LE GROS COUP DE L’OPÉRATION BENKADI
La porosité des frontières entre les pays de l’Afrique de l’Ouest a poussé l’Organisation des Nations Unies contre la Drogue et la criminalité et la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest à apporter une réponse urgente à cette situation

Après «Open Roads» qui concernait le Sénégal, la Gambie et la Guinée-Bissau, l’Organisation des Nations Unies contre la Drogue et la criminalité a mis en place, en avril dernier, l’Opération Benkadi pour lutter contre les différents trafics opérés dans les frontières du Mali, du Burkina Faso et de la côte d’Ivoire. Jugés positifs, les résultats ont été présentés, hier, à Dakar lors d’une réunion de débriefing. En plus des arrestations, les forces de sécurité participant à cette opération ont procédé à des saisies de cannabis, de faux médicaments, de détonateurs et de voitures volées.
La porosité des frontières entre les pays de l’Afrique de l’Ouest a poussé l’Organisation des Nations Unies contre la Drogue et la criminalité (Onudc) et la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) à apporter une réponse urgente à cette situation. Ainsi, les deux organisations sont lancé conjointement, en 2015, le projet en support Plan d’Action de la CEDEAO sur le trafic illicite de drogues, la criminalité organisée en Afrique de l’Ouest. C’est dans ce cadre qu’a été mise en place l’Opération Benkadi qui signifie en Dioula «l’Union fait la force» pour sécuriser les frontières du Burkina Faso, du Mali et de la Côte d’Ivoire. «L’opération vise à renforcer la coopération transfrontalière et la coordination relatives au trafic illicite de drogues et autres. Elle est basée sur une précédente opération réalisée dans la sous-région, l’Open Roads qui a également soutenu la coopération transfrontalière entre le Sénégal, la Gambie et la Guinée Bissau», a indiqué Cheikh Ousmane Touré, le coordonnateur régional du Programme d’appui sur les questions relatives au trafic illicite à la CEDEAO. Pour lui, «l’ouverture des frontières devrait être balancée par une approche sécuritaire pour que les communautés soient parfaitement à l’aise dans leur environnement, libres, sans crime et sans abus», dit M. Touré.
D’après ses initiateurs, l’opération Benkadi a produit des résultats globalement positifs. Du 8 au 12 juillet 2019, les agents d’application qui ont participé à cette opération ont procédé à l’arrestation de 15 personnes, à l’identification et au sauvetage de 33 mineurs victimes potentielles de traite d’êtres humains pour se faire exploiter dans les mines d’or du Mali. Au cours de cette opération, les 320 officiers ont saisi 17 kilogrammes de cannabis, plus d’un kilogramme d’amphétamines et 6,5 tonnes de faux médicaments, 33 bâtons de dynamites, 10 détonateurs, 50 kilogrammes de mèches explosives, 1 carabine avec des munitions au nombre de 789 et 18 voitures de luxe volées.
«Ces résultats démontrent qu’il y a beaucoup de crimes qui se passent dans nos frontières et que les Etats doivent être sensibilisés à donner beaucoup de moyens aux vaillantes forces d’application de la loi pour qu’elles puissent bien faire leur travail», a déclaré Cheikh Ousmane Touré. En plus de ces actions, les agents d’application de la loi se sont concentrés sur l’échange d’information. «On doit décloisonner et être franc et honnête quand il le faut. Ce n’est pas une question d’uniformes ou d’unités, cette lutte doit être coordonnée à la manière de ce qu’a fait le Sénégal, c’est-à-dire impliquer dans ce travail la Police, la Gendarmerie, les Eaux et Forêts et les Douanes pour trouver une plateforme de communication d’échanges, mais aussi prendre les informations au niveau des pays et les transmettre au plan régional. Cela permettra par exemple au Sénégal de communiquer avec la Mauritanie, le Mali, la Gambie ou la Guinée-Bissau», a indique M. Touré.
«L’Opération Benkadi ainsi que la précédente, Open Roads, ont démontré l’importance de la coopération institutionnelle entre les pays voisins et la nécessité d’obtenir des informations et des modus opérande des trafiquants, techniques et routes utilisées afin de mettre en place des stratégies d’interception spécialisées», souligne le représentant de la Police des Nations Unies (UNPOL) et de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la Stabilisation au Mali(MINUSMA), Saidou Sam. L’Opération Benkadi a vu la participation de près de 320agentsde18agencesd’application de la loi. Elle a couvert 19 postes et axes frontaliers terrestres se situant dans les trois pays concernés.