AMNESTY VILIPENDE LE SÉNÉGAL AUPRÈS DES NATIONS-UNIES
L'Ong dit être préoccupée par les restrictions inadmissibles au droit de réunion pacifique, le recours excessif à la force contre les manifestants pacifiques, les décès en détention, les arrestations arbitraires
Dans un communiqué de presse parvenu à «L’As», «Amnesty International» dit être préoccupée par les restrictions inadmissibles au droit de réunion pacifique, le recours excessif à la force contre les manifestants pacifiques, les décès en détention, les arrestations arbitraires. L’organisation des droits de l’homme a porté tous ces griefs contre le Sénégal auprès Nations-Unies à travers son examen périodique universel (Epu).
La situation de la justice au Sénégal inquiète «Amnesty International». L’organisation pense que le Sénégal doit faire de la garantie de procès équitables une priorité et qu’il doit mettre fin immédiatement à l’intimidation et au harcèlement des dirigeants de l’opposition. Dans son Examen périodique universel (EPU) soumis aux Nations unies, il a été mis en évidence le dossier de Khalifa Sall, maire de Dakar qui, selon Amnesty, est un exemple de procès inéquitable. Outre le fait qu’il se soit vu refuser à plusieurs reprises la mise en liberté sous caution, l’organisation interpelle les uns et les autres sur son statut de député acquis en juillet 2017, alors qu’il était en détention. En plus, les défenseurs des droits de l’homme estiment que la Cour de justice communautaire de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a jugé que la détention de Khalifa Sall était arbitraire et a fait valoir que ses droits à la présomption d’innocence, à l’immunité parlementaire et à l’assistance de ses avocats avaient été violés.
CAS IMAM NDAO
Un autre cas qui a interpellé la conscience de ces défenseurs des droits de l’homme, c’est le procès pour terrorisme dans lequel imam Ndao et une trentaine de personnes ont été impliqués. Relatant les faits et les abus des forces de l’ordre, «Amnesty International» a indiqué dans son rapport soumis aux Nations-Unies qu’«en juillet 2018, Imam Ndao et ses coaccusés poursuivis pour des infractions liées au terrorisme avaient été détenus pendant plus de 48 heures avant d’être présentés à un juge». L’organisation déplore également le fait qu’Imam Ndao soit présenté à un juge d’instruction 11 jours après son interpellation. Pis, elle dénonce le fait que les forces de sécurité aient refusé de laisser l’Imam Ndao parler à ses avocats pendant les quatre premiers jours de sa détention, non sans s’indigner du fait qu’il soit passé près de trois ans en prison avant d’être acquitté des «accusations de terrorisme».
CAS KARIM WADE
Un dernier cas de procès inéquitable selon Amnesty, c’est celui de Karim Wade condamné en mars 2015 à six ans de prison et à une amende d’environ 210 744 000 euros pour l’acquisition illicite de richesses. Pour «Amnesty International», la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) ne respecte pas les normes internationales et régionales en matière de procès équitable, «d’autant plus qu’elle ne permet pas d’interjeter appel du verdict». Sans compter qu’en avril 2016, le Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire avait estimé que la détention provisoire de Karim Wade était arbitraire, notamment en raison des retards dans les procédures judiciaires et des différences de traitement.
AMNESTY APPELLE LES AUTORITES SENEGALAISES A MODIFIER LES LOIS RELATIVES AU CONSEIL SUPERIEUR DE LA MAGISTRATURE
Ceci étant, «Amnesty International» a laissé entrevoir que l’indépendance judiciaire et l’équité des procès ne peuvent être pleinement garanties dans un pays où le Conseil supérieur de la magistrature compte parmi ses membres le président de la République et le ministre de la Justice. Amnesty appelle les autorités sénégalaises à modifier les lois relatives au Conseil supérieur de la magistrature et au statut des magistrats, afin de destituer le président de la République et le ministre de la Justice dudit Conseil. «Si le Sénégal veut montrer aux Etats membres de l’ONU qu’il est engagé dans la protection et la promotion des droits de l’homme, il doit entreprendre des réformes clés de son système judiciaire. Il s’agit notamment de veiller à ce que les fonctionnaires judiciaires soient en mesure de s’acquitter de leurs fonctions de manière impartiale, indépendante et sans ingérence», lit-on dans la note parvenue à «L’As». Par ailleurs, toujours dans la note de l’organisation de défense des droits humains, il a été dénoncé la répression jugée» de plus en plus intense à l’approche de l’élection présidentielle de 2019. En effet, les défenseurs des droits de l’homme fustigent le fait que les rassemblements pacifiques organisés par les partis politiques ou les défenseurs des droits de l’homme soient souvent interdits et dispersés par la police et la gendarmerie sénégalaises en utilisant «une force excessive». Ils se sont également offusqués de la mort de Fallou Sène des suites de blessures par balle lors d’une protestation contre les retards dans le paiement des bourses d’études au Campus universitaire Gaston Berger à Saint-Louis, réprimée par la Gendarmerie. «A ce jour, aucune information n’indique que le gouvernement cherche activement à établir les responsabilités des auteurs présumés et à les tenir responsables des allégations de recours excessif à la force», souligne-t-on dans la note.
CAS BARTHELEMY DIAS
Aussi, il est indiqué que les autorités continuent également de restreindre le droit à la liberté d’expression et de cibler les artistes, les journalistes, les défenseurs des droits humains et les militants politiques qui expriment leur opposition. «C’est le cas de Barthélémy Dias, maire de Mermoz-SacréCœur. Le 17 avril 2018, Dias a été condamné à six mois de prison pour «outrage au tribunal» pour avoir critiqué la décision du tribunal de condamner le maire de Dakar Khalifa Sall», liton dans le communiqué de l’organisation parvenu à « L’As ». Non sans préconiser, à l’approche des élections de 2019, que le Sénégal garantisse et fasse en sorte que les journalistes, les leaders de l’opposition, les critiques du gouvernement et les défenseurs des droits de l’homme soient libres d’exercer leurs droits à la liberté d’expression, d’association et de réunions pacifiques sans crainte de représailles.