LA RÉVOLTE DES FEMMES
«Dafadoy» («Ça suffit», Wolof). C’est la révolte des femmes pour dénoncer les agressions, viols, violences et meurtres dont elles sont victimes, particulièrement les petites filles.
Elles ont exprimés leur ras-le-bol à travers le sit-in du Collectif contre les violences faites aux femmes et aux enfants organisé un avant-hier, samedi 25 mai, à la Place de la Nation (ex-Obélisque). Ce collectif qui appelle à la «criminalisation» du viol et à la «tolérance zéro» peut compter sur les femmes parlementaires, dans ce combat. En attendant, Ziguinchor et Tambacounda ont aussi dit «halte, ça suffit !» (Voir par ailleurs)
«Nous demandons que le viol soit criminalisé et la tolérance zéro pour protéger les femmes et les enfants d’une destruction physique et mentale qui leur coûte de plus en plus la vie à la fleur de l’âge». C’est le Collectif contre les violences faites aux femmes et aux enfants qui élève ainsi la voix pour dire halte à la série de viols et meurtres dont sont victimes ces couches vulnérables de la population, scandant «dafadoy !» («Ça suffit !», en Wolof). C’est dans un mémorandum lu par Elyas Ndoye, une de ses membres, et signé par une quarantaine d’associations et de plateformes regroupant des organisations et des mouvements de femmes, lors d’un sit-in tenu à la Place de la Nation.
A travers cette manifestation, le collectif dénonce une série de meurtres enregistrés au Sénégal, notamment celui de Bineta Camara à Tambacounda, une affaire qui a particulièrement ému plus d’un à travers le pays et dans la diaspora.
Selon l’Agence de Presse sénégalaise (APS), le collectif a, par la même occasion, appelé «l’Etat à renforcer son arsenal juridique et institutionnel pour protéger les droits des femmes et des enfants». Aussi a-t-il exhorté «la population à briser le tabou pour éviter le +neup neupal+ (étouffer l’affaire) qui ne fait qu’aggraver le problème. La protection des femmes et des enfants est l’affaire de tous et nous disons stop aux violences qui leur sont faits». Les membres du collectif restent convaincus que «la solution est de mettre fin à ce fléau notamment par la mise en place d’une stratégie efficace de la part des pouvoirs publics, de la société civile et impliquant les populations».
CRIMINALISATION DU VIOL : DES FEMMES PARLEMENTAIRES PORTENT LE COMBAT
L’appel des manifestants est entendu par les femmes parlementaires qui s’engagent à porter le combat à l’Assemblée nationale pour que «le viol soit criminalisé». «En tant que parlementaires et en tant que femmes, nous avons bien entendu ce qui est dit dans le mémorandum et nous vous donnons l’assurance qu’à l’Assemblée nationale, nous allons porter le combat pour qu’on aille vers la criminalisation du viol», a déclaré Awa Guèye, la vice-présidente de l’Assemblée nationale, au nom de la délégation de ce parlement.
Et la parlementaire qui a reçu un mémorandum dans lequel ce collectif exige des mesures concrètes et urgentes pour faire face à la recrudescence des violences faites aux femmes et aux enfants de donner des gages. «Chères sœurs, chères filles chères nièces, nous vous disons que nous sommes uniques, nous pleurons la même chose et nous vous donnons notre engagement que ce combat nous allons le mener ensemble. Dès lundi (aujourd’hui, Ndlr), s’il plait au Bon Dieu, vous allez entendre la voix des femmes parlementaires pour que le viol soit criminalisé, une bonne fois pour toute».
Auparavant, Mme Awa Guèye qui dit «compatir à la douleur de toute femme ou jeune fille qui est victime de violence», a présenté par la même occasion «ses condoléances à toutes les familles éplorées». Non sans insister sur la nécessité de retourner à nos valeurs éthiques et morales et sensibiliser davantage la population sur les valeurs comme la dignité, l’intégrité, le respect de la vie humaine. «Je me demande ce qui est arrivé au Sénégal et à notre population si c’est un ami qui viole et tue ton enfant, si c’est ton chauffeur qui t’égorge et c’est ton voisin qui tue ton enfant», s’interrogée la parlementaire. Allusion aux meurtres de Bineta Camara (tuée par un proche de son propre père) et l’ancienne 5ème vice-présidente du Conseil économique, social et environnemental (CESE), Fatoumata Matar Ndiaye égorgée par son propre chauffeur, Samba Sow, en fin mai 2017.
TAMBACOUNDA : Des centaines de manifestants disent «Non, ça suffit !»
Des centaines de manifestants ont marché dimanche dans les rues de Tambacounda (Est) pour dénoncer la recrudescence des agressions sexuelles, des viols suivis de meurtre dans le pays. En majorité des femmes, les manifestants ont dit “Non aux agressions et les violences faites aux femmes”. “Ça suffit !”, c’est le slogan de plusieurs manifestants qui ont sillonné depuis 8 heures, des quartiers de la commune avant d’arriver devant la gouvernance, point de chute. “Beaucoup de femmes et de jeunes filles sont victimes de violences physiques ou sexuelles, de crimes ou de mutilations génitales”, a déclaré la porte-parole, Fatoumata AÏdara.
Cette manifestation est organisée suite à la mort d’une jeune fille, Binta Camara, tuée samedi dernier dans son domicile, à Tambacounda. “Nous dénonçons l’assassinat de notre sœur Binta Camara, une fille bien, pieuse et très courtoise. Il est temps que cesse la violence sur les femmes et les jeunes filles”, a indiqué Mme Aïdara. A travers un mémorandum, elle sollicite la mobilisation de tous pour mettre fin aux violences physiques et morales que subissent les femmes depuis quelques moments. “Nous jugeons indispensable de faire progresser les normes sociales liées au genre et promouvoir le respect entre les hommes et les femmes”, a-t-elle fait savoir. Les manifestants réunis autour d’un comité, comptent lancer une campagne dans le département pour alerter sur l’ampleur des nombreuses violences faites aux femmes.
Ibrahima DIALLO