PARCOURS ATYPIQUE D'UN JUGE REBELLE
Ibrahima Hamidou Dème, magistrat, enseignant
La décision du magistrat Ibrahima Hamidou Dème de démissionner du Conseil supérieur du magistrat (Csm) a secoué le coeur de la république. de l'avis de beaucoup de ses proches et amis, sa décision est loin d'être une surprise connaissant son attachement aux vertus et l'essence même de la justice. Né en 1975 à Thiès, le jeune Ibrahima Dème s'est toujours distingué par son intégrité et sa droiture dans l'exercice de ses fonctions. Greffier à 23 ans, commissaire aux enquêtes économiques, puis magistrat à 29 ans, dème est aussi enseignant à la Faculté de droit.
Le temple de Thémis a désormais une vedette. Les magistrats, un héros. L'homme vient de faire voler en éclats la chape de plomb qui jusque-là recouvrait le fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature (Cms). Une véritable énigme pour le Sénégalais lambda.
Les mots couchés par Ibrahima Hamidou Dème dans sa lettre de démission ont mis en lumière les "dysfonctionnements" de cette illustre institution. Si jusqu'à présent, la sacro-sainte obligation de réserve a étouffé les colères et ressentiments des membres du Csm, Ibrahima Dème vient de lever un coin du voile. Les convictions du Substitut général à la Cour d'appel de Dakar ont pesé plus lourd que les privilèges liés à sa fonction.
Ce lanceur d'alertes, en toge, liste dans sa missive adressée, à Macky Sall, les "manquements" de cette structure qui, selon lui, est aux antipodes de ses missions. Ibrahima Hamidou Dème a choisi de troquer ses privilèges pour ses idéaux. De jeune premier promis à un bel avenir, il passe rapidement de paria de la République. Déclenchant au passage la colère de Me Sidiki Kaba, ministre de la Justice, qui déplore sa sortie médiatique. Il la qualifie de campagne de "désinformation".
Le garde des Sceaux et Vice-président du Csm parle de violation de textes qui régissent le fonctionnement de la Magistrature. Pour la robe noire, les agissements d'Ibrahima Hamidou Dème constituent un vrai manque de respect, voire même une "insulte" pour toute la Magistrature. Des critiques qui ne semblent pas avoir entaillé l'armure de ce "chevalier blanc" qui a décidé de se mettre au service de Dame Justice.
De l'avis de ses amis, Ibrahima Hamidou Dème apparait comme un homme de principe, dévoué intégralement à l'exercice de la Justice. Ce pulaar bon teint dont les origines remontent dans le Mboumba (Fouta) voit le jour en 1975 à Thiès.
Le jeune homme trace rapidement et sûrement son cursus "scolaire" qui le conduit rapidement sur les bancs de la Faculté de Droit de l'Ucad. Les amphithéâtres et les bibliothèques de la Faculté seront le terrain de jeu favori de ce "surdoué". Il intègre la première promotion du Centre de formation judiciaire (Cfj) avec 8 autres camarades de promotion en 1995. Deux années plus tard, il sort comme greffier à l'âge de 23 ans.
Des années remplies de souvenirs pour le jeune Thiessois qui côtoie dans l'enceinte de l'Enam, Serigne Bassirou Guèye (procureur de la République), Maxime Jean Simon Ndiaye (Secrétaire général de la Présidence) alors en formation. Il est affecté au Tribunal de Dakar pour son premier poste de greffier. Les affectations à Thiès et plus tard de Saint-Louis en tant que magistrat ne le détournent pas des études.
La détermination chevillée au corps, Ibrahima Hamidou Dème, maîtrisard en Droit, redouble d'efforts et de travail. Il réussit au concours direct de l'Ecole nationale d'Administration (Ena). Il débute la formation de Commissaire aux enquêtes économique avant d'abandonner ce cursus pour intégrer encore le Cfj qu'il venait de réussir la même année. Cette fois-ci, il suit une formation en magistrature.
Du siège au parquet, le début de la rebellion
Durant sa formation, Ibrahima Dème apparait comme un homme de convictions qui ne craint point de défendre ses principes. Selon certaines indiscrétions, sa réputation d'homme intransigeant et incontrôlable pousse les autorités à l'affecter comme parquetier alors qu'il était juge du siège lorsque en 2006, lors d'une Assemblée générale de l'Ums, il s'est attaqué à la gestion "nébuleuse" des budgets par les chefs des juridictions.
Mais puisqu'il aime les défis, il poursuit sa formation et devient spécialiste du droit des enfants. Ses collègues de travail louent son intégrité et sa droiture. Doté d'une forte indépendance d'esprit, il ne transige jamais avec la vérité nous souffle- t-on.
Ibrahima Hamidou Dème voue un culte et une dévotion à l'exercice de la justice. Un choix qui a poussé le plus jeune membre du Cms à claquer la porte de cette prestigieuse institution. Un acte qui le place malgré lui comme une icône de la nouvelle génération de magistrats qui dénoncent l'inféodation du pouvoir judiciaire face à l'exécutif.
Ibrahima Hamidou Dème se veut droit dans ses bottes comme dans ses croyances. Des certitudes qui poussent cet homme marié et très pieux à ne point être intimidé par toute cette polémique.