TERMINUS, MOUSSA DIOP DESCEND DE DAKAR DEM DIKK
Le limogeage du leader d'Alternance Générationnelle/Jotna intervient une semaine après sa sortie médiatique assimilant le troisième mandat à un coup d'Etat. Une question devenue taboue au Sénégal
Le président de la République a limogé hier, mercredi 2 septembre, Me Moussa Diop de son poste de directeur général la société de transport public, Dakar dem dikk (Ddd). Cette décision du président Macky Sall intervient une semaine après la sortie du leader du parti Alternance Générationnelle/Jotna affirmant lors d’une émission sur la Sen TV (privée) qu’il n’y avait pas matière à interprétation un 3ème mandat du président Sall. Mieux avait-il confirmé «un 3ème mandat est un coup d’état» en faisant allusion à ce qui se passe en Côte d’Ivoire avec Alassane Drame Ouattara. Il ne devrait pas ignorer que c’est une question taboue au Sénégal.
Terminus ! Le leader du parti Alternance Générationnelle/ Jotna n’est plus patron de la société de transport public, Dakar Dem Dikk (DDD). Me Moussa Diop a été démis de ses fonctions par le président de la République, Macky Sall qui a aussitôt procédé à son remplacement, hier, en conseil des ministres, par Omar Bounkhatab Sylla, magistrat de fonction qui était jusque-là, directeur général des Grands trains du Sénégal. Ce limogeage qui met fin à la mission de Me Moussa Diop qui est parvenu, en l’espace de six ans, à révolutionner la société Ddd pour en faire l’une des plus attractives du pays, suscite beaucoup de commentaires et des interrogations. En effet, la décision du président Sall de se séparer du coordonnateur de la coalition Macky2012 dont les qualités managériales sont saluées par beaucoup de Sénégalais intervient moins d’une semaine après la sortie de Me Diop contre les troisièmes mandats en Afrique.
En effet, invité de l’émission Sen Show de la télévision Sen Tv (groupe D média privée), Me Moussa Diop, répondant à une interpellation d’une des animateurs qui lui demandait sa position sur le troisième mandat, a martelé sans équivoque que le «3ème mandat est un coup d’Etat constitutionnel». En prenant l’exemple du Sénégal, l’avocat inscrit au barreau de Paris a également aussi précisé, concernant une éventuelle troisième candidature de son patron, Macky Sall, «qu’il n’y a pas matière à interprétation». «Un 3ème mandat est impossible en vertu de la constitution», avait-il tranché. Avec ce limogeage du leader du leader du parti Alternance Générationnelle/Jotna, c’est la liste des personnalités politiques proches du président Sall victimes de leur position sur cette question du troisième mandat, qui s’élargit.
En effet, avant Me Moussa Diop, d’autres responsables du pouvoir en place avaient déjà fait les frais de la fureur du président de la République tout simplement parce qu’ils ont osé répéter le refrain du président Sall qui clamait partout avant sa réélection dès le premier tour lors de l’élection présidentielle du 26 février 2019 pour un second et dernier mandat, que c’était son dernier mandat parce que la révision constitutionnelle de 2016 ne permet plus une troisième candidature au Sénégal. Le premier responsable du régime à faire les frais de sa position sur cette question du troisième mandat était Sory Kaba qui s’est vu débarquer de son poste de Directeur général des Sénégalais de l’Extérieur, au Ministère des Affaires Etrangères et des Sénégalais de l’Extérieur. Tout simplement parce qu’il a osé dire à haute voix lors de son passage dans une émission le 20 octobre 2019 que le «président Macky Sall entame son dernier mandat à la tête du Sénégal. La Constitution lui interdit de faire un troisième mandat. Notre constitution a été verrouillée. Deux mandats pas plus ! Il n’y a aucune possibilité de rétroactivité».
Accusé à sa sortie de studio par certains de ses camarades de parti d’«indiscipline et d’atteinte à l’autorité du président», il sera déchargé de ses fonctions dès le lendemain, c’est-à-dire, le lundi matin à la première heure par son patron Macky Sall qui tenait ainsi à donner un signal fort. Par décret n°2019-1763 du 21 octobre 2019, Amadou François GAYE sera nommé nouveau Directeur général des Sénégalais de l’Extérieur. Près d’une semaine après, c’est autour de Moustapha Diakhaté de se faire renvoyer de son poste de chef de cabinet du président de la République pourles mêmes raisons concernant sa position tranchée sur la question du mandat. Depuis lors, personne n’ose plus abordé cette question dans le camp du président Sall à l’exception bien évidement du tonitruant Moustapha Cissé Lô, membre fondateur du parti au pouvoir, l’Alliance pour la République et ancien président du groupe parlementaire Benoo Bokk Yakaar (BBY).
Pourtant, l’ancien président du parlement de la Cedeao, avant sa disgrâce causée par ses audio très compromettantes notamment surla Première dame et certains de ses camarades de parti, a été le seul à oser dire publiquement que Macky Sall n’a plus droit à un autre mandat sans qu’il ne soit inquiété. Il faut également souligner que malgré sa promptitude à sanctionner ses collaborateurs, le président Sall n’a jamais levé le plus petit doigt contre ses camarades de parti qui théorisent la légalité de son troisième mandat. Un paradoxe qui fait dire à certains observateurs que Macky Sall est tout simplement en train d’installer une «dictature rampante» autour de cette question pour ensuite le moment venu, suivre les pas de ses ainés, en l’occurrence son mentor et prédécesseur, Me Abdoulaye Wade ou encore ses homologues de la Cote d’ivoire, Alassane Ouatara et Alpha Condé de la Guinée. Mais comme disait l’autre, «le Sénégal n’est pas le Togo». Il n’est pas non plus la Guinée, ni la Côte d’Ivoire.