UNE BREBIS AU MILIEU DES LOUPS
Il n’y a pas eu d’effusion de sang mais Soham El Wardini semble avoir vécu une après-midi des longs couteaux le samedi 23 octobre dernier, lors de la réunion de la Commission d’investiture de la coalition Yewwi Askan Wi.
Il n’y a pas eu d’effusion de sang mais Soham El Wardini semble avoir vécu une après-midi des longs couteaux le samedi 23 octobre dernier, lors de la réunion de la Commission d’investiture de la coalition Yewwi Askan Wi. Au terme d’un scénario vaudevillesque et dramatique pour l’intéressée, la successeure de Khalifa Sall est déclarée forclose et ne peut ainsi briguer le renouvellement de son mandat au nom de Taxawu Dakar/Yewwi Askan Wi.
Un vrai coup de théâtre qui compromet grandement les chances de la première femme à avoir dirigé la capitale de conserver son fauteuil de maire. Mais surtout une vraie opération de liquidation comme l’attestent plusieurs sorties de ses “camarades” de coalition qui doutent fondamentalement de sa loyauté mais aussi de sa capacité à mener Taxawu Dakar vers la victoire. “Considérant que nous devons garder la mairie de Dakar aux mains de l’opposition, nous ne pouvons pas trouver un meilleur profil que celui de l’actuel maire de Mermoz-Sacré Cœur, Barthélémy Dias, qui est par ailleurs un homme de terrain engagé et qui a été à la pointe du combat pour la libération de Khalifa Sall”, a lâché, avec franchise, Ndèye Diouf, figure de Taxawu Dakar.
Soham El Wardini, il est vrai, n’a pas beaucoup mouillé le maillot durant la détention de Khalifa Sall. Pas autant que Barthélémy Dias dont les qualités d’agitateur et de tribun de la plèbe sont incontestables. Pourtant en coulisses, il se murmure qu’elle a beaucoup œuvré notamment auprès des foyers religieux pour la libération de son mentor politique. Le commun des Sénégalais n’est, toutefois, pas au fait de ses tractations secrètes. Ce que le grand public retient ce sont les coups de gueule contre la “politisation de la justice" et les actions d’éclat dans la rue. Pas les points forts de Soham El Wardini, hélas.
Et sa condition de femme n’a rien à y voir. Nous sommes convaincus, à la suite de Simone de Beauvoir, que “la femme n’est victime d’aucune mystérieuse fatalité. Il ne faut pas conclure que ses ovaires la condamnent à vivre éternellement à genoux”. Au Sénégal, d’ailleurs, Aissata Tall Sall, Aida Mbodji, Aminata Touré, Aminata Mbengue Ndiaye, ont montré que les femmes peuvent être de véritables animaux politiques.
Le nœud du problème chez la maire sortante de Dakar, c’est qu’elle est une figure consensuelle, lisse, sans réel talent oratoire pour entraîner les foules. Défauts fatals, à une époque où l’on bénit la culture du clash, où l’on préfère le bon mot qui égratigne à la brillante idée qui pourrait servir l’intérêt général. Autre défaut, qui dans le meilleur des mondes serait une qualité, elle n’est pas sectaire. De nombreux clichés la montrent sourires aux lèvres, à Buenos Aires (Jeux Olympiques de la Jeunesse) ou dans les rues de Dakar (Cleaning Days) en compagnie du Président de la République.
Bienséance républicaine peu comprise des militants radicaux ou des trolls des réseaux sociaux, et qui brouille son image auprès de la base de Taxawu Dakar. Celle-ci aurait aimé une opposition plus franche comme celle de Khalifa Sall lors de son magistère à l’Hôtel de Ville.
Ce style, en définitive, Soham El Wardini semble vouloir le perpétuer malgré les assauts de la meute. Lors de la conférence de presse qu’elle a animée le 27 octobre dernier, nulle trace de rancœur, d’attaques ad hominem ou de velléité de vendetta contre ses rivaux, mais plutôt un message oecuménique plein de bons sentiments et digne de modération.
Sera-ce suffisant pour le combat de Dakar….