POURQUOI MACKY EST FÂCHÉ
Mame Mbaye Niang, ministre de la Jeunesse et membre de la direction de l'APR
La colère du président de l'Alliance pour la République (Apr) contre des responsables de la formation au pouvoir n'est pas banale. Selon Mame Mbaye Niang, ministre de la Jeunesse, de l'Emploi et de la Construction citoyenne, le Président Macky Sall n'est pas assez défendu face aux multiples agressions dont il fait l'objet au quotidien. De façon récurrente dans cet entretien avec EnQuête, le ministre la Jeunesse, mettant en avant sa casquette de membre du Secrétariat exécutif national de l'Apr, sermonne sans les nommer ceux qui ont étalé sur la place publique le contenu des discussions politiques tenues entre quatre murs, avant de revenir sur le bilan du président de la République qui, selon lui, est bel et bien défendable, contrairement à une certaine opinion.
Il a été fait cas dans la presse d'une colère noire qu'aurait piquée le Président de l'Apr, Macky Sall, au cours d'une réunion du Secrétariat exécutif national de votre parti. Pouvez-vous nous en dire plus sur cette réunion justement ?
Je ne peux rien dire par rapport à cette réunion. Je trouve même désolant qu'on puisse mettre sur la place publique le contenu de discussions tenues dans une réunion politique. Je mets en garde ces gens-là. Je pense qu'il faut mériter la confiance du président de la République. Un vrai responsable, au sens d'ailleurs propre du mot, doit être apte à pouvoir garder pour lui-même des discussions tenues entre quatre murs. Donc la personne qui a sorti ces informations ne mérite pas en réalité sa place autour de la table du Secrétariat exécutif national de l'Alliance pour la République (Apr). Maintenant, que le président de la République soit en colère ou relativement fâché contre certains responsables, je trouve cela tout à fait normal. C'est normal qu'il soit fâché par rapport à ce qui se passe. L'actualité, nous la vivons tous les jours et on constate que le président de la République n'est pas bien défendu. Ce n'est pas seulement lui qui a eu à le dire ou à le constater. Nous tous, avons déjà dénoncé le défaut d'engagement de certains responsables face à l'agression que notre parti, notre régime ou notre leader vit au quotidien.
Vous confirmez : le président de la République a bel et bien reproché à ses lieutenants de ne pas avoir bien défendu son bilan ?
Je vais me répéter. Je ne peux pas reprocher à des responsables le fait d'avoir étalé le contenu de nos discussions sur la place publique, aller jusqu'à dire qu'ils n'ont pas leur place autour de la table du SEN de l'Apr, et me comporter comme eux. Je ne peux pas être en porte-à-faux avec des principes que je défends. Comme je vous l'ai dit, je ne saurais dire un seul mot de ce qui s'est passé ou dit en Secrétariat national. C'était une réunion privée. C'est le président du parti qui a convoqué ses responsables et les discussions sont empreintes de confidentialité. Donc, on ne peut pas en discuter sur la place publique.
Si le président Macky Sall demande aujourd'hui à ses militants de bien défendre son bilan, c'est parce qu'il veut en faire un argument solide de campagne. Mais quel est aujourd'hui le contenu de ce bilan ?
Le bilan du président de la République, Macky Sall, est bien visible pour les gens qui veulent voir. Il touche tous les secteur d'activité. Dans le domaine de l'agriculture, les productions agricoles, horticoles et céréalières ont augmenté de plus de 54%. Ce sont là des résultats du Chef de l'État après les efforts qu'il a eu à faire dans ce secteur avec une mécanisation de plus en plus importante et une sélection très sérieuse des semences. Cette politique volontariste de sortir 70% des Sénégalais des difficultés est aujourd'hui salutaire et bien appréciée des populations. 70% des Sénégalais ont vu leurs richesses augmenter de 54% par rapport aux années précédentes. 300 mille familles bénéficient aujourd'hui des bourses de sécurité familiale. Cela est également un point positif. Les inondations que les gens vivaient pendant longtemps et qui s'accentuaient d'année en année, sont aujourd'hui éradiquées. L'ensemble de ces réalisations constituent des points positifs, défendables et honorables réalisés en trois ans seulement. Il n'y a pas un travailleur au Sénégal qui n'a pas vu ses revenus augmenter avec la baisse de l'impôt sur les salaires. Il n'y a pas un seul Sénégalais qui avait des problèmes de santé et qui ne voit pas aujourd'hui les conditions d'accès aux soins s'améliorer. Il y a tellement de choses que nous pouvons dire ou faire et tellement de réalisations du président de la République, que passer notre temps à nous quereller entre nous constitue une perte de temps. Le bilan du président de la République est honorable et défendable et est de loin différent du bilan que peint cette certaine élite qui, je suis désolé de le dire, est pervertie pour des raisons que nous tous nous connaissons.
Mais est-ce que ce bilan du président Macky Sall peut aujourd'hui constituer un véritable argument de campagne ?
Vous pensez que les 70% des Sénégalais qui sont cultivateurs et qui ont vu leurs productions augmenter de 50% peuvent dire que le président de la République n'a rien fait ? Le kilogramme d'arachide qui était acheté entre 140 et 160 francs est aujourd'hui cédé à 200 F CFA. Mieux, on ne parle plus de bons impayés. Je pense qu'il faut faire la part des choses entre la situation réelle du pays et celle entretenue et soutenue par des rumeurs et de fausses informations qui ne cherchent qu'à nous distraire ou à désinformer l'opinion sur les véritables réalisations du chef de l'État qui ne visent, en réalité, qu'à améliorer le vécu au quotidien des Sénégalais. Que ceux qui s'activent le comprennent, ces Sénégalais-là n'accepteront jamais d'être manipulés. La majorité des Sénégalais est directement touchée par ces réalisations du président de la République dans l'ensemble des secteurs d'activité. Ce n'est pas seulement dans le secteur de l'agriculture mais également dans le domaine du bâtiment, au niveau des infrastructures, au niveau de la santé et sur le plan social. Tous ces investissements, ce sont des moyens qui étaient destinés avant à autre chose mais aujourd'hui qui sont directement injectés pour améliorer les conditions de vie des Sénégalais et régler leurs difficultés. Je pense qu'il faut avoir aujourd'hui l'honnêteté de reconnaître qu'il y a eu beaucoup d'efforts qui ont été consentis par le régime depuis son avènement. Je ne dis pas que tout est rose ou tout est réglé, non, loin de là; mais la quasi-totalité des préoccupations des populations sénégalaises sont prises en compte par le président de la République qui est en train de poser des actes visibles.
Comprenez maintenant ceux qui sont en face de nous et qui disaient depuis le début que Macky Sall n'a pas de vision. Maintenant, ils ne le disent plus parce qu'ils savent non seulement que le président de la République a une vision mais va toujours jusqu'au bout de sa logique. Ils ont essayé à plusieurs reprises de mettre le feu dans ce pays, ils n'y sont pas parvenus. Maintenant ils ont adopté une autre stratégie qui consiste naturellement à désinformer l'opinion, à semer le sentiment de mal vivre ou de mal être des populations qui sont très au fait des efforts qui ont été faits comme dans le domaine de l'agriculture où tous les chiffres sur la production agricole ont été donnés non pas par l'État du Sénégal, mais par des organismes indépendants tels que le CILS, le PAM (Programme alimentaire mondial) et le FAO. Voilà des résultats concrets que les gens veulent soustraire de la tête des Sénégalais avec des argumentaires politiques qui ne reposent sur rien.
Selon l'enseignant-chercheur en Sciences politiques Ibrahima Sylla, un bilan n'a pas toujours réélu un président sortant. Qu'en pensez-vous ?
Chacun a aujourd'hui le droit de réfléchir et de produire le fruit de ses réflexions. C'est normal, cela relève de la liberté d'expression. Mais je pense qu'une bonne analyse doit être basée sur des paramètres qui sont fixes et non pas variables. Une analyse qui repose sur des variables qui n'existent même pas dans notre société naturellement produit des résultats qui vont à l'encontre de celle-ci. Je pense qu'on ne peut pas parler de réélection d'un président sans pour autant faire un bilan en termes de réalisations et de résultats acquis, de probité morale et d'un leadership assumé. On ne peut pas demander aux gens de réélire une personne qui ne présente pas des résultats. C'est incohérent. L'analyste se perd dans ses propos et par moments se contredit. Il dit dans un premier temps qu'il y a des problèmes de communication sur les réalisations du président de la République et dans un second temps, il dit que le président de la République ne devait pas demander à ses lieutenants d'aller communiquer. Ce sont des contradictions. Moi, je pense que la prise de parole dans ce pays devrait être étudiée. Certes tout un chacun est libre de donner son point de vue mais tout un chacun aussi n'est pas libre de dire des choses que la morale ou l'intelligence n'accepte pas. Sinon comment peut-on réélire un président de la République sans présenter un bilan, sans parler d'éthique, de morale et de réalités socio-économiques. Or, on ne peut pas parler de réalités socio-économique sans évoquer les réalisations en termes d'infrastructures et de mesures sociales et économiques.
Pour lui, les jeunes en âge de voter ne se retrouvent ni dans la politique ni dans la vision du chef de l'État…
Cette analyse est basée sur des arguments fallacieux. Au Sénégal, 70% de la population vit de l'agriculture. Aujourd'hui, c'est cette majorité des populations qui a vu sa production agricole augmenter de 54%. Ce qui va influer sur leurs avoirs et donc sur leurs conditions de vie par rapport aux années précédentes.
Que lui répondez-vous quand il dit que le président de la République est sur la voie d'être sanctionné à la prochaine élection présidentielle ?
Ça, c'est sa pensée à lui. Cela n'engage que lui. Mais cela ne saurait engager la majorité des Sénégalais qui sont en train d'expérimenter les réalisations du président de la République.
Entrevoyez-vous la possibilité que le président de la République soit victime d'un vote-sanction ?
Vous savez, nous, nous travaillons exclusivement à la réalisation des engagements du président Macky Sall. A la fin de ce travail, nous pourrons évaluer les résultats avec le peuple sénégalais qui est souverain. Vouloir anticiper sur leurs positions ou leurs comportements, c'est vraiment mal connaître les Sénégalais et l'histoire politique de ce pays. Je demeure convaincu qu'avec ce qui est en train de se faire, si nous nous focalisons exclusivement sur la réalisation des engagements du président de la République et communiquons de façon honnête, il n'y a pas de raisons à ce que la majorité des Sénégalais n'accorde pas un second mandat au président Macky Sall. Nous ne devons pas suivre cette élite qui est pervertie par d'autres réalités, qui essaie de semer la zizanie ou de distiller des contrevérités sous le couvert de la liberté d'expression.
Vous avez tantôt parlé d'engagement du président de la République, Macky Sall. Parmi ces engagements, il y a la réforme des institutions qui tarde à se faire. Qu'est-ce qui explique, selon vous, ces lenteurs ?
Les réformes ne tardent pas à se faire. Elles sont en cours de réalisation et le président de la République a annoncé même un référendum en 2016 qui va porter ces réformes. On est encore en 2015. Attendons 2016 pour voir s'il y aura référendum ou si cette réforme tant attendue par les populations sera impulsée. Il fera tout pour respecter ses engagements.
Le président de la République avait également pris l'engagement de donner des emplois à la jeunesse sénégalaise. Qu'est-ce qui a été fait dans ce sens ?
La jeunesse sénégalaise est confrontée à des difficultés. Mais nous lui devons la vérité sur la réalité du moment. Ce que nous faisons en tant que ministre de la Jeunesse et de l'Emploi obéit à une stratégie globale qui englobe quatre secteurs à savoir la formation professionnelle, l'enseignement supérieur, l'enseignement élémentaire et le ministère de l'emploi. Il y a d'abord ce qu'il faut régler dans l'immédiat. 42% des demandeurs d'emplois n'ont pas de qualification. Cela veut dire qu'un nombre important des jeunes qui demandent de l'emploi n'a aucune qualification. Ces 42%, il faut les insérer donc dans la production. C'est ce qui justifie d'ailleurs les efforts du président de la République dans le secteur agricole qui peut employer des milliers de jeunes sans qualification. Sans nous engager dans un discours technique, c'est ce qui justifie le PRACAS, le PNAR, les Domaines agricoles communautaires (DAC), le PAPEJ qui encouragent les jeunes à investir dans la production céréalière ou dans l'horticulture. Ce sont des niches d'emplois qui peuvent absorber pratiquement ces 42% de jeunes qui n'ont malheureusement pas de qualification. Au Sénégal, l'enseignement supérieur et élémentaire ne correspond pas aux réalités du marché de l'emploi. Cela nécessite des investissements et c'est ce qui explique la construction de 17 lycées techniques pour capter ces jeunes qui arrêtent leurs études entre le brevet et le baccalauréat. Ces 17 lycées techniques forment sur 34 nouveaux BTS créés depuis 2012. A côté de ces lycées, il y a deux nouvelles universités qui ont été créées et qui sont spécialisées en agriculture et en technologie. Donc les solutions que le président de la République propose par rapport à cette question de l'emploi des jeunes, sont structurantes. Elles consistent à pousser le maximum de jeunes vers l'entrepreneuriat. Il y a de l'argent qui est disponible mais qui tarde à être décaissé, faute de projets banquables. Il y a des jeunes qui sont en train d'élaborer leurs projets ; et ceux qui déposent des projets viables et bancables reçoivent nécessairement des financements. Mais trouver un emploi à quelqu'un qui n'a pas de qualification en dehors de ces secteurs de production et de transformation est très difficile. Les jeunes diplômés qui ont décidé d'être entrepreneurs sont en train d'être soutenus. Il y a la mise en place d'une ligne de crédit de 4 milliards par le PAPEJ et 500 millions par l'ANPEJ. Avant le 31 novembre prochain, nous allons procéder à la remise de financements pour un montant qui va avoisiner les 800 millions et qui sont destinés à des jeunes qui ont initié des projets viables et banquables et que le ministère de la Jeunesse accompagne pour la création d'emplois. Cela en dehors du PSE qui a créé des emplois.