LE PORT CRÉE 3000 NOUVEAUX CHÔMEURS
CONSÉQUENCE DE LA CESSION DU TERMINAL DE VRAQUIER
La direction du port a offert le monopole de la manutention du transport des produits pondéreux non alimentaires à la société NECOTRANS, propriétaire de la société GETMA. S’il venait à être avalisé par le conseil d’administration qui se réunit demain mercredi, le contrat de concession obligera pas moins de 07 entreprises à mettre la clef sous le paillasson et réduira au chômage plus de 3000 salariés.
La réunion du Conseil d’Administration du Port autonome de Dakar demain, mercredi 13 novembre 2013, risque d’être fatidique aux entreprises sénégalaises de manutention, si elle venait à adopter le projet de concession du terminal vraquier multi produits de la direction générale. Le Syndicat des entreprises de manutention des ports du Sénégal (SEMPOS) craint qu'avec cette concession, tout ce qui est manutention et transport de produits pondéreux (phosphate, charbon, houille, etc.) au niveau du port de Dakar, soit désormais confié au groupe international Necotrans dont la filiale locale, la société Getma, n’occupe pas une bonne position dans le classement des entreprises de manutention établies au port. Contrairement à des entreprises sénégalaises qui se sont bien positionnées et assurent le travail pour des cimenteries comme la SOCOCIM, et les Ciments du Sahel. Parmi elles, on peut citer entre autres MLT, la TRANSSENE, la SOMICOA, les ICS, SEPHOS, SSPT et même la multinationale SDV.
Selon le rapport de présentation du projet de concession du terminal vraquier, ce projet s’inscrit dans le cadre « de la mise en œuvre de la politique de spécialisation et de développement des quais et renforcement du partenariat stratégique avec le secteur privé du port autonome de Dakar ». Les raisons du choix de Necotrans tiennent à trois points.
Le premier est relatif « au retard du port autonome de Dakar dans les différents segments des services portuaires notamment le trafic des pondéreux non alimentaires par des équipements de pointe préservant l’environnement. » Une situation qui expliquerait le mauvais classement du PAD au 110ème rang sur 155 ports, d’après un classement fait par la Banque mondiale. Les autres arguments avancés dans le rapport ont trait à « l’expérience et la notoriété du groupe Necotrans au plan international » et à l’intérêt qu'ilporte « à la compétitivité du PAD".
Dans le rapport, les autorités du port semblent se réjouir des engagements du concessionnaire à faire des investissements d’un montant global d'un peu plus de 48 milliards FCFA réalisables en deux phases. La première tranche de ces investissements qui commence avec l’entrée en vigueur du contrat est destinée à l’aménagement et à l’acquisition de matériels et d’équipements de manutention pour un montant global de 33 milliards F Cfa. La deuxième phase suspendue à l’atteinte d’un niveau de trafic de 3 millions de tonnes pour la durée de deux ans prévoit un investissement de 15.697.826.000 FCFA
Mais ce que le rapport ne mentionne pas, c’est que pour la réalisation de ces financements, le concessionnaire qui sera avalisé par l’Etat du Sénégal compte lever des fonds au niveau de différentes institutions financières (SFI PROPARCO, BAD) mais également des banques panafricaines (ATTIJARI WAFA BANK, ECOBANK, BOA), etc. Cela pose un problème de capacité financière du concessionnaire obligé de recourir à des emprunts avec la couverture de l’Etat.
Une situation d’autant plus étrange que n’importe quelle entreprise privée sénégalaise pourrait faire la même chose avec l’appui de l’Etat. Un argument que le Syndicat des entreprises de manutention des ports du Sénégal (SEMPOS) n’a pas manqué d’opposer aux autorités du port dans une lettre qu’elle leur a adressée, citant textuellement le rapport : « Concernant le financement des investissements, NECOTRANS se rapprochera de bailleurs de fonds internationaux (SFI PROPARCO, BAD) mais également de banques panafricaines (ATTIJARI WAFA BANK, ECOBANK, BOA etc.) ». Et le syndicat d'observer que du fait de l' indisponibilité des moyens, ces derniers se sont rapproché des bailleurs pour le financement. Ce que n’importe quel opérateur ayant un contrat avec l’état du Sénégal aurait pu faire , précise le syndicat.
Poursuivant dans leur entreprise de démolition de l’argumentaire de la direction du PAD, les membres du SEMPOS ajoutent que, s’agissant des investissements, « il n’est pas spécifié de manière claire les investissements à faire. On s’est contenté de donner des montants globaux astronomiques sans aucune justification. » Et sur le positionnement commercial du concessionnaire sur ce type de transport et de manutention, les réserves ne manquent pas, « le candidat n’a aucune expérience dans ce domaine au niveau du PAD. Sa structure locale GETMA est loin dans le classement des manutentionnaires au niveau du PAD pour ne pas dire qu’elle n’a réalisé aucun tonnage sur ce trafic ».
La der dans cette affaire est que la direction du port fait du gré à gré, et pour contourner ce cas flagrant de violation du code des marchés, elle utilise un argumentaire trop léger se fondant des dispositions de loi considérant « les concessions au niveau du PAD comme des concessions domaniales et non des marchés publics ou des concessions de service public ou des délégations de service public au sens du Code des obligation de l’administration ». Mais c’était en ne tenant pas compte de la jurisprudence avec la procédure utilisée dans les deux précédentes concessions (DUBAÏ PORT WORLD pour le terminal à Conteneurs et la SDV pour le mole 2) où un appel d’offre en bonne et due forme avait été fait, ce que du reste ont rappelé les manutentionnaires.
En effet, pour eux « ce projet est le troisième initié par le PAD dans le domaine des concessions. Les deux précédents ont fait l’objet d’un appel d’offres selon la procédure normale ; alors que dans le cas qui nous préoccupe rien n’a été fait dans ce sens, pas même une consultation des acteurs concernés par l’activité des produits à mettre en concession. Le manque de transparence est plus qu’évident », précise la lettre.
Au vu de tout cela, l’alerte a été sonnée quant aux conséquences qu’une telle concession pourrait avoir sur les entreprises de manutention qui sont dans le secteur et pourrait se traduire par leur fermeture. En plus de cela, le monopole accordé à NECOTRANS aura des conséquences économiques négatives sur les industries : cimenteries, mines, transporteurs, etc.
Finalement le syndicat concerné n’écarte pas l’idée d’un contentieux judiciaire avec le PAD, « les membres de notre Syndicat ne comprennent pas qu’après avoir créé des sociétés, embauchés du personnel, investit en matériel, et développer cette activité avec des partenaires, se trouvent injustement dépossédés de leur fond de commerce.
Cette situation entrainera inéluctablement des contentieux juridiques contre le PAD aux conséquences incalculables. ». Avant d’en arriver là, les victimes désignées de ce contrat de concession invitent les autorités du port à se ressaisir et à ouvrir des concertations avec elles.