LES POPULATIONS LOCALES ETALENT LEURS GRIEFS À KÉDOUGOU
Entre les populations locales et les sociétés minières de Kédougou telles que Sabadola Gold Operation (SGO) ou Petowal Mining Company (PMC), les rapports deviennent de plus en plus tendus à cause de l’employabilité des jeunes
Entre les populations locales et les sociétés minières de Kédougou telles que Sabadola Gold Operation (SGO) ou Petowal Mining Company (PMC), les rapports deviennent de plus en plus tendus à cause de l’employabilité des jeunes, de l’achat des produits auprès des fournisseurs locaux ou encore des problèmes liés à la faible rémunération.
I l ressort du dernier rapport de l’Initiative pour la transparence des industries extractives (ITIE), tenu à Kédougou le 17 décembre 2020, que « les revenus générés par le secteur extractif sont passés de 122 milliards FCFA en 2018 à 161 milliards FCFA en 2019 ». Autrement dit, « les revenus ont suivi les tendances haussières des productions des différentes substances combinées à une bonne tenue des prix de vente desdites substances sur le marché. En effet, la production d’or est passée de 12,5 tonnes (402 231 onces) en 2018 à 12,9 tonnes (415 335 onces) en 2019 avec l’augmentation de la production de la mine de Mako (PMC) à côté de celle de Sabadola (SGO) ».
Aussi, dans le chapitre contenu local dudit rapport, il est mentionné que « les entreprises pétrolières et minières du périmètre de réconciliation emploient 7951 personnes soit au total 0,19% du total de la population active au Sénégal. La majorité des effectifs, soit 95%, sont des nationaux. Le secteur minier artisanal emploie 31359 personnes soit 0,74% de la population active ». Quant au montant payé aux fournisseurs, il s’élèverait à « 891 milliards dont 216 aux entreprises locales ». Or, ici à Kédougou, ces chiffres contrastent à tort ou à raison avec la situation tendue qui prévaut entre les populations locales qui revendiquent plus d’inclusion dans l’employabilité des entreprises minières et les entreprises minières de la région. En effet, samedi dernier, les populations de la commune de Tomboronkoto (localité abritant la mine de Petowal Mining Company-ndlr) sont montées au créneau lors d’une marche de contestation pour dénoncer entre autres les faibles emplois indirects ou encore le faible achat des entreprises en produits locaux.
PLAIDOYER DES MANIFESTANTS CONTRE PMC
Dans le mémorandum lu par l’un des responsables de la jeunesse de Tomboronkoto Mamadou Lamine Diallo, il est mentionné que « nous n’avons pas seulement besoin des emplois directs, mais nous avons besoin aussi des emplois indirects à travers les achats locaux et la production locale. La société avait promis d’acheter les produits locaux, d’accompagner la production locale. Mais nous avons aujourd’hui des restaurants qui ont fermé parce qu’ils n’ont plus de clients, des logements fermés pour la même cause, des produits qui connaissent une mévente. La population de Tomboronkoto est prête à faire face jusqu’à ce que satisfaction s’en suive ».
Prenant la parole, Bala Moussa Dafé est revenu sur les supposés emplois annoncés par la société PMC : « la société se vante en disant qu’elle emploie 300 voire 400 personnes, il y a certaines politiques qu’on met en place pour régler certains problèmes mais leur mise en œuvre fait que la situation empire. C’est ce qui se passe avec PMC. Le favoritisme dont elle fait montre lors des recrutements est palpable. A cela s’ajoutent les salaires misérables payés aux employés. Nous n’en voulons pas ».
A sa suite, Idy Diallo, l’un des responsables de la jeunesse de Tomboronkoto, prenant part à la marche sous les hourras galvaniseurs de la foule, a dénoncé jusqu’à la dernière énergie les écarts entre les chiffres annoncés dans le rapport ITIE et les réalités du terrain. Selon lui, « les sociétés minières de Kédougou ont eu des recettes qui avoisinent les 277milliards en 2020. Un focus est mis sur les emplois indirects par le biais des achats locaux et de contribution à asseoir une économie locale vivante. Les sociétés minières paient 897 milliards aux fournisseurs, 92 milliards en salaires. Il urge donc d’accélérer les achats locaux et de les rendre possibles localement. Au total, Sabadola et Pmc ont payé 1.567.908.142 francs aux fournisseurs de Kédougou, contre 35.542.974.849 francs aux nationaux et 115.326.936.160 francs aux étrangers. Autrement dit, la part de Kédougou dans les achats avec PMC est de 532.290.547 et moins de 30 millions pour la commune de Tomboronkoto ». M. Diallo de poursuivre : « malgré tout cela, ils vont crier sur tous les toits qu’ils travaillent avec les fournisseurs de la commune de Tomboronkoto, nous les défions à publier la liste des fournisseurs d’ici. Nous dénonçons par ailleurs le lobbying, les rétrocommissions et le manque de volonté de PMC. Ils sont dedans et ils ont des entreprises dehors ».
REPLIQUE DU RESPONSABLE RH
Réagissant aux accusations portées à l’encontre de la société PMC dont il a en charge le département des ressources humaines, Kassélé Traoré de dédouaner : « si l’on devait parler de favoritisme, ce serait à leur profit. Il n’y a aucune famille de Mako ou des villages environnants d’où ne provient pas un travailleur. Il y a même des familles d’’où nous viennent deux ou trois travailleurs de la mine. C’est leur droit de faire la marche et de s’exprimer ; on ne peut s’y opposer. De notre côté, nous avons des statistiques très satisfaisants. Plus de 56% des travailleurs de cette entreprise viennent de Kédougou et les 50% de cet effectif viennent de la commune. Eux-mêmes parlent de discrimination positive. A compétences égales, on leur donne la priorité ».Pour rappel, le 9 avril dernier, l’Association des Élèves et Étudiants Ressortissants de Kédougou (AEERK) avait organisé une manifestation au cours de laquelle les étudiants venus de partout à travers le Sénégal avaient rallié la région collinaire pour manifester leur désarroi et crier leur ras-le-bol face à la problématique de l’employabilité des jeunes surtout dans les sociétés minières, l’inertie des autorités face à leurs souffrances.