«EN 1981, JE ME SUIS RETROUVEE AVEC UNE FRACTURE DU STERNUM, DU MENTON ET LES MAINS DECHIQUETEES»
LES CONFIDENCES DE DIOUMA DIENG DIAKHATE
Ambassadrice itinérante du Président Macky Sall, la styliste Diouma Dieng Diakhaté, par ailleurs patronne du complexe Shalimar Couture compte pour L’Observateur les 5 dates qui ont marqué sa vie. Du cocasse au dramatique, tout y est.
1970 : «C’était la première fois que je suis entrée dans un avion pour aller en vacances en France. J’étais tellement heureuse que je n’ai pas dormi de la nuit. Le plus cocasse, c’est comme je tiens toujours à mon paraître, je me suis dit que ne descendrai pas à Paris sans prendre une douche. Je suis allée dans la cabine de toilette avec mon gant pour prendre une douche sans me rendre compte que l’eau coulait au dehors. Tout à coup, l’hôtesse a toqué à la porte et m’a demandé ce que je faisais. Je lui ai répondu que je prenais ma douche. Ils ont tous éclaté de rire. Prendre une douche dans un avion ? C’était la première fois qu’ils voyaient cela. Une fois à Paris, je me suis rendue aux Champs-Elysées et une fois devant une boutique très cotée dénommée Clarence, j’étais excitée à la vue des belles chaussures. Cette boutique habillait les femmes de chefs d’Etat et des milliardaires de l’époque. J’étais devant la vitrine et je me suis dit que le jour où j’aurais de l’argent, je reviendrais pour acheter des chaussures. Quand j’ai ouvert «Shalimar», je m’y suis rendue pour acheter 3 paires de chaussures. Et en 1983, lors de mon premier passage à la télévision nationale (Orts actuel Rts), j’ai demandé au caméraman de faire un gros plan de mes chaussures escarpins, qui devaient coûter 200 000 FCfa à l’époque, parce que j’avais toujours rêvé de posséder pareilles chaussures. Dieu a exaucé ma prière.»
31 DECEMBRE 1981 : «Cette date marque l’ouverture du complexe «Shalimar Couture». C’est une date qui m’a particulièrement marquée parce que ce jour-là, j’ai eu un accident de voiture à la rue 25 de la Médina. Un camion nous a percutés alors que nous quittions les allées du Centenaire pour nous rendre en ville. J’étais assise sur le siège passager du véhicule et le chauffeur était au volant. Il a eu 6 côtes cassées et la jambe gauche fracturée. Moi, je m’en suis tirée avec une fracture du sternum. Je suis restée clouée au lit pendant des jours et on me soulevait quand je devais effectuer le moindre mouvement. C’était très difficile. En plus, le pare-brise de la voiture a éclaté et a écorché mes mains et mon menton qui était aussi fracturé. Deux jours plus tard, le patron de l’Asecna de l’époque, un Gabonais est venu me rendre visite. Il m’a trouvée le visage enflé et les mains déchiquetées. J’étais immobilisée sur le lit. Il m’a dit : «Tu te feras un nom dans la couture parce que tu as sacrifié ton sang.» A l’époque, je n’avais que deux vieilles machines et je travaillais au garage de l’Asecna. C’est comme cela que tout est parti.»
15 JUIN 1983 : «Cette date coïncide avec le décès de mon père. Il est décédé à 17 heures et j’ai accouché à 23 heures de mon 4e enfant. Je suis entrée dans la phase de travail dès qu’on m’a annoncé le décès de mon papa. Il était hospitalisé à l’hôpital Principal de Dakar. J’étais presque à terme, mais cette mauvaise nouvelle a précipité mon accouchement. Mon papa était un grand ami pour moi. Mais ce qui m’a le plus chagrinée, c’est que je n’ai pas pu voir mon père une dernière fois. Je n’ai pas, non plus, pu assister à ses obsèques alors que j’étais à Dakar parce que j’étais hospitalisée à la clinique. Et pourtant, c’est moi qui l’ai fait admettre à l’hôpital Principal l’avant-veille. Tout a été fait en mon absence. Cela m’a fait trop mal.»
30 AOUT 1986 : «Cette date restera à jamais gravée dans ma mémoire parce qu’elle a vu naître l’unique fille que Dieu m’a donnée. J’ai longtemps désiré cette fille. Tous mes premiers enfants étaient des garçons. Quand j’ai accouché, je n’ai pas fermé l’œil de la nuit. Je faisais des va-et-vient entre ma chambre et la crèche pour vérifier si elle était toujours là, si on ne l’avait pas confondue avec un autre bébé. Une nuit, je suis allée à la crèche vers 4 heures du matin et j’ai trouvé l’infirmière sur place. Elle était tellement surprise qu’elle a crié avant de me rassurer en ces termes : «Mme Dieng, il faut vous reposer. Vous m’avez flanqué une de ces trouilles. Votre bébé est là, intacte et il ne lui arrivera rien.»
18 AOUT 1995 : «J’ai perdu ma mère, Dialla Guèye, à cette date. Je venais de finir la construction de ma maison sise aux Almadies et qui porte son nom. J’y ai aménagé en juillet 1995. Ma mère n’a passé qu’une seule nuit dans cette maison. Et le lendemain, ses premières paroles, vers 10 heures du matin, étaient qu’elle a rempli sa part du contrat avec Dieu et qu’elle pouvait mourir tranquille maintenant. Elle a toujours prié pour que Dieu me rétribue les bonnes actions que j’ai toujours eu à faire. Elle était fière de moi parce que quand j’ai perçu mon premier cachet dans la couture, j’ai immédiatement pensé à leur construire une maison pour elle et mon père. Ce geste l’a beaucoup marquée. C’est pourquoi, elle me disait toujours qu’elle ne serait pleinement heureuse que le jour où je construirais ma propre maison et qu’elle vive assez longtemps pour y assister. En ce moment, elle aura rempli son contrat envers Dieu. Ce même jour, vers 17 heures, alors qu’elle faisait ses ablutions pour la prière de Takussan, elle a fait un faux-pas et s’est fracturé le fémur. Elle a été hospitalisée et n’est plus revenue dans la maison jusqu’à sa mort. Elle est décédée un vendredi matin, il y a 18 ans de cela.»