IL FAUT INFORMER LES CONSOMMATEURS DES AVANTAGES A UTILISER LES CIRCUITS FORMELS
AIDA DIARRA, VICE PRESIDENTE DE WESTERN UNION, RESPONSABLE DE LA ZONE AFRIQUE DU NORD, CENTREALE ET DE L’OUEST
Dans un marché des transferts d’argent de plus en plus concurrentiel, la question des tarifs se pose avec acuité, dans un contexte où les fonds envoyés par les migrants chaque année à leurs familles représentent des sommes colossales qui dépasseraient même l’aide au développement. Avec l’avènement de nouvelles structures de transferts d’argent au Sénégal, nous avons interpellé la vice-présidente de Western Union, opérateur historique s’il en est dans le domaine, sur les enjeux de cette concurrence. Entretien.
Les migrants sénégalais envoient-ils beaucoup d'argent vers leur pays d'origine ? Quel est le taux de transfert d'argent ?
Selon les derniers chiffres de la Banque mondiale, les envois de fonds au Sénégal devraient atteindre 1,562 milliard de dollars en 2013.
La crise économique en Europe a-t-elle eu un impact sur les envois de fonds en Afrique ?
La crise de la dette qui touche actuellement l’Europe et les taux de chômage élevés dans les pays riches de l'OCDE influent de manière néfaste sur les perspectives économiques et d'emploi des migrants. Ces taux de chômage constamment élevés ont donné naissance à des pressions politiques en faveur d'une réduction des taux d’immigration actuels. Cependant les envois de fonds sont généralement très stables. Même en période de crise, les Africains de la diaspora continuent d'envoyer de l'argent à leur famille, car ils savent que leur vie en dépend, même si le montant total envoyé est moins élevé.
Un autre point important est que la migration est la conséquence des opportunités économiques : même s'il existe des risques de ralentissement des flux migratoires vers l'Europe, nous observons de nouveaux mouvements au sein de l'Afrique et vers le Moyen-Orient.
Quelles sont les conséquences de la concurrence d’autres sociétés internationales sur les activités de Western Union ?
La concurrence a toujours existé et existera toujours dans le secteur des transferts d'argent. Chez WU, nous l’acceptons totalement (sic), car elle est un facteur essentiel pour mieux comprendre les consommateurs et mieux répondre à leurs besoins. En fin de compte, la concurrence est un bien pour les consommateurs, car elle leur donne davantage de choix.
Parmi nos concurrents, on trouve les réseaux informels, les opérateurs mondiaux, des acteurs implantés sur un petit corridor, ceux qui déploient de nouvelles technologies et les banques.
Selon nous, il faut continuer à informer les consommateurs des avantages à utiliser les circuits de transaction formels. Ces efforts permettront de donner une meilleure visibilité des flux vers et hors de leurs pays aux gouvernements africains.
Quelle est la position de WU en matière de réinvestissement des fonds ?
Notre priorité demeure de diversifier et d’élargir notre réseau pour accroitre l’accessibilité de notre service. Nous disposons désormais de plus de 1500 bureaux d’agents, notamment des banques, des bureaux de poste et des détaillants.
Nous investissons de manière significative dans la conformité et dans les mesures antifraude.
Nous nous impliquons également beaucoup, avec la collaboration de nos partenaires au Sénégal, dans des activités sociales telles que l’accompagnement des pèlerins lors du Magal ou du Gamou par exemple ; ou lorsque nous joignons nos efforts à ceux d’institutions telles que l’empire des Enfants.
Un autre axe de nos investissements s’articule autour du développement de nouvelles de solutions de transfert qui, bientôt seront implémentées au Sénégal.
Les frais de transferts de fonds sont jugés trop chers particulièrement en Afrique et au Sénégal, notamment à cause des clauses d’exclusivité passées avec les banques locales qui limitent de façon drastique la concurrence sur ce marché, qu’en pensez-vous?
Au Sénégal, tout comme dans plus de la moitié du continent africain, il n’y a plus de clauses d’exclusivité depuis plusieurs années.
Mais en général, les services de transfert d’argent proposés par Western Union sont une possibilité offerte aux populations pour l’envoi d’argent et ont été développés pour des clients de tous les milieux, pour envoyer de l’argent rapidement et avec plus de fiabilité dans le monde.
Les frais de transfert de Western Union sont élaborés selon un barème dégressif et varient en fonction du montant envoyé et en fonction de la destination d’envoi.
Western Union ne fait payer de frais qu’à l’envoyeur. Un petit pourcentage peut être appliqué pour les services de conversion des devises si nécessaire. Dans tous les cas, Western Union adapte ses prix en fonction des conditions du marché.
Le coût de nos frais prend en considération plusieurs de nos investissements dans la construction d’un réseau d’agences étendu qui permet aux clients d’envoyer de l’argent à la fois dans des zones rurales et mal desservies ; dans des moyens technologiques afin d’offrir à nos clients la possibilité d’envoyer de l’argent 24 h/ 24 et en quelques minutes ; dans des mesures de conformité et de lutte contre la fraude pour s’assurer de la sécurité du réseau.
Nous avons récemment mis en place un nouveau prix d'entrée à 500 XOF pour les transferts de fonds internes entre pays de l'UEMOA. Ces nouveaux taux étaient le résultat d’une baisse moyenne de 30 % des frais de transfert.
Pourquoi dans certains pays, on reçoit seulement des fonds et on ne peut pas envoyer via WU ?
Cela dépend des règlementations des pays.
Quel type de garantie pouvez-vous fournir contre le blanchiment d'argent ?
Nous sommes une société extrêmement réglementée, qui possède une grande expérience dans la surveillance des comportements suspects. Nous disposons de politiques, de procédures et de contrôles stricts pour détecter et empêcher les activités criminelles, ainsi que de technologies et de processus de pointe pour la surveillance des transactions.
Nous adhérons aux normes réglementaires dans les 200 pays et territoires dans lesquels nous opérons. Nous dépensons 100 millions de dollars par an dans des programmes de régularisation et de conformité qui incluent des efforts d’identification, de prévention et de signalement d’activités suspectes. Nos agents participent régulièrement à des programmes de formation dont le but est d'apprendre à identifier tous les comportements suspects. Nous consacrons des ressources importantes afin d’aider nos agents à respecter leurs obligations en matière de conformité.
Quel est le pays d’Afrique qui reçoit le montant le plus élevé d’envois de fonds ?
L'Égypte suivie du Nigéria et du Maroc, selon les données de la Banque mondiale.
Quelle est la position de l'Afrique au niveau international en matière d’envois de fonds ?
Selon le groupe AITE, les envois de fonds transfrontaliers ont atteint 466 milliards de dollars. Les envois de fonds officiellement enregistrés vers l'Afrique devraient s’élever à près de 60 milliards de dollars, ce qui représente environ 13 %.
Quel est le pays le plus touché par la crise économique en termes de taux de croissance des envois de fonds ?
L'impact de la crise financière mondiale sur les flux d’envois de fonds est difficile à mesurer, en raison du manque de données opportunes et fiables dans la plupart des pays africains. Les flux d’envois de fonds en Afrique ont diminué en 2009. Le recul dans les pays d’Afrique du Nord était plus important, en partie car la plupart des migrants originaires de cette région vivent en Europe, où le PIB a nettement chuté en 2009.