PLAIDOIRIE EN CLAIR-OBSCUR DU PROCUREUR DIABY
La réquisition du Parquet général, Lassana Diaby, a laissé les avocats de la défense sur leur faim
La réquisition du Parquet général, Lassana Diaby, a laissé les avocats de la défense sur leur faim. Pourtant le maitre des poursuites a bien indiqué que la Cour d’appel doit prendre en compte la décision de la Cour de la Cedeao en ce sens que le Sénégal a ratifié cette loi. Mais il n’a pas osé réclamer ouvertement la libération de Khalifa Sall. Il a seulement invité les autorités à rectifier le tir à l’avenir.
Si le Procureur général, Lassana Diaby, était allé au bout de sa logique dans son réquisitoire, le maire de Dakar et ses codétenus pourraient nourrir l’espoir d’humer l’air de la liberté. Malheureusement, il a fait dans le clair-obscur. «La première leçon qu’il faut tirer, c’est le respect des décisions communautaires. La Cour de justice de la Cedeao s’est déclarée compétente de connaitre cette affaire. On ne peut pas contester l’existence de l’arrêt, car il émane d’une juridiction», a-t-il précisé d’emblée.
Et selon le Procureur général, «le débat tourne autour d’une requête qui demande une liberté d’office. Laquelle fait enfler la problématique entre les parties». Selon lui, il y a deux parties en cause, c’est-à-dire l’Etat qui a violé le traité qu’il a ratifié et le citoyen qui a été lésé. Et à partir de cet instant, remarque-t-il, «toutes conclusions peuvent être tirées». Mais il s’empresse de préciser que les juridictions sénégalaises ne sont pas attraites devant les juridictions africaines des droits de l’Homme mais c’est l’Etat du Sénégal qui a été attrait, pour ne pas avoir respecté ses engagements.
Pourtant, Lassana Diaby évoquera la jurisprudence Mamadou Tandia. Selon lui, la Cour avait estimé que la détention de ce dernier était arbitraire et elle n’a ordonné sa libération qu’après la demande du requérant. «Cet arrêt me parait illustratif par rapport à la jurisprudence communautaire. Et c’est .pour confirmer que la Cour communautaire limite des champs d’action des parties», dit-il. Avant de reconnaitre que selon cette décision de la Cour de justice de la Cedeao, nos juridictions n’ont pas respecté le règlement 5 de l’Uemoa qui exige la présence de l’avocat dès les premières heures de l’interpellation. Et comme l’Etat a inséré cette disposition dans son corpus juridique, le procureur estime qu’en ce moment, il faut ordonner la liberté provisoire.
Seulement, il ne va pas demander expressément de mettre Khalifa Sall et compagnie en liberté. Mais il invite les autorités à corriger ces imperfections et que, selon lui, le manque du respect des décisions communautaires peuvent entrainer vers un chaos communautaire.
LA VERSION DES AVOCATS DE L’ETAT
Auparavant ce sont les avocats de l’Etat qui se sont employés à démonter les arguments brandis par la défense. Selon Me Moustapha Ndoye, les violations alléguées ne sont pas de nature à entacher la procédure. «Ce que vous devez faire, vous pouvez le faire sans l’arrêt. On n’a besoin que de notre code de procédure pénale et non de la Cour. Cette Cour avait la possibilité, s’il décidait une libération immédiate, de l’ordonner», a-t-il affirmé. Pour lui, «on a cherché à donner à cette décision une portée qu’elle n’a pas du tout». Pour lui, il n’y a aucun instrument juridique qui permet au juge d’appel d’intégrer cet arrêt dans sa décision.
De l’avis de Me Ousmane Sèye, il n’y a pas de base légale. Et aucune juridiction n’a le droit d’ordonner la libération d’un député mis sous mandat de dépôt. C’est seule l’Assemblée nationale qui a ce pouvoir, selon lui. Et mieux, ajoutera l’avocat, la Cour de la Cedeao ne s’est pas aventurée sur ce point. Sur la levée de l’immunité parlementaire, il dira que c’est une procédure législative et non judiciaire. Me Samba Bitèye pense que tout a été dit en ce qui concerne le bienfondé des différentes requêtes qui ont été soumises à la Cour. «Ce procès en appel prouve que tous les commentaires en ce qui concerne cet appel n’est que supputations. Car les techniciens de cet arrêt sont passés à demander le renvoi car ils n’ont pas eu l’arrêt. Il n’a jamais été question pour nous que cette disposition. On a dit que sur la base d’une disposition, on ne peut pas aller loin. Il faut être un peu sorcier pour dire la décision de l’arrêt permettrait la libération de Khalifa Sall ou la cessation de toutes les poursuites à son encontre», ironise-t-il. Mais Me Ousseynou Gaye, avocat de la mairie de Dakar qui n’est pas de cet avis, pense que la Cour d’appel ne pas ne pas parler de la libération d’office de Khalifa alors qu’elle est saisie dans ce sens. Pour en avoir le cœur net, il conseille d’attendre l’arrivée de l’arrêt pour voir ses motivations.