Diouf Sarr, Moustapha Diop sans oublier les jamais-gagnant (comme on dit chez les turfistes) Abdou Mame Diop et Mansour Faye en passant par Mame Boye Diao, le truculent Me El Hadj Diouf, la dame Mbacké et d’autres Pieds-Nickelés encore. Avaient été conviés aussi des dirigeants de partis de la majorité comme Aminata Mbengue Ndiaye (PS), Samba Sy (PIT), Moustapha Niasse (AFP, il portait donc une double casquette) etc. Le papy de l’AFP était affublé d’Aymérou Gningue, ancien président du groupe parlementaire APR à l’Assemblée nationale, et aussi d’Abdou Fall, membre de la majorité présidentielle et ancien leader de la CDS.
Le Président propose des primaires
Pour l’APR, le Président s’était fait entourer d’Augustin Tine,son directeur de cabinet politique, Mahmouth Saleh, son ancien directeur de cabinet, Mor Ngom… Convoqué lui aussi à cette réunion, Makhtar Cissé, autre ancien directeur de cabinet du Président, a argué de son statut d’Inspecteur général d’Etat qui ne lui permet pas de faire de la politique pour demander au président de la République l’autorisation de se retirer.
Après avoir jeté l’éponge, donc, on l’a dit, le Président a proposé des primaires. Après quoi, il a ouvert les débats qui ont souvent volé bas et au cours desquels on a frôlé la confrontation physique plus d’une fois. Toujours est-il qu’à la fin, l’idée de primaires a été rejetée, les participants proposant l’adoption d’une charte de non-agression en 10 points que les candidats s’engageraient à respecter. Une charte censée favoriser le choix d’un candidat par consensus. Un consensus impossible, bien sûr tant les candidats sont nombreux. Pauvre Amadou Ba réduit à se bousculer avec des poids plume pour espérer décrocher l’investiture du Chef ! Et au cours de la réunion d’hier, contre toute attente, Mansour Faye, le beau-frère du Président, s’est porté lui aussi candidat. Il a été prié gentiment par le mari de sa sœur, Macky Sall, de retirer sa candidature. Commentaire d’un participant à cette rencontre surréaliste : « le choix qui nous est donné n’est pas très grand en réalité : il se réduit entre les candidats Haal Pulaar et ceux de la belle-famille du Président ! Ayant très mal pris la décision de ce dernier de ne pas se représenter, Mansour Faye et sa sœur veulent donc peser de tout leur poids sur la succession… » La belle-famille qui n’est pas loin de vouloir reprendre la carte blanche donnée au Président pour lui décerner en lieu et place un carton rouge !