PLUS DE 300 PERSONNES SOUFFRENT DE L'HÉMOPHILIE AU SÉNÉGAL
Les symptômes se caractérisent par de nombreuses contusions larges ou profondes, des gonflements et des douleurs articulaires, des saignements inexpliqués ainsi que du sang dans les urines ou les selles
Le 17 avril est la journée consacrée, partout dans le monde, à l’hémophilie, une maladie rare qui se caractérise par une anomalie du processus de coagulation du sang.
Profitant de l’occasion, le ministère de la Santé a fait, sur sa page Facebook, une interview croisée avec Pr Saliou Diop hématologue et directeur du Centre National de Transfusion Sanguine (Cnts) et Abdoulaye Loum président de l’association des hémophiles du Sénégal. Maladie génétique de la coagulation du sang, l’hémophilie touche plus de 300 personnes au Sénégal. On parle de cette pathologie lorsque le sang ne coagule pas correctement. C’est le cas également quand l‘hémorragie interne ou externe est excessive en cas de blessure ou de lésions.
Les symptômes se caractérisent par de nombreuses contusions larges ou profondes, des gonflements et des douleurs articulaires, des saignements inexpliqués ainsi que du sang dans les urines ou les selles. Quand un hémophile a une blessure ou lésion, renseigne Pr Saliou Diop, il perd beaucoup de sang, ce qui provoque une anémie chez lui. «Depuis 1995, nous avons commencé à avoir des cohortes pour les suivre. Au début, nous avions deux à trois malades par an, mais actuellement, chaque année nous avons une trentaine de nouveaux cas. Présentement, nous suivons 303 malades et les 50% proviennent des régions. Sur les 20 dernières années, nous avons constaté que 8 patients sont décédés de cette maladie», informe-t-il avant de relever des difficultés pour la prise en charge. «Il y a des problèmes de prise en charge sur les complications dues au saignement. Souvent, les hémophiles ont des handicaps physiques qui les empêchent de travailler et cela devient une maladie sociale», souligne Pr Saliou Diop. D’où l’importance de la journée du 17 avril qui lui a été dédiée. C’est une occasion de parler de la maladie, surtout que 75% des hémophiles ont été diagnostiqués dans les pays développés où le corps médical est suffisamment outillé pour cela. «Dans les pays sous développés comme le nôtre, il a été diagnostiqué moins de 20% et les 80% ne sont pas diagnostiqués.
Par conséquent, c’est une occasion pour parler au personnel médical pour lui montrer comment diagnostiquer une personne atteinte de cette pathologie. C’est une maladie rare et nous savons les difficultés liées aux maladies rares dans nos pays. On ne les voit dans aucun programme ou projet et elles sont souvent oubliées », se désole le spécialiste qui estime cependant que le Sénégal fait partie des rares pays où la maladie a été intégrée dans la liste des maladies chroniques. «Ceci est important pour que l’hémophile puisse bénéficier des politiques de santé afin de permettre aux différents hôpitaux d’avoir les outils pour le diagnostic. Ainsi, le personnel de santé pourra être formé et des ressources dégagées pour avoir le traitement adéquat», indique-t-il.
A la tête de l’Association des hémophiles du Sénégal (Ahs) créée en 1994, Abdoulaye Loum explique que le but de son organisation est de venir en aide à toute personne atteinte de cette maladie. «Nous n’avons pas de période spécifique. Tout le temps, nous faisons attention pour ne pas nous blesser, car nous pouvons avoir une hémorragie interne ou externe. Il y a eu des progrès sur la prise en charge, car le médicament que nous utilisons fait actuellement partie des médicaments d’urgences. La Pharmacie Nationale d’Approvisionnement a passé une commande, mais nous avons des difficultés à accéder à ce médicament qui a été centralisé au Cnts. Nous voulons que le gouvernement nous aide pour qu’un malade ne soit pas obligé de quitter les régions pour venir à Dakar pour avoir le médicament. Nous voulons que le médicament soit disponible partout au Sénégal», déclare-t-il.
A propos de la manière dont se manifeste la maladie, Abdoulaye Loum évoque des douleurs atroces difficiles à expliquer. «Au mois de décembre passé, je suis resté une semaine sans fermer l’œil», se souvient le président de l’Ahs.