LA RONDE DES POLITIQUES
Marche contre la caricature de Bamba publiée par Jeune Afrique

Les disciples de Serigne Touba demandent l’interdiction défnitive de la vente de Jeune Afrique au Sénégal. Après la caricature de leur guide sur le site du journal de Béchir Ben Ahmed, les mourides ont marché ce samedi pour crier leur indignation.
Les Sénégalais, en particulier les membres de la communauté mouride, ont marché le samedi dernier contre la caricature de Cheikh Ahmadou Bamba publiée sur le site de Jeune Afrique.com. Sous les cris «Dieureudieuf Serigne Touba» et des chants religieux, la manifestation est allée de la mosquée Massalikoul Djinaan à la Place de l’Obélisque. Ils étaient des milliers de talibés du fondateur du mouridisme à effectuer le déplacement pour montrer leur «plus grande indignation contre cette caricature».
Hommes, femmes, jeunes, enfants, tous âges confondus étaient présents, avec plusieurs d’entre eux habillés en mode «baye fall», munis de gros chapelets, photo de Serigne Touba autour du cou. Plusieurs n’ont même pas respecté l’itinéraire indiqué. C’est une foule immense qui a arpenté l’axe Blaise Diagne – rond-point poste Médina-Rts avant de se retrouver à Colobane.
A pieds, à moto, les disciples arboraient des pancartes sur lesquelles on pouvait lire : «Touche pas à Bamba», «Je respire Serigne Touba», «Expulsion définitive de Jeune Afrique du Sénégal».
A l’image du député imam Mbaye Niang qui soulevait une photo de Serigne Touba, les disciples ont montré à la face du monde ce que leur marabout représente pour eux. Sur une place noire de monde, la tribune s’est révélée trop petite pour contenir les responsables et hommes politiques qui voulaient y prendre place. Assise à même le sol, Ndèye Seck, la soixantaine, égrenant un chapelet, ne cachait pas sa désolation : «Ce qui s’est passé nous fait mal. Que cela ne se reproduise plus jamais.»
Face aux talibés, Mbackyou Faye, représentant du khalife général des mourides, Cheikh Sidy Mokhtar Mbacké à Dakar, a lancé un appel à l’Etat : «Nous demandons aux autorités de ce pays d’interdire définitivement la vente de ce journal au Sénégal. Nous ne voulons pas d’excuses.»
Condamnant «avec la dernière énergie ces actes visant un saint homme», Mbackyou Faye dira à l’endroit des caricaturistes : «Cette mobilisation est aussi un avertissement contre quiconque s’attaquerait à Serigne Touba.» Et d’ajouter : «Nous disons non aux caricatures du Cheikh d’où qu’elles pourraient venir, plus jamais ça.»
Contents du discours du dignitaire mouride, les talibés n’ont pas cessé d’applaudir tout au long de la lecture du message de la communauté mouride. Seul bémol, Mbaye Ndiaye, représentant du gouvernement, a été copieusement hué par la foule. D’autres politiciens comme Madické Niang, Idrissa Seck, Cheikh Bamba Dièye, Mor Ngom, Mamadou Lamine Diallo ont pris part à la manifestation.
Diourbel et Touba unies dans la douleur
La caricature de Damien Glez, dessinateur-éditorialiste franco-burkinabè, contre Cheikh Ahmadou Bamba parue dans l’édition numérique de Jeune Afrique a atteint les Sénégalais dans leur chair. Partout, ils protestent contre cette caricature irrespectueuse, impertinente et insolente. A Diourbel et Touba, le macadam a été battu samedi et la doléance forte a été «plus jamais de JA au Sénégal». A Diourbel, Serigne Dane Mbacké a prophétisé la mort de l’hebdomadaire africain.
A Touba : Serigne Touba est le cœur du Sénégal
«Serigne Touba rek, dieuredieuf Serigne Touba, khadimou rassoul, moom rek la», tels étaient les chants et paroles débitées par une marée humaine composite qui a marché de Mbacké à la grande mosquée de Touba samedi dernier. Disciplinés, avec des pancartes sur lesquelles on pouvait lire «Jeune Afrique est mort», les marcheurs de tous âges et tous sexes ont crié leur indignation et leur rancœur face à ce que certains ont appelé le parjure de Jeune Afrique.
Rapporté par la radio Lamp Fall Fm, un marcheur dira : «Ils savent bien ce qu’ils ont fait parce que Serigne Touba est le cœur du Sénégal et en l’atteignant, ils vont détruire le Sénégal. Notre mobilisation ne va jamais faiblir. Nous ne reculerons pas d’un iota. Nous sommes prêts à mourir pour que pareille chose ne se reproduise.»
A sa suite, Serigne Amsatou Mbacké Ibn Serigne Abdoul Ahad Mbacké, 3ème khalife général des mourides, responsable du dahira Khoudatoul Khadim et initiateur de la marche, dira : «Tout mouride est contre ceux qui se battent contre l’islam. Personne ne peut éteindre la lumière divine et Serigne Touba en constitue le parfait exemple. Il faut faire attention, comme le disait Serigne Touba, à l’argent et aux biens matériels. Il nous est très difficile de faire ce que Serigne Touba et ses enfants faisaient, mais tentons au moins de les suivre.»
A sa suite, Serigne Khadim Fatah dira : «Il ne faut pas qu’on laisse passer cette affaire. Nous attendons le ndiguel du khalife. Nous devons répondre à la mesure de la provocation parce que Serigne Touba est tout pour nous. Ceux qui nous ont porté tort l’ont fait aux familles de El Hadji Malick Sy, de Baye Niasse, de Limamou Laye etc. Serigne Bamba est tout pour nous. Ceux qui doivent calmer notre indignation doivent le faire avant qu’il ne soit trop tard.» Serigne Bassirou Mbacké Abdou Khadre a joint par téléphone Serigne Amsatou et l’a remercié de cette initiative avant de donner ndiguel aux talibés de se joindre à cette initiative.
Serigne Mbaye Longhor dira à sa suite : «Ce journal qui devrait occuper la tête de la lutte que menait Cheikh Ahmadou Bamba et l’ensemble des figures historiques du monde musulman devrait se comporter d’une autre manière. Les musulmans sont déçus, les mourides sont déçus. L’année dernière à cette même période, un autre journal avait caricaturé le prophète Mohammad Psl, et aujourd’hui, on a touché au meilleur de ses serviteurs, Serigne Ahmadou Bamba. Ce n’est pas un hasard. Jeune Afrique ne pouvait pas ignorer l’influence et l’affluence du magal et de cette personne qui a permis de réunir le double de personnes qui se déplacent à la Mecque. Les mourides sont indignés et les musulmans aussi. On peut dire après cette manifestation qu’il n’y aura plus jamais cela.»
A Diourbel, Serigne Dane Mbacké prophétise la mort de JA
Partis de la grande mosquée de Diourbel, des milliers de fidèles musulmans ont participé à «une marche pacifique» pour protester contre la caricature de leur guide Cheikh Ahmadou Bamba, publiée par l’hebdomadaire Jeune Afrique, basé à Paris. La foule dans laquelle on notait la présence de petits-fils et d’arrière-petits-fils de Serigne Touba scandait des slogans hostiles au magazine, avant de demander aux pouvoirs publics de procéder à l’interdiction de sa vente et sa diffusion au Sénégal.
«Le khalife général des mourides, Serigne Cheikh Sidy Mokhtar Mbacké, nous a demandé de faire preuve de retenue pour ne pas tomber dans des actes de violence à cause de la publication du magazine Jeune Afrique. C’est pourquoi on a jugé nécessaire d’organiser cette marche pacifique pour montrer encore une fois la victoire de notre guide sur ses ennemis», a dit Serigne Dane Mbacké devant le préfet de Diourbel venu à la rencontre des marcheurs.
Au chef de l’exécutif local, Serigne Dane Mbacké demandera : «Jeune Afrique ne doit plus être vendu au Sénégal. Ce n’est pas une demande, mais une directive, une injonction à appliquer, car nous ne sommes ni des toubabs ni des Burkinabè encore moins des Zambiens, mais des Sénégalais avec notre culture, notre morale religieuse que tout le monde doit respecter. Nous allons mettre en place une commission chargée d’élaborer un plan d’actions contre toute personne malintentionnée qui s’évertuera à saper les enseignements de Khadimou Rassoul. Celui qui a fait cette caricature, c’est un Burkinabè qui a pris la nationalité française et c’est très dommage. L’homosexualité n’aura jamais droit de cité dans ce pays. Que ceux qui en ont les penchants et leurs souteneurs se le prennent pour dit.»
Idrissa Seck, Rewmi
«Ma présence ici est une manifestation de ma réprobation, de ma condamnation de cette caricature honteuse de nos symboles religieux. La notion de liberté d’expression ne signifie pas le droit de calomnier, de diffamer, de blasphémer, d’insulter la dignité des gens dans leur foi et dans leur croyance. Serigne Touba, au-delà de la communauté mouride, sénégalaise, africaine, du peuple noir et même de la Ummah islamique, est un symbole qui mérite autre chose que cette caricature. Il mérite le respect et la considération.»
«Toute la vie de Serigne Touba et tout son enseignement conduisent au pardon, mais cela n’exclut pas de manifester au monde la réprobation d’une liberté d’expression dévoyée dont certains veulent se servir pour avoir le droit d’insulter impunément les autres. Je ne crois qu’une interdiction soit une mesure nécessaire. La chose la plus importante, c’est que les journalistes comprennent qu’ils ont un droit qui est le droit de libre expression, mais que cela ne signifie pas un droit à insulter, à blasphémer impunément.»
Le ministre Mbaye Ndiaye, Apr
«La raison de ma présence, c’est celle d’un musulman qui se sent agressé, offensé par des mécréants. Ce n’est même pas un problème de l’Etat, c’est un problème de citoyens africains. Je lance un appel à tous les Sénégalais, qu’ils soient musulmans ou non, de tourner le dos à Jeune Afrique. C’est un journal mécréant. Ce n’est pas l’Etat qui doit nous l’interdire. Nous devons nous l’interdire.»
Le député Mamadou Lamine Diallo, Tekki
«Je suis venu protester contre cette provocation de Jeune Afrique. Il faut qu’on arrête ces genres de choses dans le monde. Sur l’interdiction, ce qui est important, c’est d’avoir des excuses publiques de Jeune Afrique et qu’on s’assure qu’il ne le fera plus jamais.»
Cheikh Bamba Dièye, Fsd/Bj
«Je suis déçu et totalement impliqué dans le combat que nous devons mener, nous les musulmans du monde, pour refuser ce qu’on veut nous imposer. Nous avons fait l’option de croire en Dieu, de prendre Seydina Mohamed comme notre prophète et de choisir Serigne Touba et d’être ses disciples. C’est ça notre choix, c’est ça notre option. Et nous n’avons de complexe à avoir. Nous n’avons pas peur de l’assumer.»
Mor Ngom, Apr
«Nous sommes là pour témoigner notre foi en Serigne Touba. C’est la raison pour laquelle, en masse, nous sommes venus com me tout citoyen, de surcroît mouride. Franchement, je vous dis que c’est le talibé Mor Ngom qui est là. Je ne peux pas me prononcer sur une quelconque interdiction.»