VIDEO"LE SPORT SÉNÉGALAIS MANQUE DE RECONNAISSANCE ENVERS SES PRATIQUANTS"
Abdoulaye Seck double champion du monde Ju Jitsu
S’il n’est pas du lot des disciplines sportives les plus connues, le Ju Jitsu, mélange de judo et de Karaté, est pourtant depuis quelques années, l’un des grands pourvoyeurs de titres pour le Sénégal. Cela, grâce à son numéro 1, Abdoulaye Seck qui ne cesse d’empiler les médailles dans les compétitions internationales. Déjà, deux fois champion d’Afrique de 2004 à Tunis et de Dakar 2012, double champion du monde de la catégorie des 77kg en fighting system et combat au sol, l’ancien judoka, aujourd’hui sociétaire du club de Napoli en Italie, relève pourtant de l’indifférence voire un manque de reconnaissance des autorités à son égard. Malgré ses nombreuses demandes d’audience, qui se sont toutes révélées vaines, le combattant sénégalais n’en démord pas et sollicite ardemment une rencontre avec le ministère des Sports et même le chef de l’Etat afin de leur soumettre ses ambitions. C’est surtout pour bénéficier de l’appui qui permettra d’encourager ceux qui participent à faire émerger la discipline sur le plan mondial.
Vous êtes double champion du monde de Ju Jitsu. Quelles sont actuellement vos ambitions ?
Mon ambition est celle de tous les sportifs. Mais je constate que le sport sénégalais manque de reconnaissance envers ses pratiquants. C’est souvent le constat de nombre de sportifs qui évoluent à l’extérieur et qui représentent souvent leur pays dans les compétitions internationales notamment les championnats du monde. Je cours en vain derrière un rendez-vous avec les autorités du Sénégal.
En quoi une rencontre avec les autorités peut- elle vous être utile dans vos activités sportives ?
On sait que le sport et surtout le haut niveau demande des moyens. On ne peut pas continuer à représenter son pays, glaner des médailles mondiales et ne pas se faire assister. C’est mon club de Napoli en Italie, appartenant à Pascal Giancarlo, qui me soutient et me prend entièrement en charge quand je participe à des compétitions. J’estime que mon pays d’origine doit, au moins, apporter son appui et me prendre en charge. C’est un minimum. Aujourd’hui, j’ai obtenu le titre mondial en Ju Jitsu et je veux rencontrer le ministre des Sports pour lui exposer mon ambition pour le développement de la discipline. Mais aussi pour lui soumettre mon programme.
Mais vous êtes sous la tutelle de la Fédération sénégalaise de Judo. Est-ce que vous lui avez soumis votre programme parce qu’elle est l’interlocutrice directe du ministère des sports.
Un mois avant les derniers championnats du monde en Pologne, mon club avait envoyé un mail ainsi que toutes les fiches techniques à la Fédération sénégalaise de judo. Mais depuis lors je n’ai pas eu d’échos, ni de réponses. Après les championnats du monde, mon club a bien contacté l’ambassade du Sénégal et nous avons été reçus par l’ambassadeur lui-même. On l’a présenté la fiche technique et il a vite envoyé deux courriers au ministère des sports et à la présidence de la République. C’était pour attirer l’attention des autorités sénégalaises et leur signaler cette performance mondiale que nous venons d’accomplir. Finalement, cette situation ressemble plus de l’indifférence qu’autre chose.
Est-ce que vous aussi vous confirmez ce que nombre d’athlètes reprochent aux autorités. C'est-à-dire que leur soutien n’arrive pas souvent au moment opportun?
C’est le sentiment que nous avons souvent eu. Chaque sportif rêve d’être champion chez soi, puis d’être championnat d’Afrique et mondial. En ce qui me concerne, j’ai tout donné à mon pays. Je suis un ambassadeur pour mon pays et en tant que tel, je sollicite à rencontrer les autorités. Beaucoup de sportifs ont eu cette possibilité et pourquoi pas moi. J’estime que personne n’a plus de mérite que moi.
Le Ju Jitsu n’est pas très connu des sénégalais et pourtant la discipline est en train d’avoir, avec vous, un rayonnement mondial ?
Le Ju Jitsu est une variante du Judo. C’est quasiment du judo à la différence qu’il y a de la frappe. C’est en somme un mélange de judo et de karaté. Quand l’arbitre dit «Hadjimé» pour signaler le début du combat, vous faites des actions de karaté mais lorsqu’il y a contact, vous utilisez les techniques du judo. Le Ju Jitsu est vraiment un sport complet.
Vous êtes le premier combattant sénégalais à émerger dans ce sport. Comment avez-vous réussi à faire la transition et opter ensuite pour cette discipline ?
La base de ce sport, c’est le judo. Si vous l’assimilez, c’est ensuite facile de faire le Ju Jitsu. J’ai été cinq fois champion du Sénégal de la catégorie des 77 kg et médaillé de bronze par équipe au championnat d’Afrique de 2006. Je fais partie des premiers à être initié à cette discipline lorsque les français ont introduit la discipline au Sénégal en 2008. C’est ainsi que l’on m’a ensuite sollicité pour faire des compétitions en Italie. Une préparation de deux mois, m’a ainsi ouvert la voie à des Opens et diverses compétitions où j’ai été invité. C’est en 2014 qu’on m’a demandé de rester en Italie.
Quelles sont aujourd’hui les échéances qui sont devant vous ?
Les prochains championnats du monde auront lieu au Brésil en 2017. Le Sénégal que je représente doit impérativement m’accompagner. C’est pourquoi, je tiens à rencontrer les autorités avant la fin de mes vacances dans un mois. Cela me permettra de savoir à quoi s’en tenir. J’ai grandement besoin de rencontrer le ministre (Matar Bâ, Ndlr). L’idéal serait même d’avoir une audience avec le président de la République (Macky Sall, Ndlr).
Dans l’immédiat, quelles sont les échéances les proches pour vous. C’est sans doute les qualifications des Mondiaux ?
Je dois disputer les qualifications et je prépare un tournoi open à Paris Mes coéquipiers en club font de même et ils ont tous le soutien de leurs fédérations et de leur pays. Pourquoi pas moi ?
En tant que quintuple champion du Sénégal, quelle est votre lecture sur l’évolution du judo sénégalais ?
Le judo est sur la bonne voie. Je vois que l’on soutient et encourage nos combattants. Mais le meilleur soutien que l’on puisse apporter à un combattant, c’est de lui permettre d’aller se mesurer sur le plan international, de se frotter à d’autres championnats et se familiariser davantage avec le haut niveau. Cette option créée de la motivation. Si on ne le fait pas, on fera du surplace. On ne sera pas toujours à l’abri de surprises dans les joutes internationales.
Selon vous qu’est le judo sénégalais doit, en termes de stratégie, mettre en place pour une meilleure participation aux JO de 2020 à Tokyo ?
J’ai la chance d’évoluer en Europe. Je réalise les énormes sacrifices que les athlètes fournissent pour préparer les JO. A la fin d’une olympiade, ils ont souvent un mois de répit pour se remettre au travail et de préparer le prochain rendez-vous. En résumé, il faut accroître les moyens mis à la disposition du sport pour les permettre d’émerger. Le sport de haut niveau est limité dans le temps et a un prix.