QUAND LE SÉNÉGAL ALTÈRE SA COTE
Restrictions des réseaux sociaux et internet mobile, brouillage et coupure de signaux de radios et télé…Depuis le début de l’année, différends rapports sur la démocratie, la situation des droits humains et des libertés ont incriminé le pays
Depuis le début de l’année, différends rapports sur la démocratie, la situation des droits humains et des libertés ont incriminé le Sénégal. Aussi bien celui d-Amnesty International, de Reporters Sans Frontières (RSF, sur la liberté de la presse), que ceux des organisations nationales de la société civile notamment les rapports de Africajom Center et la Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l’Homme (RADDHO) de mai dernier, tous enfoncent davantage notre pays dans la zone rouge. Et, au rythme où vont les choses, il serait difficile pour le Sénégal de retrouver une place de choix dans les prochaines études de ces organisations, surtout en matière de liberté d’expression et de presse.
En effet, en réponse aux violentes manifestations de jeudi 1er et vendredi 2 juin 2023, le gouvernement du Sénégal a décidé de la restriction de l’utilisation des plateformes de médias sociaux telles que Facebook, Telegram, Twitter, WhatsApp, Instagram et YouTube, soupçonnées de contribuer à amplifier la tension à travers des discours et autres messages délivrées via ces réseaux sociaux. Suite à cette censure, les utilisateurs du web se sont rabattus sur VPN, qui a «explosé». Face à ce contournement, les autorités sont passées à la vitesse supérieure, le week-end. C’est ainsi que Internet mobile a été coupé chez tous les opérateurs de téléphonie mobile. «Chers clients, l’Etat a décidé de suspendre l’internet mobile», c’est le message envoyé aux abonnés par ces derniers qui s’excusent «pour les désagréments».
«GOORGOORLU» MIS SOUS EMBARGO
Et comme si cela ne suffisait pas, restrictions ou pas, des signaux de certaines radios sont brouillés, en plus de cette restriction de l’accès à l’Internet, avec toutes les conséquences imaginables que cela engendre. Privant ainsi «goorgoorlu», qui semble mis sous embargo, de sources d’informations plurielles, contradictoires et diversifiées. Auparavant, le signal de la télévision du Groupe Walfajri (Walf TV), sur la Télévision numérique terrestre (TNT), a été coupé, alors qu’elle retransmettait les manifestations survenues jeudi dernier, à la suite de la condamnation d’Ousmane Sonko. Le leader du Pastef a écopé de deux (2) ans de prison ferme pour «corruption de mineur» et d’une amende de 600.000 FCFA et des dommages et intérêts de 20 millions de FCFA, dans l’affaire Sweet Beauty. Le groupe de presse dit n’avoir pas reçu de préavis. Contrairement à l’information donnée par des responsables de la TNT, soulignant qu’il aurait reçue l'ordre de couper le signal. Et, ce n’est pas la première fois que le signal de Walf TV est coupé. Il l’a été tout dernièrement, en février 2023. Le Conseil National de Régulation de l’Audiovisuel (CNRA) avait alors justifié sa décision, à l’encontre de ce média du groupe de presse de Front de Terre, par «une couverture irresponsable des manifestations à Mbacké, en diffusant en boucle des images de violences exposant des adolescents, accompagnées de propos dangereux, y compris de la part des reporters, en violation totale de la réglementation».
LIBERTE DE LA PRESSE : LE SENEGAL CLASSE 104E MONDIAL SUR 180 PAYS
Autant de restrictions qui risquent encore de donner de la matière aux organisations de défense des droits et libertés dont Reporters Sans Frontières (RSF), dans leurs prochains Rapports. Déjà, dans le Rapport de RSF publié à l’occasion de la Journée international de la liberté de la presse, célébrée le 3 mai 2023, le Sénégal était classé 104e mondial sur 180 pays. Pis, dans cette 21e édition du Classement mondial de liberté de la presse établi par RSF, notre pays a dégringolé de 31 places, en comparaison à 2022. «Modèle régional jusqu’à il y a peu, le Sénégal (104e) perd 31 places notamment du fait des poursuites dont fait l’objet les journalistes Pape Alé Niang, Pape Ndiaye et de la forte dégradation des conditions sécuritaires des journalistes», indique-t-on dans le Rapport. D’ailleurs, avant cette étude, le Sénégal n’avait pas de quoi se réjouir de la liberté supposée de la presse. Car, selon le Classement mondial 2022 de RSF, notre pays avait fortement régressé. Avec un score de 63.07, le Sénégal était classé au rang de 73e sur 180 pays. Soit un recul de 24 places, en un an, puisque le score du Sénégal, en 2021, était de 74.78, se positionnant au rang de 49e sur 180 pays.