HARO CONTRE UN PERMIS DE DISSOUDRE L’ASSEMBLEE DONNÉ AU PRESIDENT SALL
L’éventualité de la dissolution de l’Assemblée nationale est redoutée depuis que le président de la République a saisi le bureau de l’institution d’un projet de révision de l’article 87 de la Constitution.
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L’éventualité de la dissolution de l’Assemblée nationale est redoutée depuis que le président de la République a saisi le bureau de l’institution d’un projet de révision de l’article 87 de la Constitution. Depuis lors, on assiste à une levée de boucliers d’opposants, de membres de la société civile et autres experts qui estiment que le projet de révision contient des dispositions scélérates, dangereuses pour l’Assemblée nationale et la souveraineté du peuple. D’autres estiment que la prérogative du chef de l’État de dissoudre l’Assemblée nationale pourrait avoir un effet contraire à celui recherché par l’initiateur de cette révision de la Constitution.
Les députés sont convoqués, ce lundi 17 juillet, pour statuer sur un nouveau projet de loi. Cependant, l’inquiétude repose sur l’article 87 de ce nouveau projet de loi. Certains pensent que le président de la République peut, après avoir recueilli l’avis du Premier ministre et celui du président de l’Assemblée nationale, prononcer, par décret, la dissolution de l’Assemblée nationale. Puisqu’avec ce projet de loi, il est loisible au président Sall de dissoudre l’Assemblée et d’organiser des élections législatives sans coup férir dans un délai de cent (100) jours
D’autres considèrent que ce projet de loi constitutionnelle contient des dispositions scélérates, dangereuses pour l’Assemblée nationale et la souveraineté du peuple. Ce projet, en son article 87, veut donner la possibilité au président de la République de dissoudre, à tout moment, l’Assemblée nationale. Ils accusent le président Macky Sall de développer par des arguties juridiques des moyens pour dissoudre l’Assemblée nationale et coupler les élections législatives avec l’élection présidentielle. Le président Sall chercherait à travers cette démarche à régler ses problèmes politiciens. Certains parmi les observateurs voient dans ce projet de loi, qui sera soumis à l’Assemblée nationale ce lundi, une volonté de traduire en texte législatif le résultat du dialogue national pour empêcher la candidature d’Ousmane Sonko.
D’autres, au contraire, évoquent un écart de calendrier (3 ans) dans la tenue de la présidentielle et des législatives. Pour eux, il apparaît donc de regrouper ces élections en une année pour éviter de mettre le pays dans une situation de campagne électorale quasi permanente. Cependant, estiment-ils, la prérogative donnée au chef de l’État de dissoudre l’Assemblée nationale pourrait aussi avoir un effet contraire avec des implications en cas d’adoption d’une motion découlant de l’initiative parlementaire. Or ces mécanismes institutionnels, tout comme la configuration politique, déterminent la stabilisation du calendrier électoral.
ASSEMBLÉE NATIONALE : Doudou Wade alerte sur la modification de la constitution en son article 87
Les députés sont convoqués ce lundi à l’Assemblée nationale, en procédure d’urgence pour l’examen d’un projet de loi modifiant la Constitution, le Code électoral et le code de procédure pénale. Mais l’ancien président du groupe parlementaire du Parti démocratique sénégalais, Doudou Wade, alerte les parlementaires sur la modification de la Constitution qui va donner au président de la République la latitude de dissoudre à tout moment l’Assemblée nationale. L’ex-président du groupe parlementaire Libéral et Démocratique, Doudou Wade, dans un message adressé aux députés précise que le projet de révision de la Constitution, en son article 87, mérite un sursaut d’orgueil collectif pour refuser le diktat du président de la République. En effet, argumente-t-il, avec cet article 87, le président de la République peut, après avoir recueilli l’avis du Premier ministre et celui du président de l’Assemblée nationale, prononcer, par décret, la dissolution de l’Assemblée nationale.
Selon lui, le décret de dissolution va fixer la date du scrutin pour l’élection des députés. « Le scrutin a lieu soixante jours au moins et quatre-vingt-dix jours au plus après la date de la publication dudit décret. La modification de l’article 87 comme prévu parle projet de loi est une catastrophe. J’ignore les motivations du président de la République et me demande si le professeur Ismaila Madior est le rédacteur du texte. Avec cette nouvelle rédaction, le président de la République a droit de mort sur l’Assemblée nationale », soutient avec force l’ancien patron des députés libéraux sous le magistère du président Abdoulaye Wade. D’après M. Doudou Wade, avec ce projet de loi, il est loisible au président Sall de dissoudre l’Assemblée et d’organiser des élections législatives sans coup férir tous les cent (100)jours. Et pour éviter un tel cas d’école, tranche-t-il, l’amendement du texte ci-dessous pourrait être adopté pour limiter le pouvoir de dissolution. Il suffit, selon lui, d’y ajouter l’alinéa suivant pour limiter les dégâts: « Il ne peut être procédé à une nouvelle dissolution que douze mois après ces élections ».
Éventuelle dissolution de l’Assemblée nationale : Frapp dénonce des « dispositions scélérates dangereuses »
Le secrétariat exécutif national du Frapp estime que ce projet de loi constitutionnelle contient des dispositions « scélérates et dangereuses pour l’Assemblée nationale et la souveraineté du peuple ». En effet, estiment les camarades du député Guy Marius Sagna, ce projet, en son article 87, « veut donner la possibilité au président de la République de dissoudre, à tout moment, l’Assemblée nationale ». Et d’évoquer la loi constitutionnelle introduite en 2011 pour instaurer un ticket président-vice-président et instaurer le quart bloquant. Selon les camarades de Guy Marius Sagna, le président Macky Sall chercherait, par des arguties juridiques er par tous les moyens, à dissoudre l’Assemblée nationale et à coupler les élections législatives avec l’élection présidentielle. Le bit recherché étant, à travers cette démarche, à régler ses problèmes politiciens. D’après eux, pour éviter ou limiter l’implosion de son parti et de sa coalition, Macky Sall veut disposer de la possibilité de nommer le candidat de son camp à l’élection présidentielle (par exemple Boun Abdallah Dione ou Abdoulaye Daouda Diallo ou un autre) de 2024 et le candidat à la présidence de l’Assemblée nationale (Amadou Ba ou un autre) dans le cadre d’un couplage de ces deux élections. « Comme le peuple sénégalais a fait reculer Macky Sall dans sa volonté illégale et illégitime d’être une 3e fois candidat à l’élection présidentielle, Macky nous prépare à sa candidature en 2024 comme président de l’Assemblée nationale toujours dans l’objectif d’unifier ses troupes en direction des élections qui seront couplées », alerte Frapp.
Tout sauf Sonko !
« Les citoyens que nous sommes devons refuser les tripatouillages constitutionnels et des lois pour des intérêts bassement politiciens. C’est pourquoi, le FRAPP demande à tous les citoyens qui ont pris conscience de cela et au F24, malgré les délais courts, de se mobiliser pour barrer la route au renforcement du présidentialisme néocolonial et que Macky Sall cesse de jouer avec les textes », conclut le secrétariat exécutif national du FRAPP
Réagissant au projet de révision constitutionnel, l’ancien ministre et actuel député Thierno Alassane Sall estime que cette décision livre une Assemblée nationale déjà sans pouvoir réel au bon vouloir d’un président tout-puissant. « Macky Sall a renoncé à un 3e mandat mais pas au pouvoir. Selon toute vraisemblance, il veut nous choisir son successeur et faire cohabiter ce dernier avec un parlement qu’il aura largement contribué à modeler », soupçonne l’ancien ministre et ex membre de la majorité présidentielle qui déclare qu’il ne votera aucune loi qui contribue à fragiliser notre démocratie.
Sur cette même modification de l’article 87, l’ancien député et ex-ministre Cheikh Bamba Dièye estime qu’elle offrirait au président de la République la possibilité de dissoudre à tout moment l’Assemblée nationale. Ce qui constituerait une grave reculade démocratique. Cheikh Bamba Dieye estime également que cette modification n’a jamais fait l’objet d’un consensus au niveau du Dialogue politique national.
Ndiaga Sylla, expert électoral : « La révision de l’article 87 de la Constitution encadre la prérogative de dissolution de l’Assemblée nationale »
Ndiaga Sylla, expert électoral, rappelle que, étant donné que ce point n’avait pas fait l’objet de consensus au cours du dialogue politique, il avait été transféré au comité de suivi. Il semble donc évident qu’en sus de la réforme du système de parrainage, si le projet de loi portant révision constitutionnelle intègre la modification de l’article 87, c’est certainement à la suite d’un consensus des différentes parties prenantes au dialogue politique, représentées au sein du comité de suivi. Selon lui, en s’interrogeant sur les motivations d’une telle réforme, il ressort, tel que proposé initialement par la mouvance présidentielle et repris dans l’exposé des motifs du projet de loi, portant révision de la Constitution, un souci de rationaliser le calendrier électoral.
Ainsi, il précise que malgré le retour du quinquennat présidentiel, acté par le référendum de 2016 et marqué par la dernière élection de 2019, on note encore, un écart de calendrier (3 ans) dans la tenue de la présidentielle et des législatives. Certes, prévient-il, il apparaît judicieux de regrouper ces élections en une année et éviter ainsi de mettre le pays dans une situation de campagne électorale quasi permanente. Mais, la prérogative du chef de l’État de dissoudre l’Assemblée nationale pourrait aussi avoir un effet contraire à celui officiellement recherché. Il s’y ajoute les implications en cas d’adoption d’une motion découlant de l’initiative parlementaire. C’est dire que ces mécanismes institutionnels, tout comme la configuration politique, détermineront la stabilisation du calendrier électoral
L’expert électoral pose une série de questions nécessitant à ses yeux des réponses. « Cette réforme, renferme-t-elle une volonté de mettre la pression sur les députés de la majorité en dépit des assurances données par le Président, lors de leur dernière rencontre ? Pourrait-elle ouvrir la voie du couplage des élections présidentielle et législatives qui favoriserait un ticket de candidature ? Comment faudrait-il stabiliser le calendrier électoral sans en profiter pour donner au chef de l’État le pouvoir de remettre en cause le suffrage universel des citoyens à tout moment ? Ne faudrait-il pas maintenir le statuquo concernant les 2 ans de législature à défaut de retenir 2 ans et demi, à mi-mandat des députés ? Ne serait-il pas envisageable d’aller vers un compromis en jouant le jeu face à la nouvelle configuration au terme de la présidentielle en attendant les prochaines législatives comme ce fut le cas durant l’entre 2000-2001 ? », s’interroge-t-il.
N’empêche, Ndiaga Sylla signale qu’en tout état de cause, le jeu de pouvoir continuera de cacher ses secrets. Toutefois, prévient-il, le nouveau délai prévu pour l’arrêté fixant le nombre de parrains(L.120), qui acte le début de la collecte, lui paraît très proche de la période de dépôt des candidatures.