TOMBONG "EST LE COUPABLE IDÉAL"
Mamadou Sèye Oualy, frère du présumé meurtrier de l’étudiant Bassirou Faye, soutient que ce dernier est victime de son nom de famille qui "ne sonne pas trop sénégalais"
Pour ne pas rester les bras croisés à attendre que la machine judiciaire ait fini de broyer son frère, Mamadou Séye Oualy, frère du policier présumé meurtrier de l’étudiant Bassirou Faye, nous a rendu visite pour cracher ses vérités. Dans cet entretien, (Nelson comme l’appellent ses proches) y va de ses révélations.
L’As : Votre frère est depuis quelques jours en détention pour le meurtre de l’étudiant Bassirou Faye. Comment vivez-vous cette situation ?
Mamadou Seye Oualy : La famille continue de penser et de croire que Tombong est innocent et qu’il est victime d’une machination de personnes tapies dans l’ombre. Au regard des éléments en notre possession, on ne peut pas ne pas se poser des questions sur beaucoup de points. D’abord, c’est le procureur de la République qui tient une conférence de presse le jeudi aux environs de 16h 30 mn pour dire qu’ils avaient identifié un coupable et arrêté le suspect numéro 1 dans l’affaire Bassirou Faye. Aux environs de 19h, à l’heure de la prière du crépuscule, mon frère était encore à la maison. C’est là-bas qu’il a prié "timis" avant de vaquer à ses occupations. Dans le comportement de Tombong, il n’y avait rien qui faisait penser qu’il était mêlé à l’affaire Bassirou Faye. C’est après la prière de "timis" qu’il a été appelé par son lieutenant qui se trouve au niveau de Liberté 6 qui l’informe qu’il devait aller répondre à la Dic. C’est 20 mn après que la Dic l’a rappelé pour lui faire savoir qu’il était attendu. Je répète que c’est à la maison qu’il a prié "timis" avant de déférer à la convocation de la Dic. C’est en compagnie de ma mère qu’il est sorti pour aller chercher un taxi. Aux environs de minuit, il a appelé ma mère pour l’informer de son arrestation et de sa garde-à-vue.
Est-ce qu’il savait le motif de sa convocation avant de se rendre à la Dic?
Peut-être ! Lorsqu’il est allé à la Dic, c’est lui et un autre qui ont été entendus dans le cadre de cette affaire. C’est quand l’autre est parti qu’on lui a fait savoir qu’il allait être arrêté et qu’il devait contacter sa famille. Il n’a rien fait. Quelqu’un qui a commis un meurtre ne peut pas être zen. Rien dans le comportement de Tombong n’avait changé. Il était toujours le même, malgré le tollé suscité par cette affaire. Je ne le dis pas parce que c’est mon frère, mais Tombong n’a rien à voir avec ce policier que l’on tente de décrire aux Sénégalais. Il n’a rien fait. Il est innocent, on cherche simplement à le sacrifier. On cherche à se donner bonne conscience. Il leur faut juste un bouc émissaire et comme son nom ne sonne pas trop sénégalais, certains se disent qu’il sera le coupable idéal. Mais c’est mal connaître sa famille. Nous nous battrons jusqu’au bout. A supposer même que quelqu’un ait pu infiltrer la police, pourquoi ce serait forcément lui ?
Quand l’avez-vous vu pour la dernière fois ?
Lors de son transfèrement de la police vers Rebeuss. On m’a permis de le voir. Je suis allé le trouver et je l’ai encouragé comme tout petit frère qui voit son aîné dans des difficultés. Il n’a rien fait. Ils sont en train de l’affaiblir en l’accusant d’un crime qu’il n’a pas commis. C’est quelque chose qui a été planifié. Par qui ? Je ne saurais le dire mais la vérité finira par éclater, d’autant que même la famille de Bassirou Faye n’est pas convaincue de sa culpabilité. C’est un coup monté. Le jour des faits, ce sont ses supérieurs qui l’ont appelé et ont mis une voiture et des minutions à sa disposition. Il ne s’est pas levé de son bon vouloir pour aller sur le théâtre des opérations. Il y a des policiers blessés qui ont même été acheminés à l’hôpital par ses soins. Il a reçu des félicitations de la hiérarchie. C’est cette même Police qui veut aujourd’hui le sacrifier sur l’autel de considérations subjectives : "Il nous faut un coupable pour calmer la furie des étudiants". Non ! Tombong ne mérite pas cela. Ils sont tous en train d’observer, de laisser la machine judiciaire le coincer. Personne d’entre ses chefs n’a le courage de se lever et de dire aux Sénégalais qui l’a tiré de son lit. Je ne sais pas trop comment la Police fonctionne, mais je pense qu’il n’est pas donné à n’importe qui de franchir la porte, de porter une tenue, d’aller dans le magasin des armes, d’y prendre des munitions et de sortir tranquillement pour prendre une voiture et foncer droit vers le théâtre des opérations. Cela signifie encore que l’argumentaire servi aux Sénégalais ne tient pas la route. On veut faire de lui l’agneau du sacrifice.
C’est pourtant la thèse avancée par la Police dans l’enquête préliminaire...
Si c’est comme ça que cela s’est passé, alors, les Sénégalais peuvent avoir des craintes pour leur propre sécurité. Comment une personne qui n’est pas des vôtres peut-elle passer entre les mailles du filet et se retrouver en position de commande sans que vous ne l’ayez reconnue ? C’est aberrant ! La famille de Bassirou et l’écrasante majorité des Sénégalais disent que ce n’est pas lui. Pourquoi bon Dieu, ils ne peuvent aller chercher le vrai coupable et laisser Tombong tranquille ? Pourquoi ils ne veulent pas aller chercher celui que Sette Diagne a identifié comme étant le tireur ? Tout ce que nous demandons aujourd’hui, c’est un traitement diligent de cette affaire. Nous avons vu beaucoup de cas comme celui-ci. On vous décerne un mandat de dépôt et après on vous oublie à l’intérieur durant un bon bout de temps. Pour le cas de mon frère, nous n’accepterons pas qu’il soit oublié à Rebeuss. Plus vite on réglera son cas, mieux ce sera pour tout le monde.
Êtes-vous en train de dire que Tombong ne plongera pas seul, comme il l’avait fait savoir aux premières heures de son arrestation ?
Non ! C’est faux, Tombong n’a jamais dit qu’il allait plonger avec d’autres. Je dois d’ailleurs souligner que nous ne savons toujours pas les conditions de sa détention. On ne l’a pas encore vu. Seul Me Bamba Cissé, son avocat, nous donne de temps à autre de ses nouvelles. Pour le voir, il nous faut des permis et ce n’est pas évident. En principe, c’est aujourd’hui (hier) que maman qui lui apporte à manger depuis son arrestation devait recevoir son permis de visite. Je ne sais pas si elle l’a vu ou non. On a également un autre frère, Ibrahima Oualy qui donne de temps à autre un coup de main à maman. Que les autorités nous tiennent le bon discours, parce que jusque-là, il n’y a rien de clair. Tout est flou. Et Tombong le leur a fait savoir quand il était à la Dic. Il leur a dit que lui il sait, la police sait et Dieu sait qui est l’auteur de ce crime. Qu’il n’a pas tué et que les gens devaient aller chercher le véritable tireur.
D’habitude dans ces cas, les organisations de défense des droits de l’homme sont promptes à épouser le combat. Est-ce que dans le cadre de cette affaire vous avez été saisis ?
C’est le lieu pour moi de leur lancer un appel. Elles ne se sont pas encore montrées. Mais, ce n’est pas trop tard. Elles peuvent bien faire en faisant de ce combat le leur, sinon mon frère sera sacrifié. La famille va porter plainte parce que le Tombong décrit aux Sénégalais n’a rien à voir avec notre frère. Le Tombong que nous nous connaissons, est un Sénégalais. Il est originaire de la région de Tambacounda où il a fait ses études. Et après l’obtention de son Bac, il est allé à l’université. Il avait dans un premier temps décidé qu’il allait être un gendarme. Il a fait la formation avant de sortir comme un auxiliaire. Par la suite, il est allé faire le concours des sous-officiers qu’il a réussi à passer. C’est après qu’il a démissionné de la gendarmerie pour faire le concours des inspecteurs de police. C’est comme ça qu’il est entré dans la police. J’ai entendu dire que c’est Me Ousmane Ngom et d’autres pontes de l’ancien régime qui sont derrière lui, je dis que c’est totalement faux. Tombong n’a jamais flirté avec les hommes politiques. C’est pour l’enfoncer davantage mais Tombong n’a jamais fait de la politique son dada. C’est un travailleur. Pour le prouver, le jour de la Tabaski, au moment où tout le monde s’affairait autour du mouton, lui est parti accomplir son devoir. Son mouton de Tabaski, ce sont mes frères et moi qui l’avons égorgé. Il n’a pas fait une heure de temps à la maison après la prière de l’Aid El Kebir. C’est un bosseur.