MALICK GAKOU SE LÂCHE
Cena, report de la présidentielle, Fite, sort de Yewwi, le cas Sonko… Entretien à Yoff avec le patron du Grand parti et candidat au scrutin de février 2024
A Yoff, dans le somptueux immeuble qui abrite le siège de son «Grand parti», c’est un Malick Gakou en jean, chaussé de training, dans une chemise usée, qui enchaine réunions de travail et audiences en cette après-midi. Entouré de son staff dont Ahmed Aïdara, son directeur de campagne, et de Malamine Fall, un de ses intrépides défenseurs, le candidat déclaré à la Présidentielle tient, malgré un planning chargé, à se faire entendre sur les questions brûlantes de l’actualité. Et c’est parti pour un Entretien avec Bés bi, Itv et Iradio…
Comment expliquez-vous, à seulement trois mois de la Présidentielle, le peu d’engouement noté autour de la campagne de parrainage ?
On ne peut dire qu’il n’y a pas d’engouement. Et j’entends souvent les gens le dire dans la presse. Mais nous qui avons l’occasion de sillonner le pays sentons de l’engouement. Ce qu’il faut dire simplement, c’est que le code électoral sénégalais a changé. Puisqu’avant 2012, six mois avant l’élection, tout le monde pouvait savoir qui sont les candidats. Parce qu’il suffisait d’avoir 35 ans, la caution et un certain nombre de conditionnalités pour être candidat. Et à cette époque, les candidatures ne dépassaient pas 15 et elles sont retenues bien avant. Aujourd’hui, le Conseil constitutionnel a jusqu’au 20 janvier pour publier la liste officielle des candidats. Presqu’à 40 jours de l’élection. Mais aujourd’hui, il y a une floraison de candidats. Et évidement cela doit émousser l’enthousiasme des populations et des acteurs politiques. Mais pour ceux là qui sont sûrs d’être candidats, et qui se sont donnés les moyens comme moi, je suis persuadé que je serai candidat. Puisque je vais remplir haut la main les conditionnalités pour être candidat et matérialiser nos énormes ambitions pour le changement dans ce pays.
Les nouveaux membres de la Cena viennent d’être installés dans un climat de contestation autour de leur nomination. Êtes-vous rassuré par le processus électoral ?
Nous avions demandé au gouvernement de mettre en place un ministère en charge des élections, il a refusé. Nous avions demandé un bulletin unique aux élections, pour garantir la transparence du vote, il a refusé. Nous avions demandé que le ministre de l’Intérieur n’organise plus les élections, il a refusé. Il était question aussi de réviser le rôle de la Justice dans le processus électoral, le gouvernement a encore refusé. Et maintenant, à travers le président de la République, le gouvernement nomme les membres du Conseil constitutionnel, le ministre de l’Intérieur, les membres de la Cena. Il est donc juge et partie. Ce qui ne garantit pas les conditions d’une élection transparente, démocratique encore moins une élection inclusive. C’est la raison pour laquelle nous continuons à attirer l’attention de l’opinion nationale et internationale sur la nécessité d’avoir une élection inclusive et transparente au Sénégal. Et ce qui se passe ne nous rassure pas. On ne peut pas changer les membres de la Cena juste parce qu’ils devraient être changés il y a 30 mois, vous les laisser sur place jusqu’au moment où elle a donné injonction à la Dge de remettre les fiches de parrainage à Ousmane Sonko. Et sans changer le tiers des membres mais l’intégralité. C’est inadmissible ! Car cela peut biaiser le processus démocratique, le contrôle des élections. Et c’est pourquoi l’opposition et la societé civile l’ont dénoncé de manière vive
Pourtant, lors de la prestation de serment des membres de cette Cena, le président du Conseil constitutionnel a, dans son allocution, souligné que le système électoral sénégalais est fiable pour avoir garanti deux alternances démocratiques…
Il y a une différence entre le processus électoral et le vote des Sénégalais. C’est vrai que malgré les contestations, il y a eu des alternances au Sénégal. Mais nous cherchons à être un Etat démocratique. Et un Etat démocratique, c’est un Etat où, quand on tient des élections, deux heures après le scrutin, on donne les résultats. Et des résultats incontestables. Mais au Sénégal, ce n’est pas encore le cas. Toutes les élections sont contestées. Aujourd’hui d’ailleurs, la nomination des membres de la Cena constitue le lit de futures contestations de cette élection. Mais ceci étant dit, les populations vont aller voter. Et je suis persuadé que, cette fois aussi, quelles que soient les arguties que le pouvoir va utiliser, les Sénégalais vont sortir massivement et voter pour le changement puisque c’est la volonté des populations de créer la rupture et les réformes à travers lesquelles nous allons engager le changement de moteur d’un développement socio-économique.
Quelle est votre position sur l’idée agitée d’un report de la Présidentielle ?
Solliciter le report de l’élection présidentielle, c’est manquer de respect aux Sénégalais. Un report ne peut se faire d’ailleurs que par un changement de la Constitution. Et on ne peut pas, à quatre mois de l’élection, changer les règles du jeu. Le 3 avril, le Président Macky Sall doit passer le pouvoir pour avoir terminé son deuxième et dernier mandat. Un nouveau Président sera élu et je suis persuadé que je serai le Président qui va prêter serment devant le peuple sénégalais puisque j’ai un bon programme. Mon pedigree et mon cursus politique s’imposent par rapport à tous les autres candidats. Puis, je mettrai en place une politique de rupture transformationnelle à même de mettre le Sénégal sur orbite en Afrique et dans le monde.
Quelle lecture faites-vous de la situation actuelle de Sonko dont l’éligibilité reste toujours en suspens ?
C’est un citoyen comme tout le monde et il doit participer aux élections. Car tous les candidats qui remplissent les conditions doivent y participer. Et l’Etat doit tout mettre en œuvre pour que Ousmane Sonko participe à cette élection. Mais au-delà de l’Etat, nous-mêmes au sein de l’opposition, nous nous battons tous les jours pour cela. Puisque c’est aux Sénégalais de choisir librement qui doit être leur Président. C’est la raison pour laquelle nous militons pour des élections inclusives.
Justement, à cet effet, un nouveau front de l’opposition dont vous êtes membre vient d’être lancé. N’est-ce pas là un signe d’échec et de mise à mort de votre coalition, Yewwi askan wi ?
Il faut comprendre aussi l’évolution du processus démocratique au sein de l’opposition par la mise en place d’organes pour la transparence des élections. Vous vous souvenez du Frte (Ndlr : Front de régulation pour la transparence des élections, en 2000) ? Lors de chaque élection, les candidats se réunissent et mettent en place un organe. Cela n’a rien à voir avec Yewwi askan wi qui était une coalition politique et à travers laquelle nous avions pris l’engagement d’aller ensemble aux élections locales, aux élections législatives. Et d’identifier parmi nous ceux qui voudraient être candidat à la Présidentielle avec pour seule condition que les candidats s’engagent à soutenir celui d’entre nous qui arrive au deuxième tour. Or, Yewwi continue à jouer ce rôle moteur d’expression de la volonté populaire manifeste que les populations nous ont confié à travers les élections locales et législatives.