"CE DONT LES RESPONSABLES DE LA FSBB ONT PEUR"
Lamine Savané, un des promoteurs de l'African Basket League (ABL)
Lamine Michel Savané dit tout sur l’african basket-ball League dont il est un des promoteurs. Dans le premier jet de l’entretien accordé à Stades, l’ancien joueur de la Ja «dunk» sur les responsables de la Fédération sénégalaises qui s’opposent à cette initiative. Pour lui, ils ont peur de l’évolution du basket local vers le professionnalisme.
C’est quoi l’African Basket League (ABL) ?
Il s’agit d’une ligue professionnelle qui est née à Johannesburg (Afrique du Sud), même si son siège se trouve à Lagos au Nigeria. En août 2015, lors du premier match NBA organisé en Afrique, certains d’entre nous, managers du sport et anciens joueurs, ont eu au cours d’une discussion l’idée d’apporter une solution à un problème qui existe depuis 50 ans : la professionnalisation du basket africain. Après plusieurs jours d’échanges, nous nous sommes aperçus que c’est un des maillons principaux du sport qui n’existe pas dans le continent. Nous avons dit pourquoi ne pas l’initier. Mais, nous avons constaté qu’il serait difficile à chacun des pays de remplir les critères. Nous avons ainsi convenu de regrouper des équipes de différentes nationalités. En croyant ferme qu’il est possible dans chaque pays de trouver une ou un groupe de personnes prêtes à s’engager dans cette aventure. Au mois d’octobre dernier, nous avons trouvé la dénomination (African Basket league) et avons consolidé un peu plus l’idée.
Comment s’est fait le choix des équipes et des pays ?
Le seul critère était de comprendre le projet, d’être prêt à s’engager et de prendre le risque sur le plan financier, mais aussi à d’autres niveaux. Comme il fallait procéder à un test pour voir si ça va marcher,
nous avons pensé le faire avec les équipes constituées par les six personnes ayant conçu le projet.
Quelles sont ces personnes qui sont derrière cette ligue ?
Il y a un ancien joueur nigérian, Obinna Ekezie. Il a joué en NBA pendant 4 saisons (à Vancouver, Washington, dallas et Los Angeles Clippers, Ndlr). Après sa carrière, il est rentré dans son pays avec l’idée de monter une société qu’il a réussi à développer. Il s’agit de l’agence de voyage Wakanow qui a eu à faire la une des revues panafricaines. Il y a d’autres Nigérians : Ugo Udezue, un manager du sport, le colonel Sam Amidou qui intervient dans le domaine du foot et du basket et l’homme d’affaires Damoyé. En plus de Moussa Adamou de la Côte d’Ivoire, d’Alexandre Tchikaya, ancien président de la Fédération gabonaise de basket et moi-même. Nous avons en commun d’avoir été d’anciens pratiquants qui se sont investis dans la gestion de joueurs ou d’évènements sportifs.
Il s’agit d’une ligue professionnelle. Cela demande des moyens financiers importants. D’où viennent les fonds ?
Des promoteurs que nous sommes, chacun a pris un engament financier. Mais au-delà de ça, nous avons démarché des partenaires. Les premiers avec qui nous avons échangé ont adhéré au concept. Ils ont vu l’impact et l’intérêt que cela avait. Parce qu’il n’y a pas une compétition de ce niveau et de manière continue en Afrique.
Ces partenaires sont de quelles natures ?
Les principaux obstacles dans l’organisation de compétitions continentales, ce sont les voyages, la prise en charge des séjours et la médiatisation. C’est pourquoi nous avons ciblé nos partenaires. Nous avons ainsi signé un protocole accord avec la chaîne de télévision «13 Sports» pour la diffusion d’un certain nombre de matchs durant cette année test. Askay Airlines s’est engagé à nous accompagner. Tout comme certains hôtels et résidences hôtelières.
On a l’impression qu’il y a beaucoup d’argent autour de cette ABL. Cela ne serait-il pas à l’origine de cette polémique ?
J’ose espérer que non. Pour nous, il n’est pas possible de faire des omelettes sans casser des oeufs. donc, il nous fallait les moyens qui sont déployés. C’est dommage cette vision que certaines personnes ont des choses. Il suffit d’avoir un projet solide et crédible pour le présenter à des gens qui acceptent d’y mettre leur argent. Et les promoteurs sont les premiers à y investir leur argent. Maintenant, ce qui se dit concernant les moyens financiers est relatif. Parce que par rapport à notre ambition, qui est d’avoir 16 équipes comme à l’Euroligue, il faudra beaucoup plus de moyens financiers. Cette année est un test. une manière de tâter le terrain, de savoir les tenants et les aboutissants, combien coûte une ligue pro. Avant de penser à une expansion.
Avec les moyens colossaux annoncés, certains acteurs du basket local ont émis des craintes par rapport à l’origine des fonds. Pouvez-vous assurer qu’il n’y a rien de louche dans le financement de cette African basket league ?
Je suis scandalisé que l’on puisse amener le débat à ce niveau. Il faudrait être une personne extrêmement petite pour penser à cela. En se focalisant sur l’intérêt de ce que l’on propose pour le basket sénégalais et africain, il s’agit de grandes opportunités pour les joueurs, les encadreurs techniques et les officiels… Nous sommes des Africains qui ont fait des études, une carrière sportive et se sont lancés dans le business du sport depuis une quinzaine d’années. Les gens feraient mieux de croire que c’est le fruit du travail et de la crédibilité que nous avons développée qui est à l’origine de ce qu’on essaie de mettre en place. Maintenant, nous laissons à ceux qui doutent de dire sur quoi ils se basent.
Qu’est-ce que le basket-ball sénégalais y gagne financièrement et sportivement ?
Le basket-ball sénégalais ne se limite pas à la Fédération. Il y a tout un tas d’initiatives qui participent à la bonne marche de cette discipline. Et ces structures, qui contribuent, ne rapportent pas des sous à l’instance dirigeante. Toutes les académies de basket au Sénégal ne sont pas affiliées à la FSBB. Alors que ce sont elles qui forment et donnent des opportunités d’aller acquérir de l’expérience à l’étranger à 80% des joueurs qui composent nos sélections nationales… L’African Basket League, ce qu’elle peut apporter, on en a discuté avec le président Babacar Ndiaye. C’est sur le plan des infrastructures avec l’acquisition d’un nouveau parquet pour le stadium Marius Ndiaye. Cela a un coût et participerait à améliorer les conditions de jeu. En outre, tous ceux qui participeront à l’organisation de nos matchs à dakar seront rémunérés. Avec l’expérience de l’organisation d’une compétition de ce niveau. Ça permettra de réinsérer tous ces joueurs qui sont revenus au pays. En leur permettant de jouer à un niveau pro. Et c’est au profit de la Fédération et de l’équipe nationale masculine.
Mais il y a un l’aspect concurrentiel en défaveur du basket local…
C’est faire preuve d’un manque de vision et d’ambition incroyable pour prendre les choses de la sorte. dans tous les pays où le sport décolle, il y a une élite professionnelle qui pousse plus de jeunes à la pratique. Parce qu’il y a des options économiques. C’est cela le plus important. Au lieu de se focaliser sur le fait que les meilleurs joueurs choisiront de rejoindre l’ABL. Concernant le club dakar Rapids, nous avons enrôlé des basketteurs sénégalais qui évoluaient à l’extérieur. Ceux qu’on a pris sur le plan local ne font pas partie des joueurs qui brillent au niveau de l’élite nationale depuis quelques années. donc, cette crainte n’est pas fondée. En plus si, de par notre initiative, des clubs locaux veulent se professionnaliser, c’est au grand bénéfice du basket sénégalais. Parce qu’avec 4, 5 ou 6 clubs qui s’y lancent, on ne parlerait pas d’African League, mais plutôt d’une ligue nationale professionnelle. Les gens ont peur de quoi, du futur ou de l’avancement du basket local ? Ce qu’ils font n’a aucun sens. on ne peut pas laisser nos joueurs aller jouer un peu partout dans le monde et dire qu’on ne veut pas du professionnalisme. C’est un paradoxe.