TENSION À L'HÔPITAL DE MATAM
C’est un dialogue de sourds par courrier interposé entre Dr Aladji Ndiaye (Directeur) et Dr Mamadou Demba Ndour (Gynécologue et chef de service)
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A l’hôpital régional de Matam, ce n’est plus le parfait amour entre le directeur et son chef du service de gynécologie. C’est un dialogue de sourds par courrier interposé entre Dr Aladji Ndiaye (Directeur) et Dr Mamadou Demba Ndour (Gynécologue et chef de service). Une situation tendue qui fait suite à la publication d’un post sur Facebook par le dernier nommé qui aurait parlé en tant que « citoyen sénégalais résident à Matam depuis 6 ans » lors de la tournée économique du chef de l’Etat dans le Fouta. Ce qui lui a valu une demande d’explication suivie d’une sanction disciplinaire pour manquement et non-respect du devoir de réserve par rapport à une délibération du Conseil d’administration. Mais, selon Dr Ndour, cette sanction n’est qu’un prétexte pour le museler. Le problème se trouverait ailleurs…
Lors de la visite du chef de l’Etat, Macky Sall, dans le Nord du pays, Dr Mamadou Demba Ndour, chef du service de Gynécologie obstétricale de l’hôpital de Matam, avait produit un texte dans lequel il attirait l’attention du président Sall sur la situation des jeunes de Matam qui n’auraient aucune perspective de développement social, mais aussi sur « l’iniquité sociale » qui prévaudrait dans les départements de Ranérou Ferlo et de Kanel. Le gynéco dénonçait aussi le nombre important de décès dans la zone, la surcharge de travail dans les établissements de santé « au moment où des agents affectés ne remplissent jamais leur devoir ». Avant de développer sa pensée, le spécialiste avait tenu à préciser que « ce n’est pas le chef du service de la gynécologie obstétrique de l’Eps 2 de Matam ni le président de la commission médicale du même EPS, encore moins le secrétaire général du Syndicat autonome des médecins, pharmaciens et chirurgiens-dentistes du Sénégal zone de Matam qui parle ». Que c’est « Mamadou Demba Ndour citoyen sénégalais, résidant dans le périmètre communal de Matam depuis 6 ans » qui interpelle le chef de l’Etat,
Le citoyen et non le chef de service
Sauf que ce « citoyen sénégalais résidant à Matam » a semblé, dans sa prise de position, provoquer son directeur pour avoir évoqué un point relatif à une délibération du Conseil d’administration dudit hôpital sur les indemnités de logement des agents de l’hôpital. « Je suis très heureux de vous avoir comme président du conseil départemental de Matam et de droit, Pca de l’Eps2 de Matam mon hôpital, avec vous, je suis sûr qu’on n’aura plus de fausse délibération du Conseil qui dépouille des médecins de leur logement par nécessité de service au profit d’administratifs », a-t-il ironisé. Une provocation qui n’est pas restée sans suite. Une semaine après cette publication interpellative et provocatrice, le chef du service de gynécologie de l’hôpital régional de Matam a reçu une demande d’explication signée par son directeur. Un courrier auquel il n’a pas jugé nécessaire de répondre normalement. « Monsieur le directeur, par courrier administratif, vous demandez au chef de service de Gynécologie obstétrique de s’expliquer sur une prise de position publique de M. Mamadou Demba Ndour. Je vous informe que le chef de service que vous interpellez n’est nullement concerné par les faits rapportés dans votre demande d’explications. Merci de bien vouloir interpeller la bonne personne », a répondu sèchement le gynéco. Un retour de courrier qui n’a pas semblé agréer le directeur de l’hôpital de Matam qui a infligé un « premier avertissement » à l’impertinent. Avec la précision qu’il s’agit d’une « sanction disciplinaire » qui va être inscrite dans le dossier personnel du gynécologue. « Il est constaté qu’à travers une publication dans le canal des réseaux sociaux pour vous attaquer publiquement aux institutions notamment le centre hospitalier régional de Matam. Dans votre interpellation, est inscrite une délibération d’une réunion du Conseil d’administration dont vous êtes administrateur et tenue le 23 février 2021 », a noté le directeur de l’hôpital comme faits reprochés à son chef de service. Selon lui, Dr Ndour s’est rendu coupable de « violation flagrante du secret des délibération » en tant que membre du Conseil d’administration. Plus grave, estimet-il, les propos tenus dans la publication du « citoyen sénégalais résidant à Matam » terniraient l’image de l’hôpital car « exposés d’une manière négative ». Ce qui lui a donc valu une demande d’explication suivie d’un avertissement. Avec la précision que « si de tels faits se renouvelaient ou à l’occasion de toute nouvelle faute, la direction de l’hôpital entend prendre une « sanction plus grande ». Sans se laisser démonter, le gynécologue a qualifié la « sanction de nulle, et de nul effet » tout en invitant son employeur à « aller jusqu’au bout de sa logique ». Il a aussi soutenu que nul ne peut salir son dossier personnel. Et que « le citoyen Mamadou Demba Ndour continuera à jouir de ses droits constitutionnels ».
Dr Ndour : « C’est un prétexte pour me museler »
Alors que son directeur, Dr Aladji Ndiaye, parle de faits liés à sa publication sur Facebook, Dr Ndour considère que ce n’est qu’un prétexte pour le museler. D’après ses dires, cette affaire serait plutôt liée à sa position sur l’octroi d’indemnité de logement au directeur de l’hôpital. « Alors qu’il n’y a pas le droit », soutient-il en expliquant que le post sur la venue du président de la République à Matam ne serait qu’un prétexte pour museler un gêneur. « Ils ont profité de ce texte pour instrumentaliser le directeur avec qui j’ai eu un contentieux lors d’une réunion du Conseil d’administration de l’hôpital. Il demandait une indemnité de logement. Et moi, j’étais contre parce que les directeurs d’hôpitaux n’ont pas droit à une indemnité de logement. Ils ont juste un appui au logement que leur décerne le Conseil d’administration. Quand je me suis opposé, il a boudé la réunion. Après ils (lui et son chef de service administratif qui tiennent le secrétaire de séance) ont fait signer au président du Conseil d’administration (Pca) une fausse délibération. Ils ont brandi ce faux document de délibération et sont venus semer la zizanie à l’hôpital. Avec un huissier de justice, ils ont débarqué la nuit, ont défoncé la porte pour occuper de force le logement du médecin affecté », accuse Dr Ndour
Le directeur de l’hôpital sur cet avertissement
Joint au téléphone à propos de cette sanction infligée à « son » gynécologue, le directeur de l’hôpital de Matam, Dr Aladji Arona Ndiaye, a fait dans le flou. « Je n’ai aucun problème avec Dr Mamadou Demba Ndour. C’est un agent de l’hôpital. Je suis le directeur. Il travaille en tant que chef de service. Il n’y a aucun souci », a-t-il éludé. A la question de savoir pourquoi donc ce « premier avertissement » alors qu’il n’y a aucun problème avec la personne concernée, Dr Ndiaye s’est contenté de répondre que « l’avertissement, c’est dans le déroulement normal des activités d’une entreprise après une demande d’explication. C’est comme le fonctionnement de toute organisation, de toute entreprise régie par texte et des lois ». Autrement dit, circulez il n’y a rien à voir !