UN NOUVEAU SCANDALE EN GESTATION ?
L’éthique est mise à rude épreuve dans l’achat des vivres destinés à l’aide alimentaire d’urgence aux populations. La tonne de riz est achetée à 275.000 FCFA alors que le prix homologué est de 240.000 FCFA pour l’importation
L’éthique est mise à rude épreuve dans l’achat des vivres destinés à l’aide alimentaire d’urgence aux populations. Même si le décret du Président Macky Sall extirpe l’opération du Code des marchés publics, la morale voudrait que les prix d’achat des vivres ne soient pas supérieurs aux prix homologués par le ministère du Commerce. Or, la tonne de riz est achetée à 275.000 FCFA alors que le prix homologué de la tonne du riz brisé non parfumé est 240.000 FCFA pour l’importateur. Une différence qui révolte des experts du secteur du commerce.
La polémique autour des marchés de vivres dans le cadre de la résilience de la pandémie du coronavirus est loin de s’estomper. Même si le débat sur la transparence des marchés semble être dépassé depuis la sortie du ministre du Développement communautaire, de l’Equité sociale et territoriale, Mansour Faye, une autre controverse fait jour. Il s’agit de celle liée à l’éthique. Sur le plan, en effet, de la légalité dans l’attribution des marchés du riz, du transport, de l’huile et du sucre, le ministre Mansour Faye est inattaquable. Puisqu’il peut opposer à ses détracteurs le décret n°2020-781 du 18 mars 2020 qui soustrait les travaux, les fournitures et les prestations de services réalisés dans le cadre de la lutte contre le Covid-19 du Code des marchés publics. N’empêche sur le champ de l’éthique, soulignent des experts en marchés publics et en commerce, le ministre du Développement communautaire, de l’Equité sociale et territoriale est blâmable. Ils reprochent à Mansour Faye d’avoir acheté par exemple le riz à des prix supérieurs à ceux homologués par le ministère du Commerce.
Citant en effet le tableau des prix administrés à Dakar depuis 2013 (arrêté 01294 du 1er 08 2013), nos interlocuteurs indiquent que la tonne de riz brisé non parfumé coûte 240.000 FCFA. Il s’agit du prix importateur. Le prix grossiste est de 245.000 FCFA la tonne et le prix détaillant est de 260 FCFA le kilogramme. Or, la tonne de riz a été achetée par le gouvernement à 275.000 FCFA la tonne. Un prix bien supérieur à celui homologué par le ministère du Commerce. Idem pour le sucre dont la tonne à l’import ou usine est vendue à 545.000 FCFA, soit 27.250 FCFA le sac de 50 kg, le prix grossiste à 27.750 FCFA le sac de 50 kg et 575 kg le kilogramme au détail.
Quant à l’huile, le prix de la dosette de 250 ML à l’import est de 260 FCFA, il évolue à 270 FCFA chez les grossistes et 290 FCFA au détail. En plus de la problématique des prix, nos interlocuteurs renseignent que les 100.000 tonnes de riz achetées par le gouvernement n’est pas disponible au Sénégal. Parce qu’il y a deux stocks de riz à savoir le riz qui se trouve dans les entrepôts et celui sous douane. Ils rappellent que le Sénégal consomme 150.000 tonnes en trois mois.
D’ailleurs, le bateau qui doit compléter le tonnage de riz acheté par le gouvernement arrive, d’après nos sources, le 30 avril et le 15 mai prochain. Malgré ces écarts de prix, des experts en marchés publics dédouanent Mansour Faye. A les en croire, on ne peut pas parler de surfacturation dans l’achat des vivres parce qu’on n’est pas dans le champ des marchés publics. D’ailleurs, ils pensent que c’est Mansour Faye qui s’est compliqué la tâche en lançant un avis de commande comme s’il s’agissait de marchés publics. Or, le décret cité plus haut lui facilite l’opération. Ce qui fait que l’opinion analyse l’achat des vivres sous l’angle des marchés publics.
LE MINISTRE DU COMMERCE ECARTE DE BOUT EN BOUT
Autres effluves de scandales dans cette affaire de marchés de denrées de première de nécessité, il y a le fait d’octroyer des marchés à des proches souvent pas qualifiés, à un prix supérieur aux prix homologués depuis 2013. Dans le cas du riz, en dehors de Moustapha Ndiaye qui, quoique proche de Me Oumar Youm, est un homme du sérail, qui exploite le riz Buffalo, les autres n’ont pas la qualité à moins qu’ils ne servent d’écran. « Voyez-vous, le riz de Hachem, c’est en réalité la marque Big Jo qui est une propriété de Luis Dreyfus Comodity appartenant à Bourgi. Quand au gars de Koungheul, tout le monde sait qu’il n’est pas importateur. Je suis dans le secteur depuis deux décennies, je n’ai jamais rencontré ces deux», a confié, scandalisée, notre source. Quid du sucre et de l’huile ?
Notre interlocuteur qui promet des révélations sur l’implication de gros bonnets dans ces marchés aux relents de deal, déclare : « Comment peut-on donner le marché de sucre à un importateur, Idy Thiam en l’occurrence, alors qu’il y a 40 000 tonnes de sucre en souffrance à Richard Toll ? On parle même de la fondation Servir le Sénégal également dans l’huile. Mais ce qu’il faut retenir, c’est que pour réussir leur forfait et ne pas respecter les prix du marché, ils ont écarté le Ministère du Commerce qui homologue les prix. Donc, le gouvernement achète le prix au détail pour l’offrir aux populations. Ce sont les entreprises qui s’enrichissent sur le dos du contribuable qui va encore payer les dettes. A quelle fin si ce n’est dans l’espoir de recevoir une ristourne ?» tacle notre interlocuteur.