«IL N’Y A PAS MIEUX QUE LES CHEFS RELIGIEUX POUR DECONSTRUIRE LE DISCOURS DE HAINE QUI FAIT DE LA RELIGION UN FACTEUR DE VIOLENCE»
Telle est la conviction du représentant spécial du secrétaire général des nations unies pour l’Afrique de l’ouest et le sahel, Mahamat Saleh Annadif
Pour réussir à consolider la paix en Afrique de l’ouest et dans le sahel, l’implication des chefs religieux s’avère nécessaire voire primordiale. Telle est la conviction du représentant spécial du secrétaire général des nations unies pour l’Afrique de l’ouest et le sahel, Mahamat Saleh Annadif qui, lors du séminaire régional sur «la contribution des acteurs religieux à la consolidation de la paix, la prévention et la résolution des conflits en Afrique de l’ouest et au sahel», a invité les chefs religieux à dé- construire le discours de haine qui fait de la religion un facteur de violence.
Promouvoir le dialogue inclusif entre tous les acteurs en tenant compte des réalités et contraintes des pays de la région, c’est l’objectif du séminaire initié par le Bureau des Nations unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (Unowas). Lancé hier par Mahamat Saleh Annadif (représentant spécial du secrétaire général de l’Unowas), cet atelier va réunir pendant deux jours tous les acteurs, chefs coutumiers et chefs religieux sur la thématique de la «Contribution des acteurs religieux et traditionnels à la consolidation de la paix, la prévention et la résolution des conflits en Afrique de l’Ouest et au Sahel».
Selon Mahamat Saleh Annadif, cette rencontre permettra de créer un cadre pour promouvoir l’implication des leaders religieux et traditionnels dans les efforts de consolidation de la paix. «Il y a des crises au niveau du Sahel qui tendent de plus en plus vers les pays côtiers et qui représentent aujourd’hui l’un des plus grands défis au niveau de la sous-région», a indiqué le représentant du secrétaire général de l’Unowas.
Convaincu que le monde entier est à la recherche de solutions, il révèle que les populations concernées n’ont pas été suffisamment écoutées dans cette recherche de sortie de crise. Ainsi, il estime que les religieux et les chefs coutumiers sont la couche la plus en contact avec la population. Dès lors, il juge important de les écouter et de voir quelle est leur compréhension du problème et ce qu’ils peuvent suggérer comme réponse ou solution qui pourra entrer dans une contribution globale. «A l’issue de cette rencontre de deux jours, un réseau d’échanges et de partage d’expériences entre acteurs religieux, de la société civile et décideurs sera lancé autour d’une plateforme régionale. Et nous allons discuter avec les décideurs de la sous-région pour voir comment relayer ce message et le porter au niveau décisionnel pour que leur contribution puisse être prise en compte dans la recherche de solutions», affirme-t-il.
Selon lui, l’implication des religieux dans le processus de paix est très importante. D’autant que le message du religieux est de clarifier un certain nombre d’assertions tel que le djihadisme. Relevant une instrumentalisation de la religion, monsieur Annadif pense qu’il n’y a pas mieux placés que les chefs religieux pour déconstruire ce discours de haine qui fait de la religion un facteur de violence. L’autre cible de cette réflexion, ajoute t-il, demeure les jeunes qui souvent sont des victimes mais aussi des acteurs, du fait du chômage et d’un manque de repères. «Ces jeunes sont souvent instrumentalisés et recueillis par les terroristes», dit-il. Dès lors, il propose de les écouter, de les sensibiliser et de les aider à sortir de ces terreaux dans lesquels ils sont enfermés parce qu’ils sont de vrais otages. «Nous serons l’intermédiaire entre les autorités étatiques et ces légitimités traditionnelles et religieuses. Car il est de notre responsabilité de relayer et d’amplifier ce message.» Par ailleurs, il considère que le dialogue entre les générations, de même que l’approche prospective sur l’avenir de la jeunesse de la région face aux incertitudes liées à l’insécurité et aux nombreux défis socioéconomiques et politiques, est essentiel.
BAKARY SAMB : «NOS ATTENTES, C’EST D’ECOUTER CES LEADERS TRADITIONNELS ET RELIGIEUX… POUR QUE LA PAIX REVIENNE»
Facilitateur de cette rencontre, le directeur de Timbuktu Institute se félicite de cette rencontre qui, selon lui, est une grande première. En effet, précise Bakary Samb, cet atelier sera l’occasion d’amorcer une réflexion dont les résultats édifieront sur la suite à donner. «Les religieux ont tout le temps été impliqués dans le dialogue national inclusif, mais il urge de réfléchir au niveau régional pour voir la spécificité de tous les pays afin de voir, aussi bien dans les pays côtiers que les pays sous menace, une stratégie de sortie de crise. Nos attentes, c’est d’écouter ces leaders traditionnels et religieux, écouter leurs avis pour inclure leurs observations et leurs suggestions dans les stratégies à élaborer pour que la paix revienne et que la stratégie soit de mise dans les régions du Sahel. Pour y parvenir, nous avons invité d’éminents chercheurs et des acteurs venant de toute la sous-région, aussi bien traditionnels que religieux», déclare Bakary Samb.