«CE SONT LES ARRIVISTES QUI VEULENT DIVISER PIKINE»
JULES BALDÉ LARGUE SES MISSILES
Il sait se mettre dans son coin et se charger de son bétail. Mais Jules Baldé a du vécu. Il a aussi (et toujours) son mot à dire dans les affaires de Pikine. Dans cette interview grand format, le fils de feu Falaye Baldé évoque le différend entre Eumeu Sène et Baboye. Mais en s’attaquant à la racine du mal. Entretien
Pouvez-vous nous rappeler vos débuts dans l’arène ?
Je suis né dans une famille de lutteurs, mon père étant un ancien lutteur. J’ai alors vécu dans cet environnement. Nos aînés luttaient et on les suivait dans les mbappat. J’apprenais un métier à Yarakh. Après la descente, je me rendais à la plage pour m’entraîner. Lors d’un mbappat, j’ai défié Boulma Diam de Pikine, qui a estimé que j’étais très petit.
Qui étaient vos aînés dans l’arène ?
Mes grand-frères Papa Baldé, Assane Baldé, etc.
Avez-vous choisi la lutte parce que vous êtes fils d’ancien lutteur ?
Mon père a toujours voulu que j’opte pour la lutte. En ce moment- là, j’étais dans le football. Un jour, je me suis blessé en jouant au football. Mon défunt père m’a fait savoir qu’il me voulait dans l’arène. Lors de l’anniversaire de Fodé Doussouba, il m’a amené dans l’arène. C’était mon premier combat. Il a découvert mes qualités. Il s’est rendu compte que si on me soutenait, je pourrais réussir dans la lutte. Du coup, il m’y a orienté.
Quels sont les lutteurs que vous avez battus en mbappat ?
J’ai battu beaucoup de champions dans les mbappat. J’ai croisé Lirou Diane, Zale Lô, battu 8 fois Khadim Ndiaye, Ousmane Diop, etc. J’avais tellement de talent que j’étais craint par mes adversaires possibles. On m’évitait. Je n’étais pas physiquement bien assis. Mais j’étais plein de qualités techniques.
Comment s’est passée votre rencontre avec Bombardier à Nguéghokh lorsque vous le battiez ?
Avant Bombardier, c’est Tapha Guèye que j’avais d’abord croisé en mbappat. En ce moment- là, il préparait un combat contre Alioune Diouf, en lutte avec frappe. C’était un choc très électrique. Je peux dire que Tapha Guèye n’était pas techniquement plus fort que moi mais physiquement plus assis. C’est ce qui m’a perdu. Il y a eu ensuite la revanche qui s’est soldée par un match nul.
Et pour Bombardier ?
Mon combat contre Bombardier, c’était à Nguékhokh. On y était pour faire la paix entre Toubabou Dior et Balla Bèye 1. Et quand on est arrivé, on nous a signifié qu’il y avait une séance de lutte. Séance tenante, on a noué les nguimb et participé au tournoi. Lors du tirage au sort, je suis tombé sur Bombardier qui présentait déjà une masse impressionnante. Mais il faut dire que j’étais physiquement plus fort que lui. Je l’ai battu par un mboot inédit hors des sacs.
Quels sont les champions que vous avez eu à battre avec la manière ?
Mes meilleures et spectaculaires chutes ont été signées au stade Emile Badiane. Il arrivait que les gens se rendent en Gambie pour trouver des athlètes capables de me faire mordre la poussière. Parce que j’étais intenable. Très doué.
Rappelez-nous votre adversaire lors de votre premier combat en frappe ?
Zale Lô est mon premier adversaire en lutte avec frappe. Auparavant, il avait affronté Alioune Diouf et Tombé Sène. C’est après ce revers qu’on lui a conseillé de choisir un adversaire plus prenable pour renouer facilement avec le succès. C’est ainsi qu’on me l’a donné. Lorsqu’il s’est déshabillé, ceux qui étaient au stade ont pensé que c’est lui qui allait disputer le grand combat. Tellement, il s’était bien préparé et il respirait la forme. J’avais d’ailleurs contracté une blessure lors du combat. Il était trop défensif sur conseils de Tapha et Mbaye Guèye. C’était un match nul.
Quelle était votre prise favorite en lutte avec frappe ?
Le mboot (hancher). Je l’avais hérité de mon père. Je n’ai certes pas fait la carrière de mon père. Mais j’ai hérité certaines de ses qualités techniques.
Quel sentiment vous animait quand vous avez battu Tapha Tine ?
On n’était pas ébranlé par Tapha Tine. On était convaincu qu’Ama allait facilement le battre. On le connaît très bien. Lors de ses combats, il mime des entrées avant de se retenir. Il suffit de le comprendre pour pouvoir se saisir de sa jambe et le plier.
Peut-on savoir si c’est vous qui donnez les stratégies de combat à Ama Baldé ?
Il n’a jamais lutté avec sa propre stratégie. C’est moi qui lui donne toutes les clés de victoire. La seule fois qu’il n’a pas respecté mes consignes techniques, c’était lors de son premier combat contre Gouye Gui. Mais tout le monde connaît la suite. Ce que je lui avais donné comme consigne technique, c’est ce qu’il a utilisé contre Tapha Tine qu’il a battu.
Êtes-vous conscient que le combat Ama Baldé / Papa Sow aura lieu tôt ou tard ?
Ama Baldé a battu deux lutteurs de Fass. Il s’agit de Tapha Guèye 2 et Balla Diouf. Au moment où il les terrassait, ils avaient pratiquement plus de cote que Papa Sow. Pourtant, Ama Baldé était prêt à croiser ce dernier qui avait décliné l’offre. Pour ce Tournoi de la TNT, il a déclaré qu’il était prêt contre le champion. Ama Baldé a accepté. Mais lui qui voulait le combat réclamait un gros cachet. Nous, on n’est pas prêt à lutter contre lui la saison prochaine.
N’est-il pas dangereux de dire que vous n’allez pas l’affronter la saison prochaine d’autant plus que les données peuvent changer ?
Quelles que soient la nouvelle donne, on ne se prendra pas la tête. Quand un combat s’impose, il doit se tenir.
Papa Sow soutient que tant qu’il est à Fass, Gris Bordeaux ne prendra pas Ama Baldé. Cela ne vous fait-il pas peur ?
Est-ce que c’est lui qui cherche du travail à Gris Bordeaux ? Celui-ci travaille pour son propre compte. Si Gris trouve qu’Ama Baldé est un adversaire possible, il le prendra sans problème. Papa Sow a eu l’opportunité de s’expliquer avec mon frère et ne l’a pas exploitée. Il ne peut priver cette même opportunité à d’autres comme Gris. Aussi, si Gris Bordeaux refuse, il y a d’autres adversaires pour Ama Baldé.
Comme qui ?
Il y a Yékini Jr, Bombardier, Modou Anta, Yékini, Modou Lô, etc. Ama sait qu’il est jeune et doit lutter pour se faire plaisir et gagner de l’argent. Du coup, Gris Bordeaux reste aussi son potentiel adversaire.
Ama a déclaré dans Sunu Lamb que même pour demain il accepte de lutter contre Gouye Gui. Qu’en pensez-vous ?
Oui, il a raison. Ils devaient se croiser pour trancher le débat. Mais Gouye Gui avait senti sa chute. Ainsi, il s’est arrangé pour fuir. Il n’est pas digne (goréwoul). Le CNG devait le sanctionner. Il devait être suspendu. Parce que c’est la deuxième fois qu’il gâche un combat. Gouye Gui avait dit qu’il était prêt pour que l’arbitre donne le coup d’envoi.
On ne vous voit pas lors des combats d’Eumeu Sène mais vous étiez à Kaolack pour soutenir Baboye. Qu’est-ce qui l’explique ?
Eumeu Sène est mon jeune frère. C’est moi qui lui ai appris le b.a.-ba de la lutte. Son atelier de tôlerie était juste là (il indique le lieu), à côté de chez nous. Quand il descendait, il venait s’entraîner avec nous.
Depuis quand ne l’avezvous pas conseillé pour un combat ?
De son premier combat jusqu’à celui qu’il a disputé contre Khadim Ndiaye, Eumeu Sène venait recueillir et suivait mes conseils. Et ça lui réussissait. Même lors de son dernier combat contre Gris Bordeaux, il est parti avec mes conseils. C’est cela qu’il a appliqué pour vaincre. Si un athlète ne vient
pas me voir, ce n’est pas moi qui vais aller vers lui. Je reste dans mon coin.
Pourquoi vous n’avez rien dit sur le différend entre Baboye et Eumeu Sène ?
Eumeu Sène s’est disputé d’abord avec Tyson avant Baboye. Je pense que si on doit réconcilier les gens, qu’on commence par Tyson. Eumeu était chez celui-ci. Il a fait des années là-bas. Je peux dire que sa carrière a pris de l’envol aux côtés de Tyson. Qu’on cherche à réconcilier Eumeu Sène avec tous ceux avec qui il est en de mauvais termes.
Selon vous, quels sont ceux qui doivent faire ces démarches ?
Je ne peux pas prendre les devants. Nous avons nos aînés. Notre père Pape Diop Boston doit être au premier plan. Ensuite, il y a nos grand-frères Palla Diop, Mbacké Bâ, Bourkhane Wade, Baba Diallo, Balla Bèye 1, De Gaulle, etc. C’est à eux de prendre l’initiative pour ensuite nous appeler.
Quelle analyse faites-vous du mouvement 100 % Pikine ?
L’esprit existe depuis des années. Dans les mbappat, on était soudé et très uni. Il s’agissait de Baboye, Pape Cissé, Ndiaga Diop, Tyson, etc. On survolait les mbappat à chaque fois qu’on s’y rendait en groupe. Mais aujourd’hui, ce sont les arrivistes qui veulent diviser Pikine. Que les gens acceptent la volonté divine. Il n’y a pas meilleur technicien que moi à Pikine. Mais je n’ai rien gagné dans la lutte. J’en rends grâce à Dieu.