QUAND DES PILOTES CERTIFIENT L’EXPERTISE AVEREE DE L’ARMEE DE L’AIR
Entretien et maintenance des aéronefs militaires
Mercredi 14 mars dernier, peu après 20h, un hélicoptère de transport de l’Armée (Type Mi-17) reliant Ziguinchor à Dakar s’est écrasé dans la mangrove de Missirah, une localité située dans la région de Fatick. Un crash qui a fait huit (08) morts et douze (12) blessés ou rescapés. Un accident d’aéronef banal comme on en enregistre assez souvent dans les pays les plus développés voire les berceaux de l’avion (Usa, Russie, France, Angleterre, Brésil etc). A preuve, le lendemain de ce crash, on apprenait qu’un hélicoptère de l’armée américaine s’était écrasé en Irak et qu’il n’y avait eu aucun survivant. Pour dire qu’il n’est pas question de remettre en cause l’expertise avérée de l’Armée sénégalaise dont l’entretien et la maintenance des aéronefs ne souffrent d’aucun manquement. D’ailleurs, les rares accidents que l’Armée de l’air a connus étaient souvent causés par des erreurs de pilotage ou de mauvaises conditions climatiques. Voire des situations de guerre comme pour l’hélicoptère « Puma » qui s’était écrasé lors de l’opération « Fodé Kaba 2 » en Gambie en 1981. Un appareil aux commandes duquel se trouvait le capitaine Mame Andallaye Cissé dont la base aérienne de Ouakam porte d’ailleurs le nom. Enquête du « Témoin » chez d’anciens pilotes militaires à propos des crashs d’hélicos de l’armée sénégalaise.
Un aéronef qui tombe du ciel, la scène est surréaliste au Sénégal ! Et pourtant, cela s’est produit la semaine dernière à Missirah, dans la région de Fatick, où il ne resterait de l’hélicoptère s’étant écrasé qu’une multitude de petites phères de métal et de silicate que l’on a retrouvé éparpillées dans la mangrove. Sur place, les secouristes ont relevé six morts et douze blessés parmi lesquels trois succomberont par la suite. Un triste et lourd bilan puisqu’au delà des passagers civils décédés, l’Armée a perdu tout un équipage composé de brillants et valeureux officiers et sous-officiers. Pourtant, ce bilan, bien qu’élevé, n’est rien par rapport au nombre de morts enregistrées chaque semaine, voire tous les jours que Dieu fait, sur nos routes (25 morts à Sagatta, 10 morts à Touba-Gabou etc). Seulement, cette fois-ci, le choc est beaucoup plus rude puisqu’il s’agit d’un aéronef, plus exactement un hélicoptère de l’Armée de l’air. Il est vrai que nous ne sommes pas habitués aux catastrophes aériennes alors que d’autres pays enracinés dans des cultures aéronautiques et spatiales comme les Usa, la Russie, la Chine, le Brésil, l’Inde etc. en subissent plus fréquemment.
Les citoyens des pays développés pourraient dire férocement que si l’Afrique en général, et le Sénégal en particulier, n’enregistrent pas beaucoup de catastrophes aériennes, c’est parce que le continent ne dispose pas de beaucoup d’avions et d’hélicoptères! Ce qui est vrai. Parmi les autres facteurs explicatifs, il y a le fait qu’au Sénégal comme partout ailleurs en Afrique au sud du Sahara, le réseau routier est incontestablement le plus utilisé. Par contre, en Afrique centrale où l’on trouve des pays aux territoires immenses (Rd Congo, Angola etc.), l’avion reste le mode de transport dominant. Des pays dont les citoyens sont donc exposés aux avions-taxis ou avions-cercueils pilotés par des gens aux qualifications douteuses. L’autre facteur mettant le Sénégal à l’abri des catastrophes aériennes, c’est que la plupart des pilotes militaires et « civils » (démissionnaires) sont de purs produits de l’Armée sénégalaise. Qui dit pilotes militaires, dit forcement l’Armée de l’Air dont les aviateurs ont l’habitude de donner le meilleur d’eux-mêmes en tout temps et en tous lieux, y compris dans les périodes les plus difficiles. Dans les Fokker de transport comme dans les avions de chasse ou de ligne, les pilotes de l’Armée, moulés à bonne école, dotés d’un fort esprit d’équipe et d’un sens réel des responsabilités ont partout fait leurs preuves. Par beau temps comme durant les intempéries.
Par erreur de pilotage, l’hélico du président Senghor s’écrase au Lac-Rose
C’est cela qui explique que depuis 1961, date à laquelle l’Armée de l’air a été créée (plus exactement l’ex-Groupement aérien sénégalais/Gas), il y a eu de rares accidents d’avions. Lesquels ont été causés par des erreurs humaines de pilotage ou des mauvaises conditions météorologiques. L’occasion pour « Le Témoin » de vous révéler un crash d’aéronef militaire jamais été ébruité jusqu’ici. Ou alors jusquelà méconnu du grand public. Un crash survenu deux ans après celui de l’hélicoptère « Puma » perdu à Banjul par l’Armée. Ce crash resté secret était survenu en 1983, à une époque où la « censure » prévalait encore et où il n’existait pratiquement que des médias d’Etat. Il s’agit de l’hélicoptère de commandement de l’ancien président de la République Léopold Sédar Senghor. Un appareil de type « Gazelle » que le deuxième président sénégalais, Abdou Diouf, n’avait jamais utilisé. Car sa grande taille ne lui permettant pas d’être à l’aise dans la cabine. Devant effectuer le vol d’initiation ou d’essai à bord de cet hélico, un nouvel équipage formé de trois pilotes de l’Armée dont un mécanicien. Lesquels ont donc décollé à bord de ce « Gazelle » de commandement. Un ancien colonel pilote faisant partie des trois rescapés de ce crash raconte : « Après plusieurs rotations, l’hélicoptère s’est écrasé dans la zone du Lac-Rose (Malika). Tout est allé vite, très vite ! Un membre de l’équipage a appuyé par inadvertance sur un bouton coupant ainsi le moteur de l’appareil. Malheureusement, nous n’avons pu redémarrer le moteur de l’hélicoptère qui s’est finalement écrasé au sol » se souvient avec effroi notre officier retraité. « Et dès que l’appareil a touché le sol, nous ne savons pas par quel miracle, nous sommes parvenus à nous en sortir avant que l’avion ne prenne feu ! Des paysans sont venus à notre secours en nous éloignant du feu avant l’arrivée des sapeurs-pompiers » ajoute ce rescapé du crash du « Gazelle » du président Abdou Diouf. 35 ans après cet accident, si notre ancien officier-pilote a tenu à briser le silence sur cette expérience douloureuse relative au crash de l’hélicoptère de commandement du président Senghor — puis de son successeur Abdou Diouf qui a acquis par la suite un « Ecureuil » —, c’est juste pour montrer que l’entretien et la maintenance des aéronefs militaires n’ont jamais fait défaut. « Je suis mieux placé que quiconque pour dire que l’Armée sénégalaise est très rigoureuse sur la maintenance, l’entretien et le suivi de ses avions. L’Etat-major y consacre d’énormes moyens pour que tous les aéronefs soient au top ! A mon avis, les erreurs de pilotage et les mauvaises conditions météologiques sont les éventuelles causes des rares crashs survenus. »
A propos d’erreur de pilotage, il convient de mentionner l’appareil de chasse « Fouga Magister » tombé sur un quartier à Pikine à la fin des années 90. La responsabilité du pilote avait alors été engagée. Pour en revenir au crash de l’hélicoptère « Gazelle », le témoignage de l’expert interrogé ci-dessus et qui est synonyme d’une certification est confirmé par le capitaine (Er) Mamadou Sèye, ex-pilote de l’hélicoptère de commandement du président Abdoulaye Wade. Six ans après sa retraite, cet oiseau rare du pilotage nous dit que l’Armée de l’air n’a jamais failli à son devoir consistant à maintenir et entretenir régulièrement et périodiquement ses aéronefs. « Quoi qu’on puisse reprocher au commandement, on doit à la vérité de reconnaître que les autorités militaires ne badinent pas sur la maintenance et l’entretien des avions de l’Armée. Mieux, les pilotes et les mécaniciens font des formations permanentes pour s’adapter à n’importe quel type d’aéronef. C’est ce qui explique la qualification et l’expertise avérée des pilotes et mécaniciens de l’Armée sénégalaise qui font partie des meilleurs sur le continent. La preuve, l’Onu confie la plupart de ses avions aux pilotes de l’Armée sénégalaise dans plusieurs opérations d’intervention » magnifie l’ancien chef d’escadron d’hélicoptère, le capitaine Sèye, aujourd’hui à la retraite. Preuve supplémentaire : l’ancien patron de l’armée de l’air sénégalaise, le colonel Dacosta, est le seul Africain à avoir été coopté dans la commission internationale d’enquête créée par l’ONU pour déterminer les circonstances du crash de son ancien secrétaire général, le Suédois Dag Hammarskjöld. Une commission qui vient d’ailleurs de déposer ses conclusions.
Pour en revenir au capitaine Sèye, il nous rappelle le portrait réalisé par « Le Témoin/Hebdo » de l’époque sur son parcours exceptionnel. Un portrait qui lui avait valu par la suite plusieurs missions à l’étranger. « En effet, comme les journaux voyagent à travers le monde, les autorités militaires d’un grand pays d’Afrique m’ont fait appeler pour me confier la flotte des hélicoptères de commandement de leur président de la République. Dès mon arrivée pour les besoins d’un entretien, ils m’ont montré l’article du journal « Le Témoin » me concernant. Cela laisse croire que nos pilotes militaires font partie des meilleurs du continent au point d’être sollicités par le monde. En tout cas, les rares accidents enregistrés par l’Armée de l’air sont souvent causés par des erreurs humaines et conditions climatiques. Allez vérifier dans le monde, les meilleurs pilotes américains, russes, anglais et français subissent ces aléas climatiques et erreurs humaines » confie le capitaine Sèye. Et de nous renvoyer aux éternels « Fokker » attestant le professionnalisme, la rigueur, la compétence et le sérieux de l’Armée sénégalaise en matière de maintenance et d’entretien. Beaucoup de pilotes de l’Armée expliquent que la quasi-totalité des missions de l’Etat sont confiées à l’Armée de l’air grâce à la sûreté de ses avions, le commandement ne lésinant pas sur les coûts de maintenance (approvisionnement des pièces de rechange, dépenses d’infrastructure et de personnels). Ce, contrairement aux avions civils souvent cloués au sol pour problèmes techniques.
La preuve par les Fokker
Acquis en 1976, les avions « Fokker F 27 » symbolisaient la fierté et la souveraineté d’une jeune nation dotée d’une Armée de l’Air en pleine montée en puissance. A l’époque, sur le tarmac du 1er Groupement aérien sénégalais (Gas) basé à Ouakam, les mythiques Fokker constituaient les icônes d’une flotte en constitution composée d’avions de transport et de défense ayant pour noms : Alouette, Dakota, Bell, Fouga Magister, Turbotrush, Rallye-Guerrier, Cessna, MI-35 etc... Après 42 ans de service au cours desquels les Fokker ont été soumis à très rude épreuve, s’il n’y a jamais eu de crash de ces appareils, c’est grâce au professionnalisme des pilotes de l’armée sénégalaise et à la rigueur et au sérieux dansla maintenance. Qu’il vente ou qu’il pleuve, les Fokker décollent ou atterrissent. En Casamance comme à Saint-Louis, à Tamba ou le reste du monde, à Bangui à Monrovia comme à Guinée-Bissau, au Maroc, en France etc., les Fokker de l’armée nationale ont rempli et bien rempli avec bonheur leurs missions de transport de troupes, de délégations et autres évacuations sanitaires. A l’arrivée, tous les Fokker (06) ont fait et même dépassé leur temps après avoir conduit à bon port des milliers de passagers. Ce même si l’un des derniers Mohicans a failli à Kayes (Mali) suite à un atterrissage forcé au cours duquel il a subi des dégâts importants. Rappelons-le, en provenance de Bamako pour Dakar, cet avion militaire avait été obligé de faire un atterrissage d’urgence dans un « champ de patates » pour éviter un crash et des pertes en vies humaines. Ce qui n’était pas évident pour ce type d’avion qui a déjà atteint son potentiel voire sa durée de vie. Pour dire qu’on peut tout reprocher à l’Armée de l’air, sauf la discipline, le sérieux, le professionnalisme et le suivi dans les domaines… N’est-ce pas général Mamadou Seck « Number One », qui fut, à ce jour, le seul pilote chef d’état-major général des Armées ?