MANDELA, L'EXEMPLE QUE WADE N'A PAS SU SUIVRE
Les symboles sont forts, très forts. Le Président Barack Obama a ordonné que les drapeaux soient mis berne à la Maison Blanche. François Hollande en a fait de même à l’Elysée. David Cameron a fait remplacer l’Union Jack par le drapeau Arc-en-ciel de l’Afrique du Sud sur le toit de la Résidence officielle du Premier ministre britannique, le 10 Downing Street. L’Empire State Building à New York a été illuminé des couleurs Arc-en-ciel.
La vie s’était arrêtée à l’Onu et partout dans le monde, le temps de rendre hommage à Nelson Mandela. La mort du leader du combat contre l’apartheid a fait la manchette unanime des journaux et s’est imposée pour bouleverser tous les programmes des chaînes de radio et de télévision. Aucune tête couronnée ne voudrait manquer les obsèques d’Etat organisées en l’honneur de Nelson Mandela. Un hommage universel est donc rendu à Nelson Mandela. C’est un truisme de dire qu’il le mérite bien. Il a donné à l’humanité des leçons de vie et de gouvernance politique. Nelson Mandela est une grande fierté pour nous tous. De son vivant, il a réuni son Peuple. Sa dépouille a soudé les fils et filles d’Afrique du Sud. Blancs, noirs et Indiens, qui s’entredéchiraient du temps de l’Apartheid, il y a encore vingt ans, se sont unis pour pleurer «Tata Madiba». On ose espérer que son corps sera une semence fertile pour la terre africaine, pour faire bourgeonner d’autres Nelson Mandela.
On regrettera simplement qu’il n’ait pu transmettre le flambeau de sa grande sagesse à un de ses contemporains, une autre figure politique africaine, qui aurait pu être Notre Nelson Mandela. Il s’agit du Président Abdoulaye Wade. Tout prédisposait Abdoulaye Wade à finir ses jours dans l’auréole, la gloire plutôt que de vivre dans une errance désespérée, pour se réduire, maintenant, à quémander des audiences à des émirs arabes. Dommage qu’il ait raté le train de l’histoire, car le plus simple parallèle le montrerait sous les traits d’un Nelson Mandela. Quel beau gâchis !
Abdoulaye Wade est arrivé au pouvoir au même âge que Nelson Mandela. Ils ont aussi en commun d’avoir bravé l’adversité politique et en ont payé durant des décennies, le prix de leur personne, de leur liberté. Leur idéal commun était l’instauration de la démocratie dans leurs pays respectifs, l’affranchissement et la renaissance de l’homme noir. Abdoulaye Wade est arrivé au pouvoir au moment où Nelson Mandela venait à peine de le quitter. L’image laissée au monde en 1998 par Nelson Mandela était encore fraîche en 2000 pour enseigner à Abdoulaye Wade la voie à suivre pour rester positivement dans l’histoire du monde, de l’Afrique et de son pays. Dieu sait qu’ils étaient nombreux à exhorter Abdoulaye Wade à suivre les pas de Nelson Mandela. La leçon était simple, facile à assimiler ; c’était de ne faire qu’un seul et unique mandat, de jeter les bases d’une société juste, équitable et de renforcer la démocratie. Les Sénégalais ne lui demandaient pas plus. Mais Abdoulaye Wade voulait se donner un destin autre. Il pensait sans doute que son confrère avocat, Nelson Mandela, ne lui arrivait pas à la cheville. Me Wade ne s’était-il pas affublé du titre d’être «le plus diplômé de Dakar à Nairobi et de Tunis au Cap» ? Ainsi, quand Mandela estimait ne pas devoir rempiler pour un autre mandat qui lui était destiné comme une banale formalité, Abdoulaye Wade lui, reniera sa parole de réduire son mandat de sept ans à cinq ans. Il en demandera un autre en 2007 et il se dédira une fois de plus en cherchant en vain à en avoir un troisième en 2012, quitte à marcher sur des dizaines de cadavres. C’était la course électorale de trop ! Nelson Mandela a quitté le pouvoir de lui-même. Abdoulaye Wade est parti sous l’humiliation, lourdement battu aux élections et conspué pour avoir voulu s’accrocher au pouvoir. Abdoulaye Wade était sorti du Palais la tête basse, ce qui contraste avec la sortie de Nelson Mandela rayonnant de joie et d’honneurs, sous les applaudissements de son Peuple et du monde entier.
Nelson Mandela n’était pas Abdoulaye Wade, à tous points de vue. Madiba avait tenu sa famille éloignée des affaires publiques et avait préféré ses fils spirituels à ses enfants biologiques. Abdoulaye Wade a, lui, placé tout ce qui comptait dans son pays entre les mains de ses enfants Karim et Sindiély. Cet égoïsme les rattrape aujourd’hui. Il a aussi cherché à tuer tous ses fils spirituels pour faire la place nette au sommet du pouvoir, à son fils biologique, Karim Wade. Mandela et encore moins sa famille n’ont piqué dans la caisse ou entretenu un système maffieux à la tête de l’Etat. La gouvernance de Abdoulaye Wade a été marquée par des scandales de toutes sortes et il était dans une logique d’accaparement répugnant. Résultat des courses ? Nelson Mandela a pu vivre tranquillement dans son pays après sa retraite politique et n’a jamais cherché à gêner ses successeurs Thabo Mbeki ou Jacob Zuma. Au contraire ! C’était une figure tutélaire, un sage auprès duquel tout le monde aimait aller se ressourcer. Macky Sall ne rêve pas de cela avec Abdoulaye Wade. Mais enfin, face à l’image que Nelson Mandela laisse à la postérité, Abdoulaye Wade, dans sa solitude et son intimité devrait éprouver du remords et des regrets de n’avoir pas fait comme Nelson Mandela.