PAPA MASSATA DIACK, UN HOMME À SCANDALES
CORRUPTION PRÉSUMÉE À L’IAAF
Visé par une par une enquête menée par l’Agence mondiale antidopage au sujet d’un “système de corruption, de chantage et d’extorsion de fonds d’athlètes dopés russes et turcs”, Papa Massata Diack fait face à une énième affaire de justice.
Dans le milieu des affaires, le nom de Papa Massata Diack semble désormais lié aux scandales et à la justice. Ces 15 dernières années, le fils de Lamine Diack a souvent été cité dans des dossiers de ce genre. Le dernier coup du sort date d’il y a une semaine.
Papa Massata et son frère Khalil sont visés par une enquête menée par l’Agence mondiale antidopage (AMA) au sujet d’un “système de corruption, de chantage et d’extorsion de fonds d’athlètes dopés russes et turcs”. Les conclusions des experts de l’AMA précisent que l’argent de la corruption aurait été transféré à Singapour, où une entreprise nommée Black Tidings aurait servi de société-écran.
Cette même société, qui appartiendrait à un associé de Papa Massata Diack, “aurait servi à rembourser la marathonienne Liliya Shobukhova, qui menaçait soudainement de tout dévoiler”.
C’est en fait la deuxième fois de l’année que Massata Diack fait face à de telles révélations. En décembre 2014, des journaux britanniques l’ont accusé d’avoir demandé 5 millions de dollars au Qatar dans le cadre de l’organisation des championnats du monde par l’Association internationale des fédérations d'athlétisme (Iaaf) en 2017.
“Je tiens à remercier chacun d’entre vous pour votre soutien, alors que je fais face à des allégations que je réfute absolument”, avait-il démenti. Cet épisode l’a d’ailleurs contraint à démissionner. “En tant que consultant en marketing de l’Iaaf, j’ai passé plusieurs années à contribuer au développement de l’athlétisme et je suis préoccupé par l’impact que ces allégations pourraient avoir sur ce sport. J’ai donc pris la décision de me retirer temporairement de mon poste afin de laisser la Commission d’éthique indépendante de l’Iaaf faire ses enquêtes”, s’est-il résolu.
L’homme avait même essayé de donner des éléments pour se disculper : “J’ai travaillé en étroite collaboration avec Dentus, l’un des plus grands groupes de publicité dans le monde, et notre relation d’affaires a été basée sur la transparence et l’intégrité. Comment pourrais-je faire quelque chose susceptible de compromettre mon partenariat avec Dentsu ou les autres marques, les Fédérations, les diffuseurs ou les gouvernements, comme le disent certains médias ? Comment pourrais-je courir le risque de perdre tout ce que j’ai pu bâtir durant toute ma carrière ?”
Avec épopée 2002 des Lions
Si toutes ces accusations sont avérées, Papa Massata Diack risque la prison. Ce qui signifierait pour lui un retour dans le milieu carcéral. Car l’homme y a déjà fait un tour. En mars 2005, le patron de Pamodzi Consulting a été inculpé pour abus de confiance et pour faux et usage de faux dans les comptes financiers de l’opération Coupe du monde puis incarcéré en même temps que Oumar Ndiaye, ancien directeur administratif de la FSF, et Bounama Dièye, ancien premier vice-président de la FSF chargé de l'administration.
Ils étaient tous deux membres du Comité Foot 2002, en charge de l'organisation de la participation sénégalaise à la Coupe d'Afrique des Nations (CAN) et à la Coupe du monde. Impliqués dans “la gestion des retombées de cette épopée 2002 des Lions, ces trois messieurs auraient eu le tort de cumuler des frais de mission et de primes de qualification et des frais d'hébergement et de restauration excessifs lors du Mondial Corée du Sud-Japon.
Massata Diack a bénéficié plus tard d’une liberté provisoire contre le versement d’une caution de 100 millions F Cfa. Le montant équivalent au préjudice subi dans l’affaire.
Toutefois, les geôles ont encore rappelé le patron de Pamodzi Consulting en octobre 2014. Cette fois, c’était en dehors de ses affaires. Il a été gardé à vue avant d'être libéré provisoirement. Papa Massata Diack avait ouvert le feu sur deux ressortissants guinéens qui squattaient devant chez lui, à la cité Biagui.
Il avait visé les jambes et les Guinéens s’étaient retrouvés à l'Hôpital Général de Grand Yoff. Tout était parti du refus des deux hommes de quitter les lieux, arguant que c’était du domaine public. A la Gendarmerie de Ouakam, Massata avait déclaré avoir d’abord fait des “tirs de sommation”.
Massata Diack, l’opposé du père
Le patron de Pamodzi est loin d’être le fils de son père. Quand Lamine Diack affirmait ne pas avoir eu de jeunesse, Papa Massata, lui, a croqué la vie à pleines dents. En vrai “boy Dakar” ! Mais l’homme âgé aujourd’hui de 51 ans a fait son chemin pour être mondialement connu. Diplômé de l’Institut Franco-américain de Management de Paris (1986-1989), il a pu intégrer l’Iaaf que son père Lamine Diack a dirigée de 1999 à août 2015. “Je me sens heureux d’avoir contribué au développement de l’athlétisme mondial en tant que consultant en marketing à l’Iaaf.
En outre, je suis fier d’être le premier Africain à faire carrière dans le marketing sportif mondial. J’ai représenté plus de 55 clients dont Coca-Cola, Exxon mobil, Vodacom, Fujitsu, Panini, Société générale et Adidas dans le football, le tennis, le judo, les courses de chevaux, l’escrime et l’athlétisme. Je suis encore plus fier de ce que j’ai réalisé avec succès et dans la transparence”, se glorifie celui qui se dit spécialiste en Commerce et développement international. “Ma carrière a coïncidé́ avec des changements importants dans l’économie mondiale, avait-il fait remarquer. Je voyais les choses sous un angle différent.”
Comme les accusations des journaux britanniques. “La question est de savoir pourquoi ces allégations sont faites au moment même de changement politique à la tête de l’Iaaf. N’y a-t-il pas, derrière toutes ces allégations contre ma personne, une tentative de saper l’integrité d’un homme qui a consacré sa vie entière à la promotion de l’universalité de l’athlétisme et qui va laisser un héritage solide à son successeur (...) ? s’est-il interrogé.
Pour ceux qui me reprochent d’être le fils du président Lamine Diack, je leur dis qu’effectivement, c’est mon père, un homme pour qui j’ai beaucoup d'admiration parce qu’il est l’un des premiers Africains à diriger un organisme sportif mondial. (...) Il est mon père, mais au cours de notre relation professionnelle, il ne m’a jamais fait de faveurs.”
Aujourd’hui, le pater et le fils vont devoir encore se serrer les coudes pour se sortir de cette situation après les enquêtes sur “le système de corruption, de chantage et d’extorsion de fonds d’athlètes dopés russes et turcs” dans lequel ils seraient impliqués.